RÉPARTITION DE LA PAC: PEU DE GAGNANTS (RELATIFS), BEAUCOUP DE PERDANTS

La Commission européenne a publié, le 17 septembre, le projet d’allocations nationales de la Politique agricole commune pour la période 2028-2034 dans le cadre des négociations en cours sur le prochain cadre financier pluriannuel. Dans l’ensemble, la Commission européenne propose une approche à plusieurs vitesses pour la contribution des Etats membres à sa proposition de réduction budgétaire.

Compte tenu de la volonté affichée par la Commission européenne de concentrer la PAC sur « ceux qui en ont le plus besoin », des questions se posent quant à la pertinence et aux modalités d’une clé de répartition qui fait des Pays-Bas, de loin, les « gagnants » relatifs de la proposition de la Commission européenne, ou plutôt, les « meilleurs perdants ». Sans minimiser l’importance du secteur agricole aux Pays-Bas et sa forte productivité à l’hectare, il est important de rappeler qu’au cours des dernières années, les agriculteurs de cet État membre ont bénéficié d’un complément national sous forme d’aides d’État confortables. Ces dernières ont représenté au total au moins 100 % de leurs paiements directs au cours des quatre dernières années.

La Belgique bénéficie également de manière substantielle, toujours en termes relatifs, de la nouvelle allocation, tout comme l’Espagne et le Portugal dans une moindre mesure. Si la France, l’Italie, la Bulgarie, l’Estonie, la Lettonie, la Pologne, la Roumanie et la Slovaquie conservent globalement leur part du budget (réduit) de la PAC, l’Irlande, l’Allemagne, l’Autriche, la Slovénie, la Grèce, le Danemark et le Luxembourg font partie des perdants.

Cette première évaluation tient compte du fait que tous les États membres ne bénéficient pas du programme POSEI (régions ultrapériphériques). Elle devra être affinée en intégrant les programmes LEADER et en tenant compte du sort des programmes sectoriels qui ne font pas partie du budget dans le cadre du partenariat national et régional réservé à la future PAC. Toutefois, cet ajustement du calcul ne devrait pas modifier substantiellement la tendance.

Dans l’ensemble, la France reste le premier bénéficiaire de cette politique, devant l’Espagne, l’Allemagne, l’Italie, la Pologne et la Roumanie.

SOTEU : ce que la Présidente von der Leyen n’a pas dit sur l’état de l’agriculture européenne

La Présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a prononcé ce matin son discours annuel sur l’état de l’Union (SOTEU) devant le Parlement européen, présentant les priorités de l’Union européenne pour l’année à venir.

Dans son discours, elle a mis l’accent sur cinq domaines principaux : la défense – Ukraine et Moyen-Orient, la compétitivité et l’emploi, le niveau de vie et l’accessibilité, le commerce, la démocratie et la migration.

Farm Europe salue la reconnaissance du rôle crucial des agriculteurs dans l’approvisionnement de l’UE en denrées alimentaires de qualité et abordables. Cependant, nous regrettons l’absence de vision sur le rôle fondamental de l’agriculture pour l’ensemble de l’UE ainsi que l’absence d’engagements concrets pour construire des politiques ambitieuses et tournées vers l’avenir, afin de garantir un avenir compétitif au secteur agricole européen.

De cette manière, la Présidente von der Leyen a enterré la plupart des nombreuses promesses qui avaient suivi les manifestations d’agriculteurs l’année dernière. Le « pacte des agriculteurs », promis par le PPE — sa propre famille politique — lors des élections européennes, semble déjà oublié, les orientations actuelles de Mme von der Leyen étant antagonistes à une ambition renouvelée pour l’agriculture européenne.

Voici donc ce que la Présidente von der Leyen aurait dû dire afin de dresser un bilan honnête de la réalité de l’agriculture européenne — et non de « Vonderland » — entre reconnaissance des responsabilités et mesures prévues pour nos agriculteurs :  

  1. Ce que la Présidente von der Leyen a dit sur l’agriculture :

« Les agriculteurs sont les gardiens de nos terres. En Europe, nous avons accès à des aliments de haute qualité que nos agriculteurs exceptionnels produisent à des prix abordables. Ils sont essentiels à notre sécurité alimentaire. Nous devons promouvoir le “Made in Europe”. Nos agriculteurs ont besoin d’une concurrence équitable et de règles du jeu équilibrées. Je proposerai de lancer une campagne européenne pour l’alimentation. »

Ce qu’elle aurait dû reconnaître :

« Trop de concessions ont été faites dans les accords commerciaux, risquant de compromettre la viabilité du secteur agricole européen et ouvrant le marché unique de l’UE à une concurrence déloyale. »

Avec la conclusion des accords commerciaux avec les États-Unis et les pays du Mercosur au cours des derniers mois, la Commission européenne devrait reconnaître que le secteur fait face à des relations commerciales déséquilibrées qui compromettent ses exportations et leur valeur, tout en ouvrant le marché unique de l’UE à une concurrence déloyale. Et par-dessus les accords déjà finalisés, l’UE travaille actuellement à un nouvel accord avec l’Inde. 

