Certes, la Politique agricole commune peut techniquement et financièrement faire face au choix du Royaume Uni de quitter l’Union européenne. Mais elle doit, plus que tout, et de toute urgence, en tirer les conséquences politiques.
Il est urgent, pour l’Union européenne, d’assumer au quotidien ses véritables responsabilités, et, notamment faire vivre, une des plus grandes réalisations de la construction européenne. La Politique agricole commune fait partie des projets concrets sur lesquels l’Europe peut et doit s’appuyer, alors qu’elle a donné, ces derniers temps le sentiment de s’en désintéresser.
La PAC, lorsqu’elle sait prendre soin efficacement des agriculteurs et des zones rurales, offre une vraie valeur ajoutée aux citoyens européens, au plus proche de leur quotidien : la nourriture, l’environnement rural. Ces sujets sont loin d’être ringards ou dépassés.
L’Europe a su démontrer au cours des décennies passées son efficacité – aucune politique d’investissement et de croissance n’a aussi bien rentabilisé les moyens communautarisés. La PAC doit retrouver sa capacité d’adaptation aux évolutions économiques et sociétales, et pas seulement aux enjeux environnementaux.
Sans plus tergiverser, il convient, d’abord, d’agir face à la crise, violentes, que traversent la quasi-totalité de nos filières agricoles.
L’inaction et les non-choix de ces derniers mois sont indignes d’une grande politique européenne, et ce, d’autant plus quand les moyens budgétaires existent.
Agissons, maintenant, avec un plan de crise européen d’ampleur et d’application immédiate. Dès la semaine prochaine, le Conseil des ministres de l’Agriculture a la possibilité de mettre un point final à cette crise avec des actions fortes permettant de relancer les prix du lait.
Mais projetons-nous, aussi, au-delà de la crise.
La PAC n’a jamais été statique, et ne peut l’être pour répondre aux défis d’aujourd’hui. Elle doit retrouver l’agilité perdue, sur le terrain économique, sans retomber dans ses démons du passé qui l’ont décrédibilisé, les fameuses montagnes de beurre et de lait. La réforme de 2013 était une réforme sociétale importante, certes. Mais pour le volet économique, qu’il a été impossible de faire avancer face aux atermoiements généralisés des responsables communautaires et nationaux, tout est encore à construire.
Les voies ouvertes en 2013 sont trop timides pour faire face aux enjeux des risques et de la volatilité des marchés agricoles. Il convient d’écrire une nouvelle page de la PAC qui permettra aux secteurs agricoles et agro-alimentaires européens d’avoir les moyens de forger leur ambition de modernité, alliant croissance renouvelée et durabilité effective tant économique qu’environnementale.
Les agriculteurs doivent être protégés, sans complexes, face à la mondialisation et accompagnés dans un monde où l’agriculture européenne dispose d’atouts remarquables pour contribuer au défi de la sécurité alimentaire qu’il ne faut pas perdre de vue.
Investissements, résilience, durabilité doivent devenir les trois volets du nouveau logiciel PAC, qui se réconciliera ainsi avec une évidence : il n’y a pas de durabilité environnementale sans durabilité économique. Ce principe simple doit guider la PAC sans plus attendre.
Au-delà des concepts, cela signifie des engagements très concrets : faire confiance aux agriculteurs sur les sujets de durabilité, soutenir réellement l’innovation et le progrès, protéger vigoureusement des risques qu’ils soit environnementaux ou économiques à travers des mécanismes d’assurance et de fonds mutuels puissants.
La PAC doit s’affirmer comme une politique d’investissements résolument ancrée dans son temps, prenant le pari de la modernité d’une agriculture prête à faire un saut technologique majeur qui porte en lui la plus grande des réponses aux défis de la compétitivité et de la durabilité, en les alliant, loin des théories qui continuent à la opposer stérilement.
Ce sursaut est à portée de main. Il suppose une volonté politique claire et sans faille.