Avec ou sans frontières, les pratiques commerciales déloyales restent déloyales

Aujourd’hui, la présidence du Conseil et les négociateurs du Parlement européen sont parvenus à un accord provisoire concernant les pratiques commerciales déloyales transfrontalières dans les relations interentreprises au sein de la chaîne d’approvisionnement agricole et alimentaire.

Grâce au texte convenu, la coopération entre les autorités nationales responsables de l’application de l’interdiction européenne des pratiques commerciales déloyales sera renforcée. Cet accord garantit que les pratiques déloyales transfrontalières affectant les agriculteurs et petits producteurs de produits agricoles de la part de grands acheteurs — y compris les chaînes de distribution et leurs alliances — soient effectivement prévenues, enquêtées et sanctionnées.

Farm Europe salue le travail du Commissaire Hansen, du rapporteur Stefano Bonaccini ainsi que de la Présidence danoise pour cette amélioration tant attendue du marché intérieur. Cet accord contribuera à renforcer la position des agriculteurs dans la chaîne d’approvisionnement agroalimentaire et à améliorer la coopération transnationale lorsque les fournisseurs et les acheteurs sont établis dans différents États membres. Il s’agit d’une étape importante, qui devra être complétée par la prochaine révision plus large de la directive sur les pratiques commerciales déloyales (UTP).

Concrètement, l’accord provisoire soutient les objectifs suivants :

  • Introduction d’un mécanisme d’assistance mutuelle, permettant aux autorités nationales d’échanger des informations, de collaborer dans le cadre d’enquêtes et de coordonner les actions d’exécution.
  • Mise en place de règles relatives au partage des coûts, à la protection des données et à la confidentialité, afin de garantir la protection des fournisseurs contre les représailles.
  • Création d’un mécanisme d’action coordonnée pour les affaires transfrontalières de grande ampleur impliquant au moins trois pays de l’UE, avec désignation d’un État membre chargé de diriger la réponse.
  • Lancement d’une coopération avec les acheteurs non européens, visant à mieux protéger les agriculteurs européens contre les pratiques déloyales provenant de l’extérieur de l’Union européenne.

L’accord provisoire doit désormais être confirmé par le Conseil et le Parlement européen avant que l’acte législatif ne soit formellement adopté par les colégislateurs.

Propositions de la présidente Von der Leyen : le crépuscule de l’Europe et de la Pac

Depuis la présentation de la proposition de CFP le 16 juillet, il est clair – et largement reconnu au sein du Parlement européen – que le cadre budgétaire proposé par la présidente Ursula von der Leyen, et en particulier le concept de fonds unique, doit être rejeté. Ce rejet n’est pas seulement dû à la répartition inéquitable des ressources qui porte gravement atteinte à la Politique agricole commune (PAC), mais aussi parce qu’il reflète une dangereuse dérive vers la renationalisation des politiques de l’UE.
La récente tentative de la présidente von der Leyen de réviser certains aspects du règlement sur le fonds unique n’offre guère de véritable solution. Elle est à la fois malavisée dans son intention et trompeuse dans sa présentation.
•⁠ ⁠Le budget européen proposé pour la période 2028-2034, en particulier ses dispositions concernant la PAC et le fonds unique, menace d’éroder la souveraineté alimentaire de l’Europe à un moment où toutes les grandes puissances mondiales investissent massivement dans la sécurité et l’approvisionnement alimentaires.
•⁠ Au lieu de renforcer la capacité de l’Europe à produire des denrées alimentaires de haute qualité, sûres et distinctives et à garantir un approvisionnement sûr pour la bioéconomie de l’UE, il est proposé une réduction de 20 % des ressources destinées à soutenir les agriculteurs, ce qui nuit directement aux citoyens européens, à leur sécurité alimentaire et à la souveraineté de l’UE.
Dans le même temps, le budget global de l’UE passe à 2 000 milliards d’euros, mais l’agriculture ne reçoit que 14 % des fonds, contre 30 à 35 % lors des deux dernières périodes de programmation.
Les propositions présentées cette semaine, destinées à répondre aux critiques du Parlement européen, de plusieurs gouvernements et de nombreux acteurs économiques et sociaux, passent complètement à côté du cœur de ces objections. En fait, elles ne font que les rendre plus évidentes.
•⁠ ⁠Le soi-disant « objectif rural » supplémentaire de 10 % prétendument alloué à l’agriculture n’est rien d’autre qu’une concession trompeuse. Ces fonds sont destinés à des plans territoriaux intégrés, encourageant la concurrence entre les secteurs, concurrence qui devrait au contraire être évitée. Il ne s’agit pas de fonds destinés à l’agriculture ou aux agriculteurs, mais à d’autres fins sans rapport avec l’activité économique agricole.
•⁠ ⁠Il est profondément préoccupant – et cela doit être clairement dit – que la Commission continue d’ignorer la question cruciale de la renationalisation des politiques européennes. Persister dans cette voie reviendrait à démanteler la PAC, l’une des plus grandes réalisations de l’Europe, qui garantit depuis des décennies aux citoyens l’accès à l’alimentation la plus sûre et la plus durable au monde, celle produite en Europe.
•⁠ ⁠L’UE risque d’être réduite à un simple distributeur de fonds, abandonnant son rôle de moteur de la politique commune. La proposition de la présidente von der Leyen révèle une intention délibérée de dé-sectorialiser et de dé-spécialiser l’action de l’UE au profit d’une logique de fonds unique et d’un cadre de performance uniforme, une approche fondamentalement inadaptée aux politiques sectorielles et aveugle aux objectifs économiques que l’UE devrait poursuivre.
•⁠ ⁠Cette déspécialisation conduirait inévitablement à une dilution des responsabilités tant de la Commission que de l’UE dans son ensemble. Même le besoin légitime d’une plus grande flexibilité dans l’utilisation des ressources est transféré aux États membres, ne laissant aucune marge de manœuvre réelle à l’Europe.
Il est donc essentiel d’apporter des corrections urgentes. Le cadre législatif de l’agriculture doit être refondu en un règlement unique et cohérent de la PAC, doté de son propre cadre de performance, et les fonds supprimés du soutien à l’agriculture doivent être rétablis. L’Europe doit réinvestir dans ses agriculteurs, et non dans des plans vagues et indéfinis. C’est seulement ainsi que nous pourrons préserver et poursuivre une réussite qui a apporté aux agriculteurs et aux citoyens européens la nourriture, la paix et la prospérité.
•⁠ ⁠Nous espérons que les positions fermes exprimées ces dernières semaines par le Parlement européen – jusqu’à présent exclu du processus décisionnel – ne s’estomperont pas face à une nouvelle réponse inadéquate de la Commission.
•⁠ Une Europe qui transfère ses problèmes aux États membres sous prétexte de « flexibilité » n’est pas une Europe saine. Ce n’est pas l’Europe que nous voulons. C’est une Europe affaiblie, qui cache son manque de vision politique et de responsabilité derrière des manœuvres bureaucratiques, au lieu de relever les défis communs avec un sens aigu de l’intérêt général.