  1. Ce que la Présidente von der Leyen a dit sur les relations commerciales :

« Sur le Mercosur : nous avons des garde-fous solides dans notre accord commercial avec le Mercosur – assortis de financements en cas de besoin de compensations. »

« Sur l’UE–États-Unis : en tenant compte des exceptions que nous avons obtenues et des droits additionnels appliqués ailleurs – nous avons le meilleur accord. Sans aucun doute. »

Ce qu’elle aurait dû reconnaître :

« L’accord UE–États-Unis est un accord perdant-gagnant, car certains États membres m’ont forcée à faire des concessions pour protéger l’industrie automobile, exposant les agriculteurs européens à des revenus plus faibles, à des positions de marché affaiblies et à une concurrence déloyale. Il viole également les règles de l’OMC, créant un risque supplémentaire de contestations juridiques. »

L’accord commercial UE–États-Unis signé en août 2025 favorise largement les États-Unis, l’UE ayant accordé la plupart des concessions. Les vins haut de gamme, les pâtes, biscuits, fromages, bières et spiritueux européens perdront en compétitivité, avec des pertes estimées à plusieurs milliards d’euros. À cela s’ajoutent des concessions massives de l’UE, notamment la suppression des droits de douane sur les fruits, légumes, fruits secs, semences, confitures et jus, ainsi que de nouveaux contingents tarifaires : 25 000 tonnes pour le porc, 500 000 tonnes pour les fruits à coque et 400 000 tonnes pour l’huile de soja. Les secteurs des fruits et légumes, des semences et des fruits à coque devraient être les plus durement touchés par cette concurrence accrue.

« Je suis pleinement consciente des risques graves que représente le Mercosur pour nos agriculteurs, car le Mercosur est une puissance agroalimentaire avec des normes et standards différents, qui affectent l’égalité des conditions de concurrence. » 

Afin d’apaiser les fortes inquiétudes exprimées par certains États membres (notamment la France, l’Italie et la Pologne) quant aux effets néfastes de l’accord sur l’agriculture européenne, l’exécutif européen s’est engagé à mettre en place des garde-fous bilatéraux renforcés, qui apparaissent toutefois largement inefficaces pour protéger les agriculteurs européens.

« Cela s’ajoute aux tensions commerciales avec d’autres partenaires, qui affectent déjà nos agriculteurs. » 

En effet, cette situation est aggravée par la décision de la Chine d’imposer des droits antidumping provisoires allant de 15,6 % à 62,4 % sur les importations européennes de porc, à compter du 10 septembre, en raison d’une enquête en cours sur de possibles subventions déloyales.

  1. Ce que la Présidente von der Leyen a dit sur la proposition de CFP et l’avenir de la PAC :

« Nous avons simplifié la PAC et sanctuarisé les aides au revenu dans le prochain CFP. »

« Et nous avons veillé à ce que les financements puissent être complétés par des enveloppes nationales et régionales. »

Quelle est la réalité qu’elle aurait dû reconnaître : 

« Avec ma proposition de CFP, les États membres doivent être conscients que leur secteur agricole fera face à une véritable crise existentielle. Ils doivent augmenter d’au moins 95 milliards d’euros le budget de la PAC pour investir ensemble dans l’avenir de notre secteur agroalimentaire. »

Le plan réduit le budget de la PAC à 300 milliards d’euros (y compris le nouveau filet de sécurité “Unity Safety Net”), ce qui constitue une réduction de 17,6 % en euros courants (en intégrant les nouveaux paramètres sanctuarisés), bien en deçà des 482,5 milliards nécessaires pour maintenir le niveau de 2020, ou des 395 milliards pour 2027. Bien que la réserve de crise ait été augmentée à 6,3 milliards d’euros, ses modalités d’activation doivent être redéfinies pour offrir une réponse efficace et concrète aux agriculteurs.

