Publication des stratégies F2F et Biodiversité

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La Commission européenne a publié aujourd’hui sa stratégie pour la biodiversité à l’horizon 2030 et sa stratégie «de la ferme à la fourchette». Dans le cadre du Green Deal, ceux-ci sont présentés comme une feuille de route pour de nouvelles initiatives sur la préservation et la protection de la biodiversité et sur la mise en place d’un système alimentaire équitable, sain et respectueux de l’environnement.

Farm Europe salue la contribution à une réflexion stratégique sur l’avenir des systèmes agricoles et alimentaires pour l’UE. De fait, les politiques de l’UE doivent contribuer à renforcer à la fois la protection de l’environnement, la lutte contre le changement climatique, la situation économique des agriculteurs et garantir la sécurité alimentaire.

Ces communications de la Commission contiennent des éléments positifs, reconnaissant notamment la nécessité d’assurer la sécurité alimentaire, la qualité des aliments européens, la situation économique difficile des agriculteurs, la nécessité de mieux définir les futures mesures eco-schemes, de soutenir l’agriculture numérique et la production de biométhane en Europe, pour en nommer quelques-uns.

Cependant, ces deux stratégies laissent ouvert un certain nombre de questions sur la cohérence globale de ce qui est proposé.

La semaine dernière, la commissaire Kyriakides a déclaré que de meilleures données étaient nécessaires pour décider de l’identification et de la quantification de ces objectifs de réduction. Cependant, des réductions importantes de l’usage des pesticides et des engrais ainsi qu’une diminution des terres agricoles en production sont proposées.

Faire ces propositions sans fournir d’analyse d’impact semble incompréhensible.

La Commission se doit d’abord de démontrer que ses propositions n’entraîneront pas une charge économique supplémentaire pour les agriculteurs ni n’induiront une diminution de la production agricole de l’UE, ce qui serait loin de l’objectif d’accroître la sécurité alimentaire européenne et de stimuler la croissance dans l’UE et de ses zones rurales.

Aujourd’hui, au-delà des propos avancés sur la sécurité alimentaire, l’amélioration de la durabilité environnementale et économique des filières et territoires agricoles, il est donc nécessaire d’analyser la valeur ajoutée que les mesures proposées pourraient apporter à l’Union européenne.

Or, les deux stratégies proposées combinées, si elles sont mises en œuvre telles quelles, entraîneraient avant tout une réduction de 15% de la production agricole de l’UE et une forte baisse de la sécurité alimentaire de l’UE.

En outre, les nouvelles exigences envisagées pour les secteurs agricoles européens contrastent fortement avec une position faible sur le chapitre des importations, où un meilleur étiquetage est suggéré. Les agriculteurs de l’UE seront donc confrontés à des conditions encore moins équitables, étant tenus de respecter des conditions environnementales plus strictes et coûteuses auxquelles leurs concurrents ne seraient pas soumis.

Enfin, certaines incohérences doivent être corrigées concernant la relation entre la stratégie de la ferme à la fourchette et la réforme de la politique agricole commune (PAC).

Comme l’a déclaré le vice-président Timmermans, un niveau élevé de protection de l’environnement et d’intégration des politiques environnementales peut être combiné avec un niveau de développement économique et de croissance tout aussi élevé.

Il est grand temps que l’UE veille à ce que cela devienne réalité, en premier lieu par des stratégies européennes ambitieuses, responsables et équilibrées.

 

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Premières analyses des mesures proposées par la CE :

– Les stratégies proposées soulignent la nécessité d’investissements innovants dans les systèmes agroalimentaires de l’UE mais restent malheureusement vagues sur le soutien qui serait apporté, sans un mot sur la nécessité de disposer d’une boîte à outils plus efficace pour mieux faire face aux risques et aux crises climatiques et de marché. Après la pandémie de COVID-19 et son impact économique sur le secteur, le besoin d’outils supplémentaires de gestion des risques et des crises est évident.

– Dans le même temps, elles proposent des mesures restrictives très précises à mettre en œuvre d’ici 2030 sur l’utilisation des intrants, sur la part des terres agricoles à laisser improductives (10% avec une localisation à déterminer par les États membres – malgré l’importance environnementale d’assurer une présence homogène des SIE-) et sur la part des terres agricoles de l’UE en agriculture biologique (25%), tout en faisant un lien confus entre l’impact économique et environnemental de l’agro-écologie et de l’agriculture biologique.

– En ce qui concerne la production de protéines dans l’UE, l’Union Européenne mérite mieux que des vœux pieux. La Commission devrait s’engager à proposer des moyens concrets et efficaces et reconnaître que le seul outil efficace au cours des dernières décennies pour augmenter cette production a été le développement de biocarburants d’origine européenne.

 

En ce qui concerne le lien entre les deux stratégies proposées et la réforme de la PAC, une interrogation émerge sur la manière dont la Commission définirait les objectifs de réduction pour les États membres tout en tenant compte de leurs différences et des réalités agricoles.

Comment la Commission obligerait-elle les États membres à respecter ses objectifs dans les plans stratégiques élaborés en 2022 sans base juridique fixant les objectifs de réduction des pesticides et des engrais, cette base étant liée pour la Commission à une révision de la directive afférente qui sera proposée en 2022?

Se pose également le problème de la cohérence entre :

  • le projet de réforme de la PAC qui prétend confier aux États membres la tâche de définir 27 stratégies nationales différentes de mise en œuvre de la PAC,
  • et l’objectif de la Commission de renforcer son pouvoir, de définir des orientations pour chaque État membre et de transformer les exigences qu’elle propose dans ces deux stratégies en conditions d’approbation des plans stratégiques nationaux de la PAC.