NRPP : La Commission européenne sourde aux demandes du Parlement européen et des agriculteurs

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a laissé entendre qu’elle pourrait envisager quelques concessions minimales au cours de la journée à la présidente du Parlement européen, Mme Metsola, afin d’apaiser les critiques concernant son projet de fonds unique dévoilé le 16 juillet. Cependant, les éléments de flexibilité qu’elle propose ne répondent en aucun cas aux demandes claires exprimées par les principaux groupes politiques du Parlement européen. De plus, la Commission européenne ne propose à ce stade aucune modification formelle de sa proposition, mais suggère simplement des amendements que les députés européens pourraient eux-mêmes déposer.

En ce qui concerne l’autonomie de la politique agricole commune (PAC), le transfert de quelques articles du règlement NRPP vers le règlement d’application de la PAC est loin de résoudre le problème structurel créé par le fonds unique. La Politique agricole commune resterait dépendante des discussions menées en dehors de son cadre, et sa gouvernance serait toujours contrainte par un cadre de performance inadapté, déconnecté des réalités agricoles.

En ce qui concerne le rôle des colégislateurs, et du Parlement européen en particulier, le nouveau cadre de discussion « stratégique » proposé par la Commission ne fait qu’ajouter à la confusion générale qui règne autour de la gouvernance du fonds unique. La présidente de la Commission européenne propose que les députés européens tiennent des discussions « stratégiques » annuelles sur les enveloppes nationales déjà allouées dans le cadre des plans stratégiques nationaux. Soit cette proposition témoigne d’un mépris pour le rôle du Parlement européen, soit elle représente une nouvelle étape vers encore moins de prévisibilité pour les agriculteurs européens.

Enfin, en ce qui concerne l’aspect financier, l’« objectif rural » de 10 % proposé que les États membres devraient consacrer, en plus de l’enveloppe agricole, aux questions dites « rurales », correspond grosso modo, en moyenne dans l’UE, aux mesures exclues du champ d’application protégé de la proposition initiale, telles que les mesures de coopération, les programmes de distribution de fruits dans les écoles ou les programmes destinés aux régions ultrapériphériques. Pour des pays comme l’Irlande ou la France, cependant, le financement intégral de ces mesures exclues de la PAC par la Commission européenne ne nécessiterait pas 10 %, mais plutôt environ 25 % et 16 %, respectivement. En outre, cette suggestion ne résout en rien l’équation budgétaire pour les mesures fondamentales de la PAC, qui continuent de faire face à une réduction de 17,6 %, et ne fournit pas de capacité d’investissement supplémentaire pour les anciennes mesures de développement rural.

En résumé, la présidente de la Commission européenne continue de faire peser la charge sur les régions et les États membres pour compenser les coupes budgétaires qu’elle prévoit d’imposer à la PAC et à ses mesures, tout en maintenant un discours peu convaincant sur les ressources financières abondantes du fonds NRPP, qui est lui-même en train de diminuer de 40 %.