  1. Ce que la Présidente von der Leyen a dit sur le marché européen : 

« Le marché unique est notre atout le plus précieux. »

Quelle est la réalité qu’elle aurait dû reconnaître :

« De plus, le nouveau cadre de performance et le fonds unique doivent servir d’électrochoc aux États membres et aux députés européens. Veulent-ils des politiques véritablement européennes ou des confrontations permanentes au sein du marché unique ? Ils doivent prendre leurs responsabilités et promouvoir une véritable ambition européenne plutôt que de toujours réclamer des flexibilités. »

La proposition de fonds unique mettrait en péril le caractère commun et l’autonomie de la politique agricole commune. La dimension économique plus large de la PAC est reléguée au second plan, les indicateurs exclusivement environnementaux et sociaux dominant le cadre de performance unique pour évaluer les dépenses budgétaires.

Les mots comptent : un vote gagnant pour les agriculteurs et les consommateurs

Farm Europe et Eat Europe saluent chaleureusement l’adoption aujourd’hui, par la Commission de l’agriculture et du développement rural du Parlement européen (COMAGRI), du rapport de l’eurodéputée Céline Imart visant à renforcer la position des agriculteurs au sein de la chaîne d’approvisionnement alimentaire.

Ce vote constitue une avancée majeure pour promouvoir l’équité et la transparence dans l’ensemble du secteur agroalimentaire européen. En particulier, le rapport adopte une position ferme sur la question essentielle de l’étiquetage des produits et intègre des dispositions solides destinées à protéger les dénominations de la viande — une mesure indispensable pour éviter les pratiques trompeuses et soutenir le secteur européen de l’élevage.

Nous saluons avec force la position claire de la COMAGRI en faveur de la transparence et de la protection des consommateurs, à un moment où les pratiques de marketing brouillent de plus en plus la distinction entre les produits traditionnels d’origine animale et leurs imitations d’origine végétale ou de culture cellulaire.

Le vote d’aujourd’hui envoie également un message fort à l’approche des discussions sur l’avenir de la politique agricole commune (PAC) et de la révision proposée par la Commission du règlement sur l’organisation commune des marchés (OCM). Cette proposition — fruit du plaidoyer constant de Farm Europe et Eat Europe — inclut déjà une première étape en faveur de la protection des termes liés à la viande, mais des progrès supplémentaires sont nécessaires.

À cet égard, le rapport de l’eurodéputée Imart revêt une importance particulière. Il fixe un objectif politique de long terme et appelle à l’introduction rapide d’un cadre solide et complet pour la protection des dénominations des produits carnés.

À l’heure actuelle, des termes clés tels que « burger », « saucisse » et « steak » restent en dehors du champ des dispositions proposées par la Commission, alors qu’ils figurent parmi les appellations les plus couramment utilisées de façon abusive pour commercialiser des produits d’imitation. Les mots comptent ! Un étiquetage clair et honnête n’est pas qu’une question de marketing — c’est une question de santé publique, de confiance des consommateurs et de concurrence loyale.

Nous appelons désormais le Parlement européen à confirmer ce signal positif en séance plénière. Un fort soutien constituera un socle essentiel pour les prochaines négociations interinstitutionnelles sur la réforme de la PAC et contribuera à renforcer la protection des dénominations de la viande tout en luttant contre les pratiques de marketing trompeuses.

La future législation devra non seulement garantir un environnement économique plus équitable pour les agriculteurs européens, mais aussi permettre aux consommateurs de faire des choix alimentaires pleinement éclairés — en particulier en ce qui concerne la valeur nutritionnelle et le niveau de transformation des produits.

La campagne « Les mots comptent », lancée en 2024, a mis en évidence le rôle essentiel d’un étiquetage transparent pour construire un système alimentaire durable. La protection des dénominations de la viande constitue une partie clé de cette vision plus large — garantissant que les politiques agroalimentaires européennes soutiennent la durabilité sociale, économique et environnementale.

COMAGRI : Un renforcement de la position des agriculteurs dans la chaîne alimentaire

Farm Europe se félicite de l’avancée obtenue pour renforcer la position des agriculteurs dans la chaîne d’approvisionnement agroalimentaire, après l’adoption aujourd’hui, par la Commission de l’agriculture et du développement rural, du projet de rapport de l’eurodéputée Céline Imart modifiant la réforme de l’Organisation commune des marchés (OCM), lors de sa réunion extraordinaire à Strasbourg.

À la suite de l’adoption de la position du Conseil le 19 mai, la Commission de l’agriculture et du développement rural du Parlement européen a adopté un rapport crucial, avec des propositions clés pour rééquilibrer le fonctionnement de la chaîne d’approvisionnement alimentaire et mieux protéger les agriculteurs européens, dans le cadre de la réforme de l’Organisation commune des marchés (OCM).

