LA COMMISSION RÉÉCRIT L’HISTOIRE ET IGNORE LA LÉGITIMITÉ

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Dans une publication diffusée cette semaine « Travailler avec le Parlement et le Conseil pour adapter la réforme de la PAC au Pacte Vert européen », la Commission tente de réécrire l’histoire de la réforme en cours de la PAC.

La Commission critique les positions du Parlement européen et du Conseil au motif que ces institutions demanderaient une certaine flexibilité dans la mise en œuvre des éco-régimes et que cela pourrait réduire les ressources qui pourront bénéficier au climat et à l’environnement.

La Commission omet qu’elle a proposé une flexibilité totale pour la mise en œuvre des éco-régimes, sans aucune restriction quant à l’allocation ou non des ressources, contrairement aux positions prises par le Parlement européen et le Conseil. Ce que la Commission a proposé en 2018 pourrait, en réalité,  entraîner une diminution des ressources pour le climat et l’environnement et, dans tous les cas, rendre impossible la réalisation des objectifs de l’UE.

La Commission critique également les co-législateurs pour avoir dilué le cadre de performance de la PAC réformée. La Commission semble là encore oublier qu’elle n’a pas proposé un seul vrai indicateur de performance à contrôler, tous les objectifs proposés n’étant que des résultats statistiques.

D’autres exemples peuvent être évoqués, car la Commission a laissé aux États membres la conception des politiques nationales et régionales, y compris les exigences de conditionnalité de base comme la définition de la rotation.

Le fait est que dans la proposition de la Commission, l’impact sur le climat et l’environnement est une boîte noire.

La Commission semble donc tenter de réécrire l’histoire afin de trouver une nouvelle légitimité pour imposer ses propres objectifs de « Pacte Vert » et aligner la PAC sur ses propositions de stratégies « de la ferme à la fourchette » et « biodiversité ».

Le raisonnement de la Commission est que les objectifs du Pacte Vert ont été approuvés par tous, mais que malheureusement « certains aspects des positions du législateur ne correspondent pas à l’objectif d’une nouvelle PAC qui réalise les dits objectifs ». Dés lors, la Commission serait autorisée à « vérifier la cohérence des plans stratégiques avec les objectifs du Pacte Vert« .

La position de la Commission soulève deux problèmes importants de légitimité. Premièrement, seuls les objectifs globaux du Pacte Vert de réduction des émissions de GES ont été confirmés par les co-législateurs à ce stade. Les objectifs de la Commission dans les stratégies « de la ferme à la fourchette » et « biodiversité » n’ont pas été approuvés. Il n’y a pas eu encore de proposition législative. La Commission manque donc de légitimité institutionnelle pour tenter de les imposer via l’approbation des plans stratégiques de la PAC.

La Commission manque également de légitimité politique pour imposer ces objectifs (10% de terres agricoles mises en jachère, -20% d’engrais chimiques,    -50% de pesticides chimiques, 25% de la production biologique, plantation de 3 milliards d’arbres, -50% d’antimicrobiens pour le bétail), car elle n’a pas réalisé d’analyse d’impact préalable à ces propositions de grande envergure, ni publié d’études sur leur impact à ce jour.

La seule analyse publiée à ce jour est celle réalisée par l’USDA. Elle conclut à un désastre pour le secteur agricole, pour les consommateurs de l’UE et pour la sécurité alimentaire (cette étude met en exergue une réduction de la production agricole de l’UE de 12 %, une augmentation des prix de 17 %, une baisse des exportations de 20 %, un accroissement des importations de 2 %, une chute du revenu agricole brut de 16 % et une hausse du coût alimentaire annuel par habitant dans l’UE de 153 dollars).

Dans ce contexte, il est grand temps que la Commission publie une analyse d’impact indépendante des pressions politiques, et qu’elle publie sans délai l’étude d’évaluation de l’impact des stratégies « de la ferme à la fourchette » et « biodiversité » sur l’agriculture, dont elle a fait état dans son analyse d’impact du plan climat 2030.