Omnibus: un véritable bond en avant pour la Politique agricole commune

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Le compromis auquel sont parvenues, hier soir, les trois institutions européennes sur le volet agricole de l’Omnibus constitue un véritable bond en avant pour la Politique agricole commune – une véritable révision à mi-parcours de son volet économique –, et une démonstration claire que, dans une Union européenne plus politique et plus proche de la réalité du terrain, le Parlement européen joue un rôle central pour inspirer et dessiner l’avenir, grâce à la capacité de ses membres clefs à proposer des propositions fortes et bien calibrées – en particulier, sur ce dossier, Michel Dantin (PPE) et Paolo de Castro (S&D) qui ont construit sur les ouvertures initiales faites par le Commissaire Phil Hogan.

L’Omnibus va opérer des améliorations substantielles en matière de droit de la concurrence, offrant une vision d’avenir pour l’agriculture européenne, ancrée dans les réalités économiques et les objectifs stratégiques associés à ce secteur. Il ouvre la voie à un rééquilibrage substantiel du pouvoir au sein de la chaine alimentaire de l’UE, avec en particulier l’extension du paquet lait de 2010 à l’ensemble des filières. Les agriculteurs seront en droit d’avoir des contrats précisant clairement les prix et les volumes. Ils pourront regrouper leurs forces pour vendre collectivement leurs produits, définir les quantités et les standards de qualité au sein de leurs organisations de producteurs, agissant ainsi comme de véritables entités économiques uniques, au même titre que les autres acteurs de la chaine (transformateurs et distributeurs). De plus, le dialogue au sein de la chaine alimentaire va être encouragé grâce aux nouvelles prérogatives conférées aux organisations inter-professionnelles, en particulier en ce qui concerne les discussions sur la répartition de la valeur ajoutée, lorsque les marchés sont orientés à la hausse ou à la baisse.

Un dialogue renforcé et des règles de concurrence améliorées devraient permettre de mettre fin à une situation de champ de bataille au sein de la chaine alimentaire, et créer les conditions pour davantage de solidarité entre ses acteurs, afin de mieux lutter, notamment, contre la volatilité des marchés.

En matière de résilience et de gestion des risques, l’Omnibus offre un réel changement de paradigme pour la PAC. Le paquet règlementaire va donner la possibilité de mettre en place une gestion des aléas climatiques plus crédible à l’échelle européenne, ce qui est une priorité absolue dans le contexte du changement climatique. Il reviendra désormais aux Etats membres à travers l’UE de saisir cette opportunité et de dédier les ressources adéquates pour rendre les assurances climatiques réellement attractives.

Le cadre européen va désormais offrir la possibilité de déclencher les assurances climatiques dès 20% de pertes et de co-financer les primes à hauteur de 70%. Ces outils sont efficaces sur le plan de la gestion des ressources publiques : les études d’impact montrent qu’aider les agriculteurs à travers toute l’Europe à se prémunir mieux face aux risques de gel, d’inondation ou de sécheresse représenterait moins de 5% du budget actuel de la PAC, ce qui doit être comparé à l’amélioration considérable que cela représenterait pour les agriculteurs qui seraient dès lors mieux protégés face à l’un des principaux risques auxquels ils doivent faire face.

En ce qui concerne les risques de marché, les améliorations de l’Outil sectoriel de Stabilisation des Revenus, proposé initialement par la Commission européenne et renforcées par l’accord final vont ouvrir la possibilité pour des secteurs spécifiques (les producteurs et les transformateurs des secteurs concernés) de développer de façon pragmatique des outils pour mieux se protéger face aux crises. Basés sur des index, pour être plus réactifs, ciblant les activités spécifiques couvertes par le fonds (par exemple sucre ou lait) et non pas l’ensemble des activités de l’exploitation, avec un seuil de déclenchement à 20% et un co-financement de la PAC à 70%, ces nouveaux outils de stabilisation devront être construits par et pour les acteurs économiques et encouragés par les Etats membres à travers leurs programmes de développement rural.

Il est important de noter qu’au sein de l’Union européenne, 1,1 million d’exploitations agricoles (20% du total des exploitations) produit plus de 88% de notre nourriture. Pour l’essentiel, ces exploitations sont familiales et de taille moyenne ou petite. Ce chiffre de 20% des exploitations inclut l’ensemble des fermes européennes de plus de 19 hectares. Celles-ci, connectées aux marchés locaux, régionaux, européens ou mondiaux font face à une forte chute de leur compétitivité ces dernières années. Elles doivent de façon urgente être remises sur de bons rails pour être en position d’investir et d’être prêtes pour affronter les défis de demain, y compris en matière environnementale.

Une PAC véritablement commune, tournée vers des outils de gestion des risques performants, aura un rôle décisif à jouer dans les prochaines années pour offrir aux agriculteurs – qui sont des entrepreneurs, ingénieurs du vivant et de ses équilibres – doivent disposer de l’ensemble des outils pour assurer la durabilité économique et environnementale de leur exploitation.

Ce paquet règlementaire doit maintenant être adopté dans le cadre plus large de l’Omnibus Financier, dans les prochaines semaines, de façon à être mis en œuvre à compter du 1er janvier 2018. Il reviendra ensuite aux Etats membres d’adapter leurs programmes nationaux et aux acteurs économiques de saisir les opportunités offertes par le nouveau cadre européen.