IED : un besoin de cohérence et de travail collectif

Les institutions européennes sont parvenues, hier, à un accord provisoire sur la révision de la directive sur les émissions industrielles (IED), après des débats très tendus sur l’inclusion ou non de certains secteurs agricoles dans le champ d’application de cette réglementation.
Finalement, grâce à la détermination du rapporteur du Parlement européen, les colégislateurs ont décidé de ne pas inclure le secteur de l’élevage des ruminants, une décision saluée par Farm Europe.
Ils ont également décidé de renforcer les seuils pour les secteurs déjà couverts par ce règlement. Les producteurs de porcs et de volailles seront affectés par ce nouveau règlement.
Cependant, tous les secteurs de l’élevage sont concernés par deux dispositions importantes — et à saluer — obtenues par le Parlement européen en vue de la révision de 2028 :

  • Tout d’abord, il est demandé à la Commission européenne « d’évaluer, et de faire rapport au Parlement européen et au Conseil sur la nécessité d’une action de l’Union pour traiter de manière globale les émissions provenant de l’élevage, en particulier des bovins, en tenant compte de la gamme d’instruments disponibles et des spécificités du secteur », d’ici à décembre 2026. Il s’agit là d’une reconnaissance du fait que les spécificités de l’agriculture devraient être couvertes par un règlement adéquat, et non par la directive IED. En d’autres termes, cette disposition ouvre la voie à l’exclusion potentielle de tous les secteurs de l’élevage. L’agriculture devrait sortir du champ d’application de ce règlement et être couverte par un cadre spécifique. Dès lors que les agriculteurs travaillent avec la nature et des animaux vivants, ils ne devraient en aucun cas être assimilés à des activités industrielles. Un cadre adapté devrait donc être mis en place pour saisir la complexité de l’agriculture en ce qui concerne son empreinte environnementale, mais aussi mieux appréhender ses co-bénéfices.
  • Deuxièmement, « la Commission devrait évaluer et faire rapport au Parlement européen et au Conseil de la nécessité d’une action de l’Union pour traiter de manière globale les émissions provenant de l’élevage, en particulier du bétail, en tenant compte de la gamme d’instruments disponibles et des spécificités du secteur ». Cette disposition couvre toutes les activités d’élevage et invite la Commission à mettre en place des conditions de concurrence équitables pour tous les produits mis sur le marché de l’UE, qu’ils soient fabriqués en Europe ou importés. À l’heure où l’Union européenne multiplie les efforts pour favoriser les échanges, les producteurs ne comprendraient pas, à juste titre, d’être confrontés à la concurrence déloyale de viandes importées dont l’empreinte environnementale est plus élevée. De facto, l’Europe se tirerait une balle dans le pied en augmentant la charge qui pèse sur ses producteurs, tout en ouvrant largement son marché.
    Par conséquent, si le compromis atteint par le trilogue n’est certainement pas parfait pour tous les producteurs, il contient des dispositions qui ouvrent la voie à une approche améliorée et plus cohérente. Elle appelle à un travail collectif de tous les éleveurs, en amont des clauses de révision.

IED : AU-DELÀ DE LA POLITIQUE, DE BONNES RAISONS DE NE PAS INCLURE L’ELEVAGE RUMINANT

Les négociations finales sur la directive relative aux émissions industrielles aborderont des questions majeures pour l’avenir de l’élevage européen. Il y a de bonnes raisons de ne pas commettre l’erreur d’inclure l’élevage dans le champ d’application de ce règlement.

Nous considérons que l’inclusion de l’élevage ruminant dans le champ d’application de la directive sur les émissions industrielles aboutirait même exactement à l’inverse de ce qui est visé, en encourageant la tendance de ce secteur à l’intensification, alors que les décideurs visent à promouvoir l’élevage extensif en raison de ses multiples co-bénéfices, notamment pour le stockage du carbone, les caractéristiques du paysage et la biodiversité.

C’est pourquoi nous soutenons pleinement l’approche du Parlement européen sur ce dossier et considérons que les États membres de l’UE devraient suivre cette voie, en excluant l’élevage ruminant du champ d’application de ce règlement et en abordant le défi des émissions dans d’autres cadres réglementaires spécifiques, afin de mieux appréhender la complexité et la nécessité d’approches holistiques de ce secteur.

Traiter de la durabilité de ce type d’élevage uniquement sous l’angle des émissions offrirait une prime aux modèles les plus intensifs, en position d’optimiser au maximum la gestion de leurs émissions, et de passer à côté de toutes les aménités positives associées à l’élevage à base d’herbe.

La directive sur les émissions industrielles prévoit le développement des meilleures techniques agricoles disponibles (MTD) pour tenir compte de chaque type d’élevage. Les ministres de l’environnement envisagent une dérogation pour l’élevage extensif, afin d’exclure les exploitations ayant moins de 2 bovins par hectare. En soi, ces idées démontrent la spécificité du secteur, et sa complexité. Mais dans certains cas, si ces dérogations sont une réponse à la charge administrative liée à IED, elles ne résolvent pas le problème le plus fondamental : l’évolution future du marché, qui donnera l’orientation de l’élevage à l’avenir.