BACKGROUND

La Commission européenne a présenté, le 16 juillet dernier, une proposition radicale de refonte du budget de l’UE, largement inspirée de la gouvernance du fonds de relance post-COVID (RRF), qui s’articule principalement autour d’enveloppes nationales, laissant de côté la méthode communautaire. Dans le cadre d’une allocation globale demandée de 2 000 milliards d’euros, la Commission européenne propose de répartir les fonds entre quatre fonds principaux : le Fonds régional et national (intégrant la PAC, la cohésion, Frontex, le climat, Interreg, etc.) ; le Fonds pour la compétitivité ; le Fonds « Europe globale » pour les actions dans les pays tiers et l’Ukraine ; et le Fonds pour les dépenses administratives.

La Commission propose de fusionner les politiques traditionnelles de l’UE et leur financement en un seul règlement et un seul fonds. La PAC actuelle, la cohésion, le FSE+, la pêche, le fonds pour le climat et le fonds social, ainsi que le fonds de crise de l’UE seraient fusionnés en un cadre unique : le règlement « Plans de partenariat nationaux et régionaux », avec une allocation globale réduite de 865 milliards d’euros pour la période 2028-2034. Ce budget serait réparti entre les États membres, à l’exception du budget Interreg (10,5 milliards d’euros), ce qui laisserait une marge de réserve de l’UE de seulement 15 milliards d’euros. 293,7 milliards d’euros seraient réservés à la nouvelle PAC et alloués aux États membres, auxquels s’ajouteraient 6,3 milliards d’euros supplémentaires destinés aux crises agricoles. Le budget de la PAC diminuerait fortement de 17,6 % entre 2021-2027 et 2028-2034.

Compte tenu de la forte réduction du budget de la PAC proposé, la Commission laisse aux États membres le soin de compléter le budget de la PAC en puisant dans d’autres fonds provenant des enveloppes allouées à leurs plans nationaux de relance (PNR). Pour maintenir le budget de la PAC en euros courants, le Danemark, l’Irlande et l’Autriche devraient consacrer plus des trois quarts de leurs allocations PNR restantes (fonds PNR après déduction des allocations CAP, climat social et frontières). Les Pays-Bas, la France, la Finlande, la Suède et le Luxembourg devraient allouer environ 50 %, tandis que l’Italie, l’Espagne, la Belgique et l’Allemagne devraient mobiliser entre 18 % et 35 %. Or, ces fonds du PNR sont censés financer, entre autres, la future cohésion et le FSE+. Les affirmations de la Commission ne résistent pas à une analyse approfondie.

PNRP : Le Parlement européen rejette la proposition de la Commission

Farm Europe se félicite de la lettre adressée par le Parlement européen à la Présidente Ursula von der Leyen, rejetant la proposition actuelle de la Commission européenne concernant les Plans Nationaux et Régionaux de Partenariat (PNRP) comme base de négociation. La position du Parlement s’aligne sur la vision de longue date de Farm Europe selon laquelle l’Union européenne doit préserver des politiques fortes et distinctes, fondées sur des règles claires et garantissant des conditions équitables pour les agriculteurs.

Le Parlement européen a clairement indiqué que la proposition actuelle de PNRP :

  • Risque une re-nationalisation en autorisant des approches « à la carte » qui affaiblissent les priorités de l’UE, fragmentent les financements et menacent la cohésion ;
  • Ne préserve pas les rôles distincts des principales politiques de l’UE, telles que la Politique agricole commune (PAC) et la Politique de cohésion, compromettant la prévisibilité, la responsabilité et une allocation adéquate des ressources. Ces politiques nécessitent une responsabilité budgétaire claire à travers un cadre de performance autonome ;
  • Affaiblit l’implication des régions et des autorités locales, marginalisant la gouvernance à plusieurs niveaux et le principe de partenariat ;
  • Réduit les pouvoirs du Parlement européen en matière de décisions budgétaires, de flexibilité de programmation et de contrôle des fonds de l’UE ;
  • Manque de lien cohérent avec les mécanismes liés à l’État de droit et aux valeurs fondamentales de l’UE, créant ainsi un déficit démocratique dans l’allocation des ressources européennes.

Farm Europe soutient la demande du Parlement de rétablir les dispositions relatives à la PAC dans un cadre législatif dédié, garantissant des conditions équitables pour les agriculteurs et des règles claires pour les plans stratégiques. Nous saluons également l’appel en faveur de budgets distincts pour la cohésion, l’agriculture, la pêche et les politiques sociales, ainsi que la participation juridiquement contraignante du Parlement européen aux décisions d’orientation et à la répartition des flexibilités.

Farm Europe appelle la Commission à intégrer ces demandes dans une proposition révisée qui puisse servir de base à des négociations constructives avec le Parlement européen, afin de renforcer la cohésion européenne, la compétitivité agricole et la responsabilité démocratique.

L’UE franchit une étape importante vers la préservation des sols

Bruxelles, le 23 octobre 2025 – Après le Conseil le mois dernier, le Parlement européen réuni en session plénière a finalement adopté ce jeudi l’accord de compromis sur la directive relative à la surveillance des sols, marquant ainsi la fin du processus législatif. Les députés européens ont rejeté les amendements visant à rejeter la position du Conseil, avec 341 voix contre, 220 pour et 10 abstentions, clôturant ainsi la deuxième lecture au Parlement et conduisant à l’adoption de la loi. La version définitive de cette législation, convenue lors du dernier cycle de trilogues en avril 2025, impose aux États membres de surveiller et d’évaluer l’état de santé des sols sur l’ensemble de leur territoire à l’aide de descripteurs communs et d’une méthodologie européenne pour les points d’échantillonnage. Elle invite également les États membres à fixer des objectifs non contraignants, conformément à l’objectif général consistant à atteindre des sols sains d’ici 2050 et à les maintenir en bon état par la suite.