Même si les compromis adoptés sont, par définition, des compromis, la plupart d’entre eux représentent une avancée importante et très positive pour les agriculteurs, envoyant ainsi un signal fort à l’approche des prochaines discussions sur la nouvelle réforme de la PAC.

Ils constituent une étape significative pour améliorer le fonctionnement de la chaîne alimentaire de l’UE et surmonter la faiblesse chronique du maillon agricole, en clarifiant les relations contractuelles, en renforçant la capacité des agriculteurs à s’organiser via la consolidation de l’offre, et en reconnaissant les spécificités des coopératives avec des dispositions adéquates qui mettent en valeur et soulignent leurs normes élevées de relations équitables avec leurs membres. Ces modifications ne constituent pas un point final sur ce dossier, mais bien un véritable pas en avant vers la nécessité de rééquilibrage.

La position de négociation que le Parlement européen adoptera à ce sujet est importante, non seulement pour apporter des réponses à court terme, mais aussi pour envoyer un signal clair en amont des négociations et décisions qui devront être prises dans le cadre de la réforme de la PAC, dont le processus a été lancé avec la proposition de la Commission le 16 juillet.

MERCOSUR : une nouvelle tentative sapant l’agriculture européenne

Alors que la Commission européenne se préparerait à présenter demain l’accord UE-Mercosur pour ratification, Farm Europe et Eat Europe dénoncent fermement cette initiative, qu’elles considèrent comme un raccourci politique préjudiciable menaçant l’intégrité de l’agriculture européenne et la crédibilité des engagements environnementaux et climatiques de l’UE.

« Suite au paquet MFF profondément défaillant adopté en juillet et au récent accord commercial déséquilibré avec les États-Unis, cette tentative de faire passer un accord qui reste inchangé dans son fond – notamment dans son chapitre agricole – met en évidence un sérieux décalage entre les déclarations politiques et les choix réels de politique, confirmant la ligne suivie par la présidente von der Leyen ces derniers mois, contrairement à ses engagements de l’an dernier », a déclaré Yves Madre, président de Farm Europe.

Cette initiative est un signe supplémentaire que l’agriculture est traitée non pas comme un atout stratégique, mais comme une simple monnaie d’échange. Si elle est confirmée, elle s’ajoutera à une série d’évolutions négatives pour les agriculteurs européens ces derniers mois – des coupes dans le budget de la PAC aux concessions accordées dans les négociations transatlantiques – démontrant que le secteur agricole recule toujours plus dans la liste des priorités de l’UE.

Luigi Scordamaglia, président de Eat Europe, a souligné que « L’idée selon laquelle cet accord pourrait encourager les pays du Mercosur à adopter une production plus durable est trompeuse. L’accord ne contient aucun engagement contraignant, aucune clause de durabilité applicable et aucun mécanisme crédible de responsabilité. Toute affirmation de progrès environnemental est, au mieux, aspirative. Dans sa forme actuelle – a poursuivi Scordamaglia – l’accord UE-Mercosur est fondamentalement incompatible avec la cohérence politique et stratégique de l’UE, notamment en matière d’objectifs climatiques, de normes environnementales et de principes de commerce équitable. Il saperait directement les chaînes de valeur agricoles clés de l’UE et exposerait les agriculteurs européens à une concurrence déloyale de producteurs opérant selon des normes bien moins strictes en matière de protection de l’environnement, de sécurité alimentaire et de bien-être animal ».

Nous appelons donc les décideurs à faire preuve de responsabilité et à reconsidérer immédiatement la poursuite de cet accord. Dans sa forme actuelle, l’accord UE-Mercosur :

  • Affaiblirait le marché agricole intérieur de l’UE et menacerait la viabilité des économies rurales ;
  • Saperait le principe de réciprocité en autorisant des importations produites selon des normes inférieures ;
  • Mettrait en péril les objectifs environnementaux et climatiques de l’UE ;
  • Éroderait la crédibilité de l’UE en tant que leader mondial du développement durable.

Les accords commerciaux peuvent être des outils puissants de croissance économique – mais seulement s’ils reposent sur l’équité, la réciprocité et la responsabilité environnementale. L’accord UE-Mercosur échoue sur tous ces fronts.

Plutôt que d’ouvrir les portes aux géants agroalimentaires d’Amérique latine, l’Union européenne doit défendre ses producteurs, garantir des normes élevées pour ses consommateurs et tracer une nouvelle vision ambitieuse pour l’agriculture et les systèmes alimentaires – une vision fondée sur la durabilité, la résilience et la force du modèle « Made in Europe ».