Si, à l’avenir, certains élevages peuvent être parés de vertus sur la seule base des émissions, c’est sur ce seul paramètre que les grands acheteurs, notamment ceux qui sont cotés en bourse, feront leurs choix d’achat pour se conformer aux paramètres ESG valorisés par les marchés financiers. Pour eux, la priorité sera donnée à la réduction des émissions de l’amont agricole, au détriment de tous les autres co-bénéfices, y compris le bien-être animal, la biodiversité et le développement régional équilibré.

Ainsi, plutôt que de réglementer l’élevage par une approche simpliste, il convient de développer une trajectoire ad hoc de réduction des émissions dans un cadre plus large qui tienne compte de la capacité de stockage des prairies et de tous les autres paramètres propres à ce type d’élevage, y compris la biodiversité, l’impact sur le paysage et la contribution au développement économique des zones reculées.

En d’autres termes, il faut reconnaître la réalité : l’élevage de ruminants n’est pas une activité industrielle en Europe. Il n’a pas sa place dans une directive sur les émissions industrielles.

NGTs: LES ONGs ET LES DÉTAILLANTS RÉAGISSENT À LA PROPOSITION

Les propositions de la rapporteur PPE en COMENVI du parlement européen suscitent l’opposition des partis de gauche en ce qui concerne l’autorisation d’utilisation des NGTs de catégorie 1 en agriculture biologique tout particulièrement.

Parallèlement au parlement européen qui a accéléré le rythme de ses travaux, le Conseil des ministres de l’agriculture discute à nouveau le 20 novembre de ce dossier en vue d’adopter une approche générale du conseil (position de négociation du conseil avec le parlement européen).

En Allemagne, les grands groupes de distributeurs divergent sur le dossier des NGTs et le besoin d’étiquetage ou non.

Des chercheurs d’Afrique et d’Amérique latine finalisent la mise au point des pommes de terre résistantes au mildiou.

Loi sur la restauration de la nature: les terres agricoles inclues

Quatre mois après le vote en plénière, le Trilogue du 9 novembre marque la fin des négociations sur le règlement Restauration de la nature. Un accord des trois institutions a été trouvé même s’il devra maintenant passer par l’examen final du Conseil et du Parlement.

En attendant le texte final de l’accord et l’analyse des détails, parfois cruciaux, on peut déjà constater que sur la partie agricole, l’accord est plus proche de la proposition de la Commission et de la position du Conseil que de celle du Parlement, qui avait demandé la suppression de l’article 9, c’est-à-dire l’exclusion complète des terres agricoles du règlement.

Au lieu de cela, l’accord rétablit l’article 9 et conserve sa structure, mais passe d’une approche fondée sur les résultats à une approche fondée sur l’effort. En outre, les États membres peuvent choisir deux des trois indicateurs proposés (indice des papillons ; stock de carbone; part des terres agricoles présentant des caractéristiques topographiques à haute diversité). 

La référence à l’objectif de 10 % d’éléments paysagers à forte diversité est supprimée.

En ce qui concerne les tourbières, les objectifs de restauration issus de l’approche générale du Conseil sont maintenus, mais les objectifs de ré-humidification pour 2040 et 2050 sont réduits à un tiers. 

Concernant la restauration des écosystèmes forestiers, les indicateurs relatifs au bois mort sur pied et au bois mort au sol ont été récupérés, et au moins l’un des deux devrait être obligatoire. La nécessité pour les États membres de prendre en compte le risque d’incendies de forêt est incluse.

Probablement pour prendre en considération le débat sur la sécurité alimentaire qui a animé les protestations contre ce règlement, le renforcement de la sécurité alimentaire a été incluse comme objectif dans l’article 1 du règlement. 

En outre, en ce qui concerne le financement, il est précisé que la mise en œuvre de ce règlement n’implique pas la reprogrammation de la politique agricole commune, de la politique commune de la pêche ou d’autres programmes et instruments de financement de l’agriculture et de la pêche dans le cadre du CFP actuel. En outre, la Commission européenne est invitée à présenter un rapport sur les ressources financières disponibles dans l’UE pour mettre en œuvre ce règlement et les besoins de financement actuels afin d’identifier tout déficit de financement et de présenter les propositions nécessaires, y compris la mise en place d’un financement spécifique. 

Le Parlement obtient également l’une de ses demandes, à savoir l’obligation de planter, d’ici 2030, 3 milliards d’arbres en suivant des principes écologiques. 

Il s’agit donc d’un accord qui respecte le cadre souhaité par la Commission, avec ses objectifs et ses obligations pour les États membres qui devront porter le fardeau de cette réglementation. Cependant, le PE a obtenu quelques ajustements et flexibilités sur l’agriculture afin que ce règlement ne soit pas en totale contradiction avec le défi de la sécurité alimentaire, comme le prévoyait la proposition de la Commission.

NGTs : L’ALLEMAGNE VA ALLOUER DES FONDS À LA R&D

Le ministère allemand de la recherche vient de décider d’investir 50 million d’euros dans la R&D sur les NGT, alors que des associations bio continent de s’opposer à la proposition de la commission.

Convaincus de l’intérêt des NGTs, les rapporteurs du PE et la présidence du conseil accelerant les négociations afin de définir leur positions de négociation au plus vite et commencer début 2024 les trilogues.

Hors de l’UE, le Royaume-Uni, la Chine et les États-Unis progressent dans les technologies CRISPR et visent à modifier les genomes des porcs et les poulets pour les rendre résistants à différents virus.