Farm Europe se félicite de l’adoption de cette directive. La santé des sols est essentielle à la durabilité et à la viabilité du secteur agricole européen, ainsi qu’à la capacité des agriculteurs de bénéficier d’outils de suivi améliorés, reposant sur des méthodologies plus robustes et harmonisées. Cette nouvelle directive oblige les pays de l’UE à aider les agriculteurs à améliorer la santé et la résilience des sols. Les mesures de soutien pourront inclure : des conseils indépendants, des activités de formation et de renforcement des capacités, la promotion de la recherche et de l’innovation, ainsi que des actions de sensibilisation sur les bénéfices liés à la résilience des sols. Les États membres devront également évaluer régulièrement le coût financier supporté par les agriculteurs et les forestiers pour améliorer la santé et la résilience des sols.

La décision des deux co-législateurs d’intégrer les microplastiques et les nanoplastiques dans la surveillance des contaminants des sols constitue également une avancée majeure, ces substances représentant une menace croissante pour la santé et la fertilité des sols agricoles, compromettant le bon développement des cultures et la production agricole européenne à long terme. Nous attendons donc avec intérêt la publication de la liste indicative des contaminants des sols, qui doit être présentée 18 mois après l’entrée en vigueur de la loi, et exhortons vivement les États membres et la Commission européenne à y inclure les microplastiques et les nanoplastiques.

Pour toute question ou réaction, n’hésitez pas à nous contacter à l’adresse : info@farm-europe.eu

2026 : des actions ambitieuses pour les agriculteurs et la bioéconomie nécessaires

Bruxelles, le 21 octobre 2025 – Comme chaque année, la Commission européenne a présenté plus tôt cette semaine son programme de travail pour l’année 2026. Ce programme, intitulé « Le moment d’indépendance de l’Europe », met en avant les initiatives politiques et législatives phares qui seront proposées dans l’année à venir.

En matière d’agriculture, la Commission a annoncé deux principales nouvelles initiatives pour les mois à venir.

Tout d’abord, la publication d’une stratégie européenne pour l’élevage est attendue au deuxième trimestre 2026. En effet, les réunions du groupe de travail sur l’élevage se poursuivent, sous la direction de la DG AGRI, la prochaine étant prévue le 23 octobre pour discuter de la compétitivité et de la durabilité. Farm Europe souligne la nécessité d’une stratégie ambitieuse s’appuyant sur un ensemble d’outils complet pour consolider les acquis, soutenir économiquement le secteur et investir de manière ciblée. L’UE a besoin d’un secteur de l’élevage fort pour relocaliser la production en Europe, optimiser pleinement les bénéfices de l’élevage et préparer l’avenir.

Deuxièmement, une mise à jour des règles sur les pratiques commerciales déloyales dans la chaîne alimentaire est prévue pour le troisième trimestre 2026, afin de mieux protéger les agriculteurs et petits producteurs européens. Cependant, nous attendons encore l’évaluation de la directive, prévue pour novembre de cette année.

Parallèlement, plusieurs propositions relatives au secteur agroalimentaire sont en cours à différents stades du processus législatif. La proposition sur le bien-être animal pendant le transport attend toujours le vote en commission, tandis que le paquet Vin est prévu pour un vote en commission le 5 novembre. Des avancées sont également observées sur les dossiers en négociation interinstitutionnelle : le Paquet de simplification de la PAC a récemment passé son premier trilogue, avec une adoption prévue d’ici la fin de l’année pour réduire les charges administratives des agriculteurs ; la proposition UTP a également achevé son premier trilogue ; et les propositions OCM (Position des agriculteurs) et Nouvelles techniques génomiques (NGT) prévoient de nouveaux trilogues à la mi-novembre. Parallèlement, un ensemble de propositions à plus long terme (MFF & Performance Framework, PAC, PNR et réforme OCM) ont toutes été publiées en juillet, marquant le début de leur parcours législatif.

Concernant le développement d’une bioéconomie européenne centrée sur les agriculteurs, une nouvelle loi sur l’économie circulaire est attendue au troisième trimestre 2026, en complément de la Stratégie bioéconomie, qui sera publiée en novembre de cette année. Ce dossier législatif constitue une opportunité importante pour le secteur agricole, notamment en promouvant l’utilisation durable des ressources, y compris l’eau, la réduction des déchets et le recyclage des sous-produits organiques. Selon la Commission, cette loi vise à favoriser la transition de l’agriculture vers un modèle plus durable et économe en ressources, tout en protégeant la sécurité alimentaire et les ressources naturelles, et en soutenant le déploiement de la Stratégie européenne pour la résilience de l’eau.