Commerce UE-US : l’agriculture européenne paie l’addition

La Commission européenne a présenté aujourd’hui la déclaration conjointe sur le cadre des échanges commerciaux entre les États-Unis et l’UE.
Le nouveau niveau des droits de douane pour les exportations européennes vers les États-Unis a été relevé à 15 % pour les produits qui bénéficiaient auparavant de droits plus bas (4,8 % en moyenne).
Pour ceux qui étaient déjà taxés à des taux plus élevés, le niveau sera maintenu, à l’exception de quelques secteurs qui semblent avoir retenu toute l’attention de la Commission européenne — et des intérêts américains — à savoir les ressources naturelles indisponibles (y compris le liège), l’ensemble des aéronefs et de leurs pièces, les produits pharmaceutiques génériques et leurs ingrédients, les précurseurs chimiques et l’automobile.
Pour les produits pharmaceutiques, les semi-conducteurs, le bois d’œuvre ainsi que l’automobile et ses pièces, le taux tarifaire, comprenant le tarif NPF et le tarif imposé au titre de la section 232 du Trade Expansion Act de 1962, ne dépassera pas 15 %.
Des intentions d’achats d’énergie et de puces d’IA américaines, ainsi que des investissements aux États-Unis, complètent cette déclaration.

En ce qui concerne le secteur agroalimentaire, la situation est particulièrement préoccupante et déséquilibrée. De nombreux doutes subsistent quant aux futures relations commerciales dans ce domaine. Pour l’instant, la Commission a échoué à défendre les intérêts offensifs de l’agroalimentaire européen.
À première vue, si tel est le point de départ de futures négociations plus sensées, l’agriculture européenne part avec un sérieux retard.
Les éventuelles exceptions pour l’agriculture ne sont pas clarifiées, tandis que des concessions vagues sont accordées aux importations américaines dans certains secteurs agricoles clés de l’UE, non seulement ceux déjà mentionnés (par exemple les produits laitiers), mais aussi des secteurs essentiels tels que les fruits et légumes et la viande porcine.

Une attention particulière doit être portée à l’idée de coopération dans le domaine des normes sanitaires et phytosanitaires. Même si la Commission européenne exclut tout affaiblissement des normes SPS de l’UE, quel sera l’impact réel de « l’accès préférentiel » qui sera accordé à certains produits agroalimentaires américains ?

En ce qui concerne le vin et les spiritueux, la déclaration reste silencieuse sur ces secteurs, qui semblent avoir été négligés, voire sacrifiés, lors des négociations menées par la Commission européenne. Le taux de 15 % s’appliquera à la valeur du produit exporté, rendant les produits européens plus chers sur le marché américain et compromettant les efforts menés depuis de nombreuses années pour obtenir reconnaissance et parts de marché aux États-Unis.

Une fois de plus, l’agriculture semble être traitée comme une roue de secours et une monnaie d’échange, tandis que les intérêts de certains secteurs tels que l’industrie automobile semblent avoir constitué la principale préoccupation des négociateurs européens.

Protéger les dénominations de viande : une victoire pour les agriculteurs et les consommateurs

Farm Europe et EAT Europe saluent la proposition de la Commission européenne d’introduire des principes clairs pour la protection des dénominations de viande dans le projet de révision du règlement relatif à l’Organisation Commune des Marchés (OCM), dans le cadre de la réforme plus large de la Politique Agricole Commune (PAC).

Cette inclusion – fermement défendue par les deux organisations – envoie un message clair en faveur de la transparence pour les consommateurs et de l’équité pour les producteurs.

Cependant, il demeure difficile de comprendre pourquoi des termes essentiels tels que « burger », « saucisse » ou « steak » restent exclus des dispositions juridiques, alors même qu’ils figurent parmi les appellations les plus fréquemment détournées dans la commercialisation des produits de substitution.

La transparence signifie appeler les aliments par leur nom exact. Les mots comptent. Les dénominations ne sont pas de simples outils marketing – elles ont un impact direct sur la santé et le bien-être des citoyens. Les consommateurs doivent être correctement informés, en particulier sur la valeur nutritionnelle et le niveau de transformation des produits qu’ils achètent.

Nous saluons tout particulièrement la reconnaissance explicite par la Commission de la nécessité d’une harmonisation des terminologies relatives aux produits carnés à l’échelle de l’UE – une démarche cohérente avec les normes déjà en vigueur pour le secteur laitier.

