Loi pour la restauration de la nature : une judiciarisation accrue

Alors que le vote de la loi sur la restauration de la nature en commission de l’environnement du Parlement européen a pris une tournure dramatique et s’est déroulé dans un contexte de campagne sans précédent, il convient de porter un regard apaisé sur ce texte pour dépasser les postures simplistes pro ou anti-nature qui se sont affirmées dans le débat de ces derniers jours, et en comprendre les enjeux. Cette loi n’est pas la seule initiative visant à protéger la biodiversité. 

La proposition de règlement sur la restauration de la nature a été publiée par la Commission européenne le 22 juin 2022, en même temps que le règlement sur l’utilisation durable des pesticides. 

Ce règlement vise à inscrire dans la loi les objectifs de restauration des écosystèmes naturels et de la biodiversité en imposant aux États membres d’élaborer des plans nationaux. Il crée une obligation de résultat, avec l’introduction d’un risque juridique, y compris à travers un accès facilité à la justice pour tout citoyen ayant un intérêt suffisant en la matière, dans l’esprit des initiatives citoyennes telles que l’Affaire du siècle et la condamnation de certains États pour inaction climatique. 

Cette judiciarisation de la protection de l’environnement est la principale innovation du texte, qui vise à faire peser un risque juridique sur les États membres en cas de non-respect des trajectoires de progrès. Elle s’ajoute aux nombreuses directives et règlements élaborés, et parfois adoptés, ces derniers mois dans le cadre du Green Deal pour protéger l’environnement, lutter contre le changement climatique et protéger la biodiversité

Le règlement couvre tous les écosystèmes, y compris les terres agricoles. L’article 9, intitulé « restauration des écosystèmes agricoles », vise à accroître la biodiversité sur les terres agricoles. Pour ce faire, la Commission européenne propose que les États membres parviennent à une tendance à la hausse au niveau national pour chacun des indicateurs suivants dans les écosystèmes agricoles d’ici à 2030 :

– indice des papillons des prairies ; 

– stock de carbone organique dans les sols minéraux cultivés ;

– part des terres agricoles présentant des caractéristiques topographiques à forte diversité et intérêt écologique.

Ces trois indicateurs sont décrits à l’annexe IV, qui précise que « les terres agricoles présentant des caractéristiques topographiques à haute diversité sont des végétations naturelles ou semi-naturelles permanentes présentes dans un contexte agricole qui fournissent des services écosystémiques et soutiennent la biodiversité » et qu’elles doivent remplir les conditions suivantes : ne pas être utilisées pour la production agricole (y compris le pâturage ou la production de fourrage), et ne pas être traitées avec des engrais ou des pesticides. 

Il est également expressément demandé aux États membres de rétablir la population d’oiseaux des champs d’ici à 2030, sur la base d’une liste d’espèces détaillée dans le règlement, et de rétablir 70 % des tourbières en tant que zones humides d’ici à 2050. 

Le point relatif aux « zones agricoles présentant des caractéristiques paysagères à haute diversité » est sans doute l’un des plus sensibles et celui qui a suscité les réactions de nombreux députés. Il s’agit de mesures à appliquer au niveau des Etats membres, qui seront responsables de leur application dans les exploitations agricoles. 

Dans sa proposition, la Commission définit l’objectif de 10% comme un objectif de l’Union européenne, sans préciser comment il sera appliqué par chaque Etat membre. Celle-ci est laissée à la discrétion de la Commission européenne qui, en vertu de l’article 14, est tenue de veiller à ce que les 10 % de la surface agricole présentant des caractéristiques paysagères à haute diversité soient atteints. Cela conduirait très probablement la Commission européenne à demander aux États membres de retirer des terres agricoles de la production, lors de l’approbation des plans nationaux, afin d’atteindre cet objectif et, dans le cas contraire, un risque juridique accru pèserait naturellement sur les États membres.

En outre, cette proposition crée un chevauchement et une divergence avec les exigences, adoptées très récemment, de la conditionnalité de la PAC qui définissent les règles (différentes de celles proposées dans ce projet de restauration de la nature) à respecter par les agriculteurs en ce qui concerne les zones écologiques ciblées et les caractéristiques du paysage. 

Le projet de texte présenté par la Commission doit également être analysé à la lumière des dispositions de la proposition de règlement sur l’utilisation durable des pesticides, qui appelle à une réduction de leur utilisation au niveau national et à une interdiction de l’utilisation des pesticides chimiques dans les zones définies comme sensibles couvrant 70 à 90 % des terres agricoles de certains pays. 

Enfin, de larges pouvoirs délégués seraient accordés à la Commission européenne pour définir les grandes lignes des futurs plans nationaux, les conditions de leur approbation, ainsi que pour modifier les annexes du règlement.