Ensuite, l’exécutif européen a décidé de diviser la prochaine loi européenne sur la biotechnologie en deux étapes. La première partie, prévue d’ici fin 2025, portera principalement sur la biotechnologie liée à la santé, incluant des mesures pour simplifier les règles sur les essais cliniques et les aspects pertinents pour les secteurs alimentaire et fourrager. Elle s’inscrira dans un package santé plus large, incluant la révision de la réglementation sur les dispositifs médicaux. La deuxième partie, attendue au troisième trimestre 2026, couvrira l’écosystème biotechnologique plus large. Cette approche en deux étapes reflète la vision de la Commission selon laquelle différents secteurs de la biotechnologie nécessitent des solutions adaptées, après de larges consultations avec les parties prenantes.

Le programme de travail 2026 de la Commission européenne prépare également le terrain pour un paquet Union de l’énergie pour la décennie à venir (T3 2026), ainsi qu’un Omnibus pour simplifier la législation sur les produits énergétiques. Le programme annonce aussi une révision prochaine du cadre sur les énergies renouvelables, qui pourrait refléter une orientation vers le concept plus large d’« énergie propre », ouvrant la voie au principe de neutralité technologique, permettant aux agriculteurs de contribuer à la décarbonation d’autres secteurs économiques, notamment les transports, via la production de biomasse utilisée pour produire bioénergie et biocarburants.

  • Concernant l’action de l’Union pour la réduction des émissions de GES et la lutte contre le changement climatique, la Commission prévoit la publication de son Paquet Climat au T3-T4 2026. Ce texte révisera les cadres de répartition des efforts sur les émissions de gaz à effet de serre non couvertes par le Système Européen d’Échange de Quotas d’Émission (ETS), ainsi que les cadres LULUCF et forestier. Ces mises à jour sont particulièrement pertinentes pour le secteur agricole, qui joue un rôle central dans la séquestration du carbone et la réduction des émissions, garantissant une contribution équitable de l’agriculture aux objectifs climatiques européens et offrant une nouvelle source de revenus pour les agriculteurs.

En complément, le cadre européen intégré pour la résilience climatique, avec des composantes législatives et non législatives prévues au T4 2026, vise à renforcer la résilience de l’Europe face aux impacts climatiques. En soutenant des stratégies d’adaptation dans l’agriculture, la gestion de l’eau et les infrastructures rurales, ce plan constitue une opportunité de protéger davantage la production alimentaire et les ressources en eau, tout en favorisant le développement de pratiques d’agriculture carbone.

À l’avenir, les négociations se poursuivront sur des propositions en attente, telles que l’amendement à la loi européenne sur le climat, visant une réduction de 90 % des émissions d’ici 2040, et la Directive Green Claims. La première initiative législative devrait reconnaître le plein potentiel du secteur agricole dans la décarbonation des autres industries, tout en limitant l’utilisation de crédits carbone internationaux, difficiles à vérifier et susceptibles de nuire aux efforts de décarbonation internes. La seconde proposition représente une opportunité de valoriser la transition des agriculteurs vers des pratiques plus durables.

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European Wine Day 2025 : L’Europe doit être fière de son vin !

L’édition 2025 de l’European Wine Day a réuni aujourd’hui plus de 100 participants au siège de la Région Grand Est à Strasbourg. Cet événement, rassemblant vignerons, décideurs politiques et acteurs du secteur venus de toute l’Europe, a été l’occasion de lancer un appel pour une Europe fièrement viticole et de construire une vision commune des politiques nécessaires au renforcement du secteur. 

Cette nouvelle édition de l’European Wine Day, organisée à Strasbourg – lieu symbolique choisi alors que le Parlement européen est réuni en session plénière – s’est tenue à un moment clé pour l’avenir de la politique agricole européenne. Porté par Farm Europe, La Coopération Agricole – Vignerons Coopérateurs, l’AREV et Iter Vitis, l’événement s’impose désormais comme une plateforme essentielle de dialogue entre professionnels, responsables politiques et société civile. Son objectif : bâtir une vision partagée pour une viticulture européenne compétitive, durable et culturellement vivante. L’événement a également marqué le lancement d’un manifeste pour une Europe fièrement viticole.

En ouvrant la conférence, Yves Madre, président de l’European Wine Day et de Farm Europe, a rappelé le contexte stratégique dans lequel se tenait cette rencontre. Il a souligné que les viticulteurs européens font face à de profondes transformations — évolution des modes de consommation, renouvellement des générations, changement climatique, et montée de discours déséquilibrés autour de la santé et de l’alcool. Il a insisté sur la nécessité pour l’Union européenne de mettre en place un cadre politique cohérent, soutenant la durabilité et la compétitivité du secteur tout en reconnaissant sa dimension culturelle et économique.

Tout au long de la journée, les intervenants et participants ont examiné les principaux défis et opportunités pour le vin européen. Les échanges ont porté sur la nécessité de concilier performance économique, environnementale et sociale, plutôt que d’opposer ces dimensions. Les débats ont également mis en avant l’importance de maintenir la confiance des consommateurs, d’assurer une concurrence équitable sur les marchés internationaux et de promouvoir une communication équilibrée sur la santé, fondée sur la science et la modération.

Franck Leroy, président de la Région Grand Est et de l’AREV, a souligné l’importance d’accueillir cette édition à Strasbourg, au cœur d’un grand territoire viticole. Il a rappelé que l’Alsace incarne le lien étroit entre viticulture, territoire et identité, et a mis en avant le rôle des régions dans la défense du patrimoine viticole européen et dans son renouveau.