Cette proposition fait écho à un récent appel conjoint de Farm Europe et EAT Europe adressé aux commissaires Várhelyi et Hansen, donnant voix à la campagne « Les mots ont un sens » lancée en octobre 2024. Cette campagne souligne l’urgence de garantir aux consommateurs la possibilité de distinguer clairement les produits d’origine animale de leurs imitations – souvent très transformées et présentant un profil nutritionnel différent – afin d’éviter toute confusion ou tromperie sur le marché.

Il est significatif que la Commission reconnaisse l’importance d’introduire des dispositions juridiques spécifiques pour protéger les termes liés à la viande. De telles règles renforceraient la transparence sur le marché intérieur en matière de composition et de valeur nutritionnelle des aliments, permettant aux consommateurs de faire des choix éclairés – en particulier ceux recherchant les bienfaits nutritionnels traditionnellement associés aux produits carnés.

Néanmoins, des débats supplémentaires seront essentiels dans les mois à venir – notamment au regard des discussions en cours au sein du Parlement européen, dont le rapport de la députée européenne Imart, qui propose déjà des modifications substantielles au règlement OCM actuel.

L’objectif final doit être de garantir à la fois la transparence pour les consommateurs et la pérennité de l’élevage européen – un pilier clé du secteur agroalimentaire de l’UE, tant sur le plan social qu’environnemental.

Des sujets fondamentaux comme la transparence, l’éducation des consommateurs, le niveau de transformation des aliments et les alternatives cultivées en laboratoire seront au cœur de la prochaine étude d’EAT Europe sur la durabilité alimentaire. Cette étude sera officiellement présentée au Parlement européen le 14 octobre 2025, lors d’un événement accueilli par la députée européenne Esther Herranz Garcia, avec la participation du commissaire européen à la Santé et au Bien-être animal, Oliver Várhelyi.

Plus d’informations sur notre campagne « Les mots comptent » :

Le cœur de la souveraineté agricole de l’UE ciblé par la baisse des aides

Le choix de la répartition des aides de la Politique agricole commune (PAC) est aujourd’hui le principal levier d’action de cette politique, levier sur lequel repose une large part de la capacité d’investissement et de projection dans l’avenir des exploitations de l’UE. Il reflète les priorités portées à l’échelle de l’UE pour l’avenir de l’agriculture et des exploitations du Continent.

Depuis le début du mandat, l’actuel collège des Commissaires a focalisé les débats sur la concentration des aides de la PAC sur « ceux qui en ont le plus besoin », un défi particulièrement épineux compte tenu des sensibilités climatiques, agronomiques, géographiques et sectorielles, épineux également compte tenu de la nécessité d’une clef européenne pour éviter les distorsions de concurrence tout en offrant suffisamment de souplesse pour respecter la diversité des structures d’exploitation.

Ainsi, le 16 juillet, la Commission européenne a décidé de mettre sur la table une double proposition de forte réduction budgétaire pour la PAC, assortie à une redistribution radicale des aides cumulant à la fois une dégressivité des soutiens dès 20.000EUR, et leur plafonnement à 100.000EUR.

Farm Europe a analysé la portée de la formule envisagée par la Commission européenne sur la base des données publiques de répartition des aides de 2022. Elles offrent un outil d’analyse de la structure des exploitations à travers l’Union. Sans que les chiffres soient valables à l’euro près, ils donnent une première projection solide qui pourra être affiné par les agences de paiement nationales.

Ainsi, cette analyse révèle que les taux de dégressivité et de plafonnement pour l’aide de base au revenu ciblent de plein fouet les agriculteurs qui sont, aujourd’hui, le socle de la production européenne. Plus de la moitié de la Surface agricole utile de l’UE serait affectée par la réduction des aides, ce chiffre grimpe à deux tiers, dès lors que l’on exclut les exploitations considérées comme les plus petites (moins de 5000EUR d’aides), pour l’essentiel concernées par l’aide forfaire, ou au seuil de celle-ci. Un tier des agriculteurs de plus de 12 hectares verrait ses aides réduites par la dégressivité à l’échelle de l’Union européenne.

Cette analyse européenne ne suffit pas à prendre conscience de l’ampleur des conséquences de la formule choisie par la Commission européenne. En effet, dans des pays tels que la France ou la République tchèque pourtant aux structures très différentes, c’est le modèle agricole même du pays qui serait remis en cause. En France, plus de 50% des agriculteurs percevant plus de 5000EUR par an seraient concernés par une réduction de l’aide, ceux-ci représentant 73% de la Surface agricole totale française. En République tchèque, ce chiffre grimperait à 85% de l’appareil productif concerné. En Italie, où les exploitations agricoles sont relativement petites en moyenne, pas moins de 57 % des hectares seraient touchés par la dégressivité pour les structures non éligibles au régime des petits agriculteurs.

A diverses échelles, tous les Etats membres seraient durement touchés par cette proposition qui semble plus dictée par un souci d’économie qu’une réelle volonté d’équité ou une vision d’avenir du secteur. Alors que l’exécutif européen affiche l’ambition bienvenue de vouloir recentrer la politique sur ceux qui produisent, sa proposition en matière de ciblage sur « ceux qui en ont le plus besoin » ferait donc l’inverse.

Une telle formule aurait pour conséquence de renforcer encore un peu plus la pression économique sur les exploitations qui représentent aujourd’hui l’essentiel de la production de l’UE. A n’en point douter, cette approche serait un accélérateur du processus de restructuration de l’agriculture, poussant à l’agrandissement, et mettant en difficulté en particulier l’installation de jeunes agriculteurs dans le cadre d’exploitations familiales traditionnelles. Il pourrait également inciter les agriculteurs de l’UE à concentrer leurs efforts sur une réduction des coûts, plutôt qu’une optimisation de leur production, avec à la clef un sérieux coup de canif à l’objectif de souveraineté agricole. 

UE

ITALIE

FRANCE

TCHÉQUIE

Fonds unique et PAC : Von der Leyen trahit les agriculteurs européens

Timmermans en avait rêvé, von der Leyen l’a fait. Si la Commission européenne avait voulu alimenter le populisme et les malentendus dans les zones rurales, elle n’aurait pas pu faire mieux : 

– une réduction de près de 20 % du budget de la PAC (en intégrant les nouveaux paramètres réservés) ;

– l’intégration de la Politique agricole commune dans le Fonds unique ;

– un verdissement poussé via le cadre de performance de la politique, qui sape sa dimension économique ;

– une renationalisation de cette politique via une approche « à la carte » sans mécanisme commun sérieux. 

Cette proposition initiale porte un coup dur à l’agriculture européenne et à tous les agriculteurs qui ont exprimé leur consternation il y a un peu plus d’un an. Farm Europe appelle les colégislateurs et les principaux décideurs de l’UE, les États membres et le Parlement européen, à corriger le tir et à repousser fermement cette proposition afin de raviver une véritable ambition et vision pour l’Europe. 

L’obstination de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, à escamoter tout débat sur l’avenir de la Politique agricole commune montre sa détermination à saper le caractère unique de cette politique et son manque évident de compréhension de l’importance économique de celle-ci. 

Alors que 482,5 milliards d’euros sont nécessaires pour maintenir le budget de la PAC à son niveau de 2020, ou 395 milliards d’euros pour maintenir son niveau de 2027, la proposition de la Commission, qui s’élève à 300 milliards d’euros, fait des agriculteurs les grands perdants de l’héritage d’Ursula von der Leyen depuis 2021. Le doublement de la réserve de crise à 6,3 milliards d’euros est la seule mesure positive à retenir en cette journée très triste pour l’agriculture européenne.

La volonté de subordonner la PAC à un cadre de performance unique couvrant toutes les politiques de l’UE est claire à cet égard. Ce cadre de performance unique nie la nature économique de la politique agricole européenne à travers 32 indicateurs exclusivement environnementaux et sociaux, ce qui est loin des déclarations sur l’autonomie stratégique et la sécurité alimentaire faites au secteur il n’y a pas si longtemps. 

Le concept « Do No Harm » semble être généralisé à tous les financements de la PAC sans indication claire quant aux conséquences de ce principe. Une double conditionnalité est introduite dans la proposition de la Commission européenne via les 27 mécanismes de conditionnalité différents (article 3) et une nouvelle disposition générale donnant la priorité à l’environnement et au climat comme priorités exclusives de la PAC. La dimension économique fondamentale de la PAC est mise de côté et les conditions de concurrence équitables sont sapées.

Le cadre résiduel réservé à la spécificité des règles de la PAC augmente le risque de renationalisation et renforce la perception du caractère marginal de l’avenir de cette politique dans l’esprit de la présidente de la Commission européenne, ce qui est loin d’être à la hauteur des défis vitaux auxquels sont confrontées les zones rurales. 

À cet égard, Farm Europe condamne une orientation politique dangereuse pour le projet européen dans son ensemble et appelle les États membres et le Parlement européen à sauver le lien unique qui unit l’Union européenne, ses citoyens et ses agriculteurs, à un moment où l’institution chargée de l’intérêt général européen semble l’abandonner.

En ce qui concerne les dispositions spécifiques de la PAC (sous réserve de l’évaluation des propositions de règlements définitives non disponibles au moment de la publication du présent communiqué de presse) : 

  • La priorité accordée à « ceux qui en ont le plus besoin » marginalise les outils de la Politique agricole commune. Même si nous saluons la priorité donnée à ceux qui produisent. Les paramètres fixés pour la dégressivité et le plafonnement sont déconnectés de la réalité de l’agriculture européenne et envoient un message contraire à la volonté de concentrer la PAC sur ceux qui produisent.
  • Le renouvellement des paiements liés à la production montre que la question de la production est prise en compte, tout comme l’importance d’un soutien au revenu différencié selon les territoires. Cependant, l’absence quasi totale de paramètres communs pour définir ces paiements ouvre la voie à des distorsions importantes qui mettraient les agriculteurs en concurrence les uns avec les autres. 
  • L’architecture verte a été bouleversée, avec un mécanisme de conditionnalité généralisé, la soumission à des indicateurs globaux de performance environnementale, climatique et sociale (cadre de performance), le principe « Do No Harm » et l’obligation pour les États membres de donner la priorité aux objectifs environnementaux et climatiques (article 4). Deux types de mesures sont prévus pour les engagements environnementaux et les mesures de transition volontaires, ces dernières étant plafonnées à 200 000 euros. L’absence d’une base de référence commune à l’UE constitue, là encore, une menace directe pour l’égalité des conditions de concurrence. 
  • Enfin, il convient de saluer la volonté de la Commission de mettre l’accent sur l’élaboration d’une véritable politique de gestion des risques dans tous les États membres de l’UE, qui doit s’accompagner d’une véritable réserve de crise européenne. Le fonctionnement de cette réserve doit être clarifié de toute urgence afin de garantir son efficacité, plutôt que de se contenter de promesses vides. De même, le changement d’orientation sur la question de l’élevage mérite également d’être souligné, en particulier la possibilité d’exploiter pleinement les pâturages et de protéger les appellations de viande.
  • À ce stade, la volonté d’accélérer la numérisation de l’agriculture est également clairement exprimée, mais elle ne s’est pas encore traduite par des outils suffisamment solides pour exploiter pleinement le potentiel de ces transformations.

Une PAC affaiblie : ce n’est pas notre Europe

Comment la Présidente von der Leyen peut-elle envisager de diluer le budget de la PAC dans un fonds unique, aux côtés d’autres politiques qui ne sont même pas mentionnées dans les traités de l’Union européenne ?

Comment la Présidente von der Leyen peut-elle envisager de réduire le budget de la PAC, à un moment où l’Europe a plus que jamais besoin d’une politique agricole forte pour soutenir ses agriculteurs partout en Europe ?

La PAC a besoin d’un plan d’investissement ambitieux, pas d’un choc de désinvestissement.

À la veille de la présentation du budget de l’UE et de la future PAC, Farm Europe se tient aux côtés des agriculteurs inquiets pour leur avenir. Le secteur agricole fait face à des chocs géopolitiques, à des pressions commerciales de la part de nos alliés outre-mer, aux défis climatiques, environnementaux et à de nombreuses autres attentes.

Les agriculteurs sont sur tous les fronts.

La Politique Agricole Commune a déjà subi un choc de désinvestissement important ces dernières années en raison de l’inflation. Près de deux années de paiements directs manquent sur la période 2021-2027 pour maintenir sa valeur économique. Pour la période 2028-2034, 535 milliards d’euros seraient nécessaires pour retrouver la valeur de la PAC de 2020, et 411 milliards pour maintenir celle de 2027.

Une renationalisation serait un coup supplémentaire porté à la valeur de la PAC, les mesures nationales étant plus coûteuses et portant atteinte à l’intégrité du marché unique.

Ainsi, à la veille de l’adoption des propositions, Farm Europe appelle la Présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, à cesser de démanteler la PAC, à cesser de saper son budget, à cesser de fragiliser notre agriculture, notre sécurité alimentaire, notre santé et la sûreté de notre alimentation.

Nos indicateurs de souveraineté agricole sont déjà dans le rouge. Les agriculteurs ont besoin de l’Europe. Nous avons besoin d’une PAC forte aujourd’hui et pour l’avenir.

Une PAC affaiblie, ce n’est pas notre Europe !