UNE APPROCHE DURABLE POUR LES BIOCARBURANTS DANS LE DÉBAT SUR L’HUILE DE PALME

Cette semaine, le Parlement européen a voté un rapport visant à « demander à la Commission européenne de prendre des mesures pour assurer, entre autres, l’élimination progressive de l’huile de palme dans les biocarburants d’ici 2020 et d’instaurer un système de certification unique pour l’huile de palme entrant dans le marché de l’UE ». Ce rapport aborde la question sensible de l’huile de palme importée et des impacts potentiellement dommageables sur le climat et l’environnement (en particulier liés au drainage et à la déforestation des zones humides à haute valeur environnementale).

Cette résolution du Parlement est un signal positif et équilibré. Sur cette base, la Commission européenne pourrait construire une approche plus constructive concernant les biocarburants et les objectifs de décarbonisation des transports.

Au-delà des considérations simplistes, cette résolution appelle à l’introduction de critères de durabilité pour l’huile de palme et les produits contenant de l’huile de palme entrant dans l’UE avec un  système de certification obligatoire unique. Le Parlement souligne, aussi, que l’approche High Carbon Stock (HCS), qui est déjà approuvée par les principaux utilisateurs d’huile de palme, soutient la production d’huile de palme durable en fournissant un ensemble de règles pour la mise en œuvre d’engagements par les entreprises en matière de « Non Déforestation » de leurs activités liées à l’huile de palme et de leur chaîne d’approvisionnement.

Cette approche permet de prendre en compte et de trouver des réponses solides aux défis liés à la production durable de palme, à l’instar du « Palm Oil Innovation Group« , une initiative multipartite (fondée en 2013 et développée en partenariat avec les principales ONG et producteurs d’huile de palme) qui promeut des pratiques responsables de production d’huile de palme par les acteurs clefs de la chaîne d’approvisionnement.

Le rapport du PE sur l’huile de palme et la déforestation précise également que « l’interdiction ou l’élimination progressive de l’huile de palme peut provoquer le développement d’huiles végétales tropicales remplaçantes utilisées pour la production de biocarburants,  qui, selon toute vraisemblance, seraient cultivées dans les mêmes régions écologiquement sensibles que l’huile de palme et qui auraient un impact beaucoup plus élevé sur la biodiversité, l’utilisation des terres et les émissions de gaz à effet de serre que l’huile de palme elle-même« . Il « recommande de trouver et de promouvoir des alternatives plus durables pour l’utilisation des biocarburants, telles que les huiles européennes produites à partir de graines de colza et de tournesol cultivées à l’intérieur du pays « .

Farm Europe se félicite de cette approche, qui fait une nette différenciation entre les différents types de biocarburants et souligne la contribution positive des biocarburants à base de matières premières européennes. Comme indiqué dans notre rapport sur les biocarburants, un développement durable des biocarburants de première génération est une opportunité pour la décarbonisation des transports (plus de 50% des économies de gaz à effet de serre), la résilience du secteur agroalimentaire européen (demande stable pour les agriculteurs, emplois et investissements ruraux) et une réduction efficace de la dépendance européenne aux protéines importées.

Les décideurs européens devraient promouvoir une véritable approche stratégique fondée sur les faits en ce qui concerne les biocarburants en tenant compte de la capacité réelle des biocarburants durables « Made in EU » à constituer un outil clé pour contribuer à la fois à la durabilité environnementale et au développement économique dans les zones rurales.

Une distinction claire devrait être faite entre les biocarburants fabriqués à partir d’oléagineux, de céréales et de betteraves à sucre cultivées dans l’Union européenne, et des biocarburants fabriqués à partir d’huile de palme importée et d’huiles usées ou d’importations en provenance de territoires ayant des effets de durabilité ou de déplacement non vérifiables.

En renforçant efficacement les critères de durabilité pour la production et la consommation de biocarburants, l’UE peut réduire les gaz à effet de serre sans causer d’effets nocifs sur l’environnement ailleurs dans le monde et sans adopter une position simpliste sur la contribution potentielle de l’agriculture aux objectifs environnementaux.

La contribution du Parlement européen sur l’huile de palme offre une approche politique claire pour parvenir à une stratégie solide, équilibrée et durable pour l’Union européenne en matière de biocarburants.

Droit de la concurrence: l’avis de l’Avocat Général sur l’endive, enfin!

Dans le cadre du différent datant de 2007 entre l’Autorité de concurrence française et l’association des producteurs vendeurs d’endives et autres opérateurs, la Cour de Cassation française a saisi la cour de justice de l’Union européenne sur la capacité des organisations de producteurs, associations d’organisations de producteurs et autres opérateurs à mener des concertations sur les prix ou sur les quantités mises en marché.

Dans son avis rendu ce jour, l’avocat général relève que les règles communes du droit de la concurrence ne s’appliquent pas aux pratiques de négociations collectives des prix de vente (ou de prix de vente unique) menées par une organisation de producteurs ou une association d’organisation de producteurs qui ont parmi leurs objets celui de la commercialisation des produits visés. Il en est de même de la concertation en matière de quantités à mettre sur le marché et des échanges d’informations stratégiques.

Une OP ou une AOP est considérée devant avoir les mêmes droits qu’une entreprise commerciale de droit privé ; une OP ou une AOP est bien une entité juridique entière.

Dans ce cadre, le droit commun de la concurrence doit s’appliquer aux concertations sur les prix, les quantités à mettre en marché ou les échanges d’information stratégiques entre entités juridiques distinctes – donc entre OP différentes ou AOP différentes – et sont donc interdites.

Est aussi interdit la fixation d’un prix minimum entre producteurs tant entre des OPs ou AOPs différentes qu’au sein d’une OP ou d’une AOP.

Cette opinion de la Cour de justice de l’Union européenne est un signal positif pour les OPs et les AOPs:

  • D’une part, il confirme les orientations des législateurs prises lors de la réforme de la PAC de 2013 en matière de droit spécifique s’appliquant aux OPs et AOPs dans le secteur agricole, les dispositions de la PAC prédominant sur les règles communes du droit de la concurrence.
  • D’autre part, cela confirme l’acquis règlementaire, antérieur à la réforme de 2013, et devrait mettre fin aux débats d’interprétation sur ce point très important pour l’organisation des filières. Il est souhaitable qu’il soit confirmé par la Cour de justice, ce qui permettra de clarifier définitivement les marges de manoeuvre existantes pour les OPs et les AOPs, et éviter, en particulier, les lectures divergentes de la part d’autorités de la concurrence nationales.