Christophe Hansen, commissaire européen à l’Agriculture et à l’Alimentation, a salué l’esprit de dialogue qui caractérise l’European Wine Day et reconnu la contribution du secteur viticole à l’excellence, à l’identité et aux objectifs de durabilité de l’Europe. Il a réaffirmé l’engagement de la Commission européenne à soutenir la filière à travers l’innovation, l’adaptation climatique et le renouvellement des générations.

Les députés européens de différents groupes politiques ont contribué activement aux discussions. Herbert Dorfmann a souligné la nécessité d’une Politique Agricole Commune qui donne aux viticulteurs les moyens de rester résilients et autonomes face à la volatilité des marchés et aux défis climatiques. Céline Imart a insisté sur l’importance de renforcer la position de l’Europe sur les marchés mondiaux et d’assurer des conditions de concurrence équitables pour les producteurs. Carlo Fidanza a rappelé l’interdépendance entre viabilité économique, protection de l’environnement et durabilité sociale. Esther Herranz García a mis en avant la nécessité de préserver la compétitivité et la dimension culturelle du secteur grâce à des politiques européennes cohérentes. Dario Nardella et Carmen Crespo ont appelé à un cadre européen ambitieux et tourné vers l’avenir, reconnaissant le vin comme un secteur stratégique et un pilier de la vie rurale, tandis qu’Eric Sargiacomo a réaffirmé la nécessité pour l’UE de défendre son modèle viticole face aux défis mondiaux.

Les conclusions des ateliers de travail ont mis en avant plusieurs mesures clés pour l’avenir du secteur : reconnecter le vin aux consommateurs en adaptant l’offre, maintenir une PAC forte et commune, faire face au changement climatique par l’adaptation et la gestion des crises, et stimuler l’innovation sur l’ensemble de la chaîne de valeur.

L’événement s’est conclu sur un message fort d’unité et d’optimisme. Les participants ont appelé à un nouveau cadre politique européen capable de soutenir la croissance, de reconnaître la valeur sociale et culturelle du vin, et d’investir dans l’avenir de celles et ceux qui le produisent.

Comme l’a souligné Yves Madre en conclusion, l’European Wine Day constitue un espace de dialogue ouvert et constructif entre toutes les composantes du secteur – une plateforme pour définir ensemble la vision et l’ambition nécessaires à la renaissance de la viticulture européenne.

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Clause de sauvegarde sur le riz : un appel à la responsabilité pour défendre les riziculteurs européens

Farm Europe et Eat Europe appellent le rapporteur du Parlement européen, M. Mato, à ne pas céder aux pressions contraires et à continuer de défendre sans hésitation ni compromis les riziculteurs européens.

Le secteur du riz salue l’ouverture manifestée depuis plus d’un mois par les institutions européennes en faveur de l’activation automatique de la clause de sauvegarde — un instrument essentiel pour protéger la production européenne face aux déséquilibres du marché et à la concurrence déloyale.

Il s’agissait d’une demande portée par Farm Europe et Eat Europe dès les premières actions engagées au printemps dernier.

Cependant, nous ne pouvons accepter aucune condition contraignante ni aucun compromis édulcoré que le rapporteur pourrait être prêt à négocier. Les riziculteurs européens traversent déjà une crise profonde, aggravée par des importations massives à des prix intenables et par des normes de production inégales par rapport à celles imposées aux opérateurs de l’Union européenne.

Un progrès qui ne serait pas partagé par l’ensemble des rapporteurs du Parlement européen risquerait de porter un coup fatal à un secteur stratégique, symbole de qualité, de durabilité et de tradition agricole.

Les riziculteurs européens ne peuvent être sacrifiés sur l’autel d’autres intérêts économiques ou géopolitiques. Il est temps que les institutions européennes fassent preuve de cohérence et de courage en défendant ceux qui, chaque jour, œuvrent pour garantir la sécurité alimentaire, la protection de l’environnement et la vitalité des territoires ruraux.

Pour toute question ou réaction, n’hésitez pas à nous contacter à info@farm-europe.eu ou info@eat-europe.eu

Le Parlement européen soutient le renforcement de la position des agriculteurs dans la chaîne agroalimentaire

Farm Europe et Eat Europe se félicitent de cette avancée visant à renforcer la position des agriculteurs dans la chaîne agroalimentaire et à défendre la transparence et la protection des consommateurs, suite à l’adoption aujourd’hui par le Parlement européen du rapport de la députée Céline Imart, modifiant la réforme unique de l’Organisation Commune des Marchés (OCM).

Après l’adoption de la position du Conseil le 19 mai, le Parlement européen a adopté un rapport crucial, contenant des propositions clés pour rééquilibrer le fonctionnement de la chaîne alimentaire et mieux protéger les agriculteurs de l’UE, dans le cadre de la réforme de l’OCM.

La position de négociation du Parlement constitue une étape importante pour améliorer le fonctionnement de la chaîne alimentaire européenne et remédier à la faiblesse chronique du maillon agricole, en clarifiant les relations contractuelles, en renforçant la capacité des agriculteurs à s’organiser par la consolidation de l’offre et en reconnaissant les spécificités des coopératives grâce à des dispositions adéquates mettant en valeur leurs normes élevées de relations équitables avec leurs membres.

En votant ce rapport, le Parlement européen adopte une position forte en faveur de l’étiquetage clair, de la transparence sur l’origine et de la protection des consommateurs. À une époque où les pratiques commerciales brouillent de plus en plus la distinction entre produits animaux traditionnels et leurs imitations à base de plantes ou cultivées en laboratoire, il demande l’introduction rapide d’un cadre solide et complet pour la protection des dénominations des produits carnés, notamment pour des termes clés tels que « burger », « saucisse » et « steak », qui sont parmi les noms les plus fréquemment détournés pour commercialiser des produits d’imitation. Les mots ont de l’importance ! Un étiquetage clair et honnête n’est pas seulement une question de marketing : c’est une question de santé publique, de confiance des consommateurs et de concurrence loyale. De plus, le rapport répond à la demande de la grande majorité des consommateurs qui souhaitent connaître le pays – voire la région – d’origine de leur alimentation, entendue comme le lieu d’élevage.

Nous saluons également l’adoption de l’amendement visant à promouvoir et valoriser les produits agricoles européens, en donnant la priorité aux denrées alimentaires et produits agricoles originaires de l’Union – en particulier les produits locaux et de saison dans les marchés publics.

Les positions claires adoptées par le Parlement européen en séance plénière confirment les propositions de la députée Céline Imart. Elles permettent au rapporteur du Parlement européen d’entrer dans les négociations en trilogue depuis une position de force.

Par ailleurs, la position de négociation adoptée par le Parlement européen est importante non seulement pour apporter des réponses à court terme, mais aussi pour envoyer un signal clair avant les décisions qui devront être prises dans le cadre de la réforme de la PAC, dont le processus a été lancé avec la proposition de la Commission le 16 juillet.

Plans de partenariats régionaux et nationaux : le grand enfumage

Depuis le mois de juillet, la Commission européenne est sur la défensive, pour justifier le choix de sa Présidente, Ursula von der Leyen, de fondre, dans un seul et même fonds, le Plan de partenariats régionaux et nationaux, les politiques traditionnelles de l’Union, la PAC et la Cohésion et quelques autres (pêche, fonds social, climat, etc.). Pour se justifier, elle tente de présenter ce tremblement de terre à l’ensemble des bénéficiaires (pris séparément) de ces politiques comme une source d’opportunité sans pareille. 

Pourtant, les arguments avancés par la Commission européenne ne résistent pas longtemps à une analyse précise des propositions mises sur la table le 16 juillet, qui permettent avant tout de dire une chose et son contraire, toute orientation politique et cadre prévisible à l’échelle de l’UE étant abandonné. 

Autant de raisons, détaillées ci-dessous, qui poussent Farm Europe à considérer que la proposition de la Commission européenne peut difficilement constituer un point de départ acceptable pour les co-législateurs, et plus encore pour le Parlement européen qui perdrait, pour l’ensemble de ces politiques, sa raison d’être. 

1) Un budget protégé, ou pas. 

Selon la Commission, le NRPP serait une opportunité pour les agriculteurs, mais aussi pour les élus locaux, les pêcheurs et bien d’autres communautés grâce aux flexibilités accordées aux Etats membres dans la répartition du budget. Après le fléchage de l’enveloppe (réduite) dévolue à la prochaine PAC, il resterait au total 453 milliards d’EUR disponibles où chacun pourrait piocher. Une lecture plus honnête des chiffres montre que tel n’est pas le cas, loin de là :

  • la quasi totalité de l’enveloppe NRP est allouée en enveloppes nationales. Dès lors, il n’existe pas de réelle flexibilité européenne dans ce fonds, qui deviendrait une annexe des budgets nationaux. On peut estimer en prenant en compte les différentes allocations qu’il ne reste en réalité qu’à peine 15 milliards de marge à l’échelle européenne.
  • au sein même de l’enveloppe NRP, il est clair que l’ensemble des politiques historiques de l’Union passent par des coupes sombres. Autour de 20% pour la Politique agricole commune (17,6%), et 40% pour la politique de cohésion. Le FSE+ n’existe plus que sur le papier, sans budget. Dans ces conditions, comment croire à l’argument de la Commission que les agriculteurs pourraient récupérer les sommes au-delà de l’enveloppe de 300 milliards protégée dans une soit disant réserve disponible et non allouée. 

Un calcul basé sur l’ensemble des allocations nationales proposées par la Commission montre que ceci est une pure illusion d’optique. L’Irlande devrait aller chercher plus de 75% des fonds du NRP au-delà de l’enveloppe protégée pour la PAC, pour maintenir cette dernière à son niveau de 2027, la France, 48%, l’Espagne 21%, l’Italie 18,5%. Il est clair que cette équation impossible, laissant aux Etats membres les choix difficiles n’aurait d’autre effet que de semer la zizanie et créer un climat délétère dans les négociations nationales, avec, au final, aucun gagnant en perspective. En tout état de cause, ce cadre n’offre aucune prévisibilité ni stabilité aux agriculteurs, alors même qu’il s’agit d’une politique économique avec des impacts forts sur la structure des marchés. 

2) Un cadre plus simple, ou pas. 

La Commission européenne juge que cette nouvelle programmation aurait la vertu de la simplification grâce aux flexibilités accordées aux Etats membres. Ceci est sans compter sur l’expérience accumulée au fil des années dans la mise en oeuvre de l’actuelle PAC. 

En réalité, le pas supplémentaire dans la renationalisation proposée par la Commission européenne présente un double effet : 

  • D’une part la technocratisation des politiques qui deviennent des programmes gérés de façon opaque entre administrations nationales et la Commission européenne, mettant sur la touche les responsables politiques, dont le Parlement européen. 
  • D’autre part, il constitue l’organisation systématique de l’irresponsabilité politique. Aucune règle claire n’étant fixée par la loi, les fonctionnaires nationaux ont beau jeu de renvoyer la responsabilité sur «Bruxelles» pour justifier leurs orientations, y compris à leur responsable politique de tutelle, la Commission renvoyant sur les administrations nationales de la même manière. 

Dès lors, il n’y a aucune simplification dans la création d’un flou permanent et dans la suppression de la responsabilité politique. Les administrations respectives nationales ou européenne ont démontré, par le passé leur créativité et ténacité pour mettre de la complexité dans les schémas les plus simples, d’autant plus que le mode de pilotage par des indicateurs de performance leur permet de justifier des choix parfois arbitraires ou le fruits d’équilibres complexes entre les différentes sensibilités au sein des multiples ministères consultés. 

En ce qui concerne la PAC, on peut s’interroger sur la pertinence des recommandations que pourrait formuler la Commission européenne, alors même qu’elle s’apprête à réduire encore un peu plus le niveau d’expertise de ses services agricoles par des réductions d’effectifs drastiques. 

3) Un cadre plus vert, ou pas. 

La Commission a choisi de mettre en avant le principe « do not harm » pour offrir une touche verte en tête de son règlement et rallier la communauté environnementaliste. Dans le même temps, elle annonce la suppression de la conditionnalité pour rallier la communauté agricole. 

Tout d’abord, il est regrettable de résumer les objectifs environnement et climat à une opposition stérile, qui ne correspond pas à la réalité des enjeux auxquels sont confrontés les agriculteurs. 

Ensuite, il est tout simplement faux de dire que le nouveau cadre serait moins vert, ou plus vert, plus simple ou plus compliqué. En la matière, aucune réponse n’est réellement apportée par les règlements, la seule certitude est la mise en place d’une machine infernale à distorsions de concurrence entre et au sein des Etats membres, et l’exposition du secteur agricole aux aléas de l’évolution des sensibilités au sein des administrations nationales. 

Le système de « Farm Stewartship» laisse la porte ouverte à une divergence forte de l’ambition de base des politiques environnementales agricoles au sein du marché intérieur, élément d’autant plus préoccupant qu’il est le fondement sur lequel s’appuieraient les autres programmes environnementaux. 

D’ores et déjà, à tout le moins à court terme, il est clair qu’il est plus confortable d’être un agriculteur hongrois qu’allemand. Et sans aucun doute pour les pays fortement décentraliser des distorsions apparaîtraient au sein même d’un Etat membre comme cela est déjà apparu en Belgique à travers le débat sur les mesures de lutte contre l’érosion. 

Ni les agriculteurs, ni l’environnement n’ont à gagner d’un tel abandon de toute ambition communautaire. 

4) Les agriculteurs écoutés, ou pas. 

Enfin, et sans doute point politiquement le plus délétère pour la stabilité du projet européen, la réforme mise sur la table serait le fruit de larges consultations, la Présidente de la Commission européenne ayant pris le soin de lancer un dialogue stratégique, puis une nouvelle enceinte de consultation, l’EBAF, avant de rédiger une vision stratégique pour l’agriculture. 

En fin de compte, il apparaît clairement qu’aucun des éléments de la vision ne se retrouve incarné concrètement par des choix ou orientations politiques inscrits dans les propositions budgétaires et agricoles mises sur la table par la Commission européenne. Les agriculteurs qui ont participé à ces consultations aurait bien des raisons d’avoir le sentiment d’avoir été instrumentalisés, tout comme, d’ailleurs, les ONGs ayant pris part à ces échanges. 

Ce processus a été utilisé comme prétexte par la Commission européenne pour justifier une absence quasi-totale de consultation avec les représentants élus — le Parlement européen. L’aboutissement de ce processus de faux-semblants est l’organisation, par la présidence danoise, de la négociation du NRPP ne laissant quasiment plus de place aux institutions à proprement parler agricoles pour traiter des sujets qui leur sont propres. 

Avec le NRPP, les politiques deviennent des programmes, et les décisionnaires quasi exclusifs – les ministères des finances- ne laissant de prise aux responsables politiques que sur les éléments secondaires, réduits au maximum, de ces programmes une fois que tous les axes et options politiques auraient été définies dans les enceintes fermées de négociation du NRPP. 

Une Commission soit-disant politque mettrait ainsi fin au politique pour s’en remettre aux administrations.