LEGUMINOSE: les cultures intercalaires pour une agriculture durable

Vous souhaitez en savoir plus sur la transition verte, sur les systèmes de culture intercalaire innovants et sur les avantages qu’ils peuvent apporter au système agricole dans son ensemble ?

Dans ce cas, vous pouvez jeter un coup d’œil au projet de recherche LEGUMINOSE H20, qui se concentrera sur l’identification des obstacles à la culture intercalaire et sur la sensibilisation des acteurs intéressés tels que les agriculteurs, les parties prenantes, etc. en fournissant des informations et des démonstrations pratiques sur les avantages économiques, environnementaux et sociaux de la culture intercalaire de légumineuses et de céréales.

Grâce à une équipe diversifiée, le projet LEGUMINOSE vise à garantir des perspectives larges et variées. Sur la base de l’analyse politique et des ateliers, Farm Europe contribuera à l’équipe en fournissant un ensemble de recommandations politiques visant à étendre les pratiques de culture intercalaire à travers l’UE.

Suivez leur site web pour rester informé >> https://www.leguminose.eu

VIN – VEILLE PERIODIQUE

Ces dernières semaines, le monde du vin a notamment été marqué par :

– Le vote de la révision des systèmes d’Indications Géographiques au Parlement européen, qui visait à préserver les IGP. La protection intellectuelle des vins en ressort renforcée.

– La problématique des stocks dans les principaux pays producteurs, face à la baisse de consommation et à l’arrivée prochaine des vendanges de l’année. La Commission européenne a finalement adopté un acte délégué pour permettre la distillation des vins rouges et rosés.

– La plainte déposés par des représentants viticoles devant la Commission contre l’Irlande et sa nouvelle réglementation d’étiquetage sanitaire des boissons alcoolisés. Les doutes face à cette législation sont partagés par de nombreux États-membres, ainsi que par des pays tiers au sein de l’OMC, au premier rang desquels les États Unis.

Note complète disponible sur l’espace Membres de Farm Europe. 

FARM TO FORK – VEILLE PERIODIQUE

En mai 2023, le Parti populaire européen a pris la tête d’un mouvement au sein du Parlement européen afin de rejeter la proposition de règlement sur la restauration de la nature, en invoquant des préoccupations relatives à la sécurité alimentaire et à la viabilité économique. Il a réussi à obtenir le rejet de la proposition de règlement au sein de la COMAGRI et de la COMPECH. Parallèlement, le Parlement européen a publié un rapport soulignant la nécessité d’une action collective pour garantir la sécurité alimentaire et relever les défis mondiaux dans le secteur agroalimentaire. Enfin, Frans Timmermans, vice-président exécutif de la Commission, a défendu au sein de la COMAGRI la proposition de loi sur la restauration de la nature, en soulignant ses avantages pour les agriculteurs et l’importance de s’attaquer à la crise du climat et de la biodiversité, sans convaincre la plupart des eurodéputés de la COMAGRI.

L’Espagne a demandé à la Commission de l’UE de l’aider à faire face à une grave sécheresse qui affecte le secteur agricole du pays. Par ailleurs, divers acteurs de la chaîne alimentaire ont appelé à l’élaboration d’une nouvelle législation-cadre de l’UE sur les systèmes alimentaires durables.

L’Autorité européenne de sécurité des aliments a publié des recommandations sur le bien-être des animaux, et le Conseil « Affaires économiques et financières » a donné son approbation finale à un règlement sur le commerce des produits de base associés à la déforestation.

Note complète disponible sur l’espace Membres de Farm Europe. 

Produits cellulaires : le règlement Novel Food inadapté

Avant toute avancée au niveau européen sur les produits alimentaires cellulaires, un travail sérieux devrait être lancé pour identifier tous les risques potentiels qui sont loin d’être clairs. A minima, les risques sont clairement plus proches du monde pharmaceutique que des produits alimentaires. L’évaluation par les autorités publiques ne devrait dès lors pas se limiter au produit final, mais doit couvrir l’ensemble du processus de fabrication, ce qui rend le règlement sur les nouveaux aliments absolument inadapté.

Le projet de rapport d’initiative de l’eurodéputée Emma Wiesner (Renew Europe) a surpris la plupart de ses collègues au Parlement européen, plaçant le sujet des aliments cellulaires en tête de sa liste de souhaits pour relever le défi de l’autonomie de l’Union européenne en matière de protéines, à côté d’éléments plus positifs comme les synergies entre la production de protéines et de bioénergie, qu’il convient de souligner.

L’élue suédoise estime, en particulier, que « l’agriculture cellulaire et les produits de la mer sont des solutions prometteuses et innovantes », suggère que « les aliments innovants à base de cellules peuvent contribuer à accroître la production de protéines et constituer un complément à l’agriculture ». Dès lors, pour l’eurodéputée, le processus de mise en marché « devrait être fondé uniquement sur la sécurité du produit » dans le cadre de la règlementation Novel Food qui devrait, elle-même, être simplifiée pour accélérer les processus d’autorisation et ainsi encourager l’innovation. 

