Fertilisants : une stratégie responsable proposée en un temps record par la Commission

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La Commission européenne a présenté le 9 novembre dernier sa proposition de stratégie européenne en faveur des fertilisants. 

Préparée dans un délai record par ses services agricoles, elle aborde les deux facettes du sujet – la disponibilité et le prix – et pointe avec justesse les sujets les plus importants. 

Elle affirme qu’en cas de restrictions d’utilisation du gaz, le gaz pour la production d’engrais doit être considéré comme prioritaire. Certes, la Commission n’a pas à ce stade le pouvoir d’imposer des priorités ou des réductions aux États membres. Cela pourrait se produire à l’avenir par le biais d’un nouveau règlement sur la crise énergétique. Toutefois, en proposant d’ores et déjà une telle ligne de conduite forte, la position de la Commission est une aide précieuse pour le secteur, et envoie un rappel salutaire sur l’importance stratégique du secteur agricole et de la nécessaire souveraineté à défendre pour ces chaines de valeur. 

Avec son document, la Commission ouvre aussi la possibilité pour les États membres d’utiliser de l’argent non utilisé du fonds de relance, ou de mettre des financements nationaux (aides d’état) pour soutenir les agriculteurs et les producteurs d’engrais.  Ces financements pourraient viser non seulement la production de fertilisants et son utilisation, mais aussi aider les agriculteurs à investir dans de nouvelles technologies et itinéraires techniques pour réduire l’utilisation des intrants. Dans ce cadre, il fait référence à l’intérêt de travailler sur les rotations, d’y associer des légumineuses et d’investir dans l’agriculture de précision. 

La Commission fait aussi le constat du risque qu’induirait une réduction rapide et généralisée de l’utilisation des engrais, impliquant immédiatement une réduction des rendements. Ce constat, vrai, est intéressant et devrait inciter les dirigeants de la Commission européenne  à remettre en perspective leurs propositions de réduction de 20% des engrais dans le cadre de la stratégie Farm to Fork. 

La réduction des achats d’engrais par les agriculteurs cet été (-20 %) risque d’avoir, déjà, un impact négatif sur la récolte 2023. La question est posée de savoir si les sols européens ont de suffisamment bons niveaux de N P K pour supporter une fertilisation plus faible sans effet sur la récolte au moins pour une campagne. On en peut douter, la fertilisation a un coûttelle que l’usage le plus économe était recherché, même avant la crise ukrainienne. Une réduction hors du cadre des investissements tels qu’évoqués ci-avant risque de se solder par une baisse du potentiel de production.