Dans ce contexte, les élus européens vont devoir se forger rapidement une opinion sur un sujet complexe qui touche à une multitude de dimensions éthiques, environnementales, technologiques, économiques et bien entendu aussi sanitaires. Ils devront se positionner alors même que les processus de culture cellulaire en sont encore à leurs balbutiements, en phase de consolidation pour passer du cap du laboratoire, et d’une éventuelle mise à l’échelle industrielle, sans aucune garantie à ce stade sur leur capacité à franchir cette étape de façon sûre et sans risques pour les consommateurs. Il est donc essentiel de mobiliser la réflexion pour apporter des éléments rationnels à un débat qui mène réellement l’alimentation en territoires totalement inconnus jusqu’alors, et incertains.

De quoi parle-t-on ? 

Il existe un grand nombre de procédés et variantes pour la culture cellulaire. La plupart d’entre eux sont des processus de production en laboratoire d’aliments et d’autres produits d’origine animale. À partir d’un échantillon de cellules animales prélevées sur des muscles ou des embryons d’animaux vivants et placées dans un milieu riche en nutriments, le tissu cellulaire est cultivé dans des conditions contrôlées dans des bioréacteurs pour se transformer en cellules musculaires, graisseuses ou d’autres tissus afin de former des conglomérats de cellules animales et d’autres produits animaux (comme le cuir, la gélatine, le collagène) (Warner, 2019). 

Le milieu, dans lequel les cellules sont cultivées, est synthétisé à partir de sérum fœtal bovin. Actuellement certaines entreprises tentent de développer des options de sérum sans animaux pour des raisons de coûts et d’éthique. Les cellules sont ensuite récoltées puis agrégées ou transformées pour donner sa formulation finale au produit. 

Après avoir vu ces produits comme une réponse potentielle au défi climatique, il y a une dizaine d’années, les dernières études scientifiques se montrent beaucoup plus prudentes quant à de quelconques avantages. Les sources de pollution sont multiples et la quantité d’énergie nécessaire très importante. Le plus souvent l’élevage nécessite, certes, davantage de surface, mais moins d’énergie ou de plastiques, notamment, sans parler des hormones ou des antibiotiques. Les analyses d’impact comparatives initialement réalisées par le secteur de la viande cellulaire ne prennent pour la plupart pas en compte de façon sérieuse d’une part les co-produits ou les co-bénéfices associés à l’élevage ni d’autre part les enjeux associés à un éventuel passage à la phase industrielle des produits cellulaires, et toutes les conséquences associées à une « massification ». 

Où en est leur développement 

Encore aujourd’hui, ceci semble être de la science-fiction pour la plupart des consommateurs. Mais, depuis la présentation du premier burger de synthèse en août 2013 aux téléspectateurs de la BBC, la culture cellulaire est devenue une réalité à la fois en termes de mise au point de produits bien réels, et d’écosystème économique influant. En décembre 2020, Singapour a été le premier pays à autoriser la mise sur le marché d’imitation synthétique de viande de poulet. Une première étape a aussi été franchie, aux Etats-Unis quand la Food and Drug Administration a bouclé sa consultation préalable à la mise sur le marché en novembre 2022. 

Néanmoins le passage du stade laboratoire à des lignes de développement à grande échelle n’est pas chose faite, loin de là, et le contrôle de la variabilité des cellules dans des atmosphères non « naturelles » est loin d’être assuré. Le développement de milieux de croissance – le plus souvent aujourd’hui du sérum fœtal – qui représente un coût important, reste en suspens tout comme de nombreuses questions éthiques. Les coûts énergétiques liés à ces processus de culture demeurent, quant à eux, extrêmement importants. 

Cependant, des initiatives multiples sont en cours qui visent à fabriquer des imitations non seulement des produits tels que la viande ou le lait, mais aussi du lait maternel, du blanc d’œuf, du foie gras, des huiles, du cuir, de la gélatine et du collagène, du caviar, des produits de la mer ou encore du chocolat et du café. 

Quel processus législatif d’autorisation doit s’appliquer dans l’Union européenne ? 

A l’heure actuelle, sur le papier, les produits cellulaires pourraient relever soit du règlement « Novel Food » (EU/2015/2283), qui mentionne spécifiquement la culture cellulaire, soit du règlement sur les denrées alimentaires et les aliments pour animaux génétiquement modifiés n°1829/2003. Le droit de l’UE définit un nouvel aliment comme « toute denrée alimentaire qui n’était pas utilisée de manière significative pour la consommation humaine dans l’Union avant le 15 mai 1997 », date à laquelle le règlement sur les nouveaux aliments est entré en vigueur. Le règlement précise en outre que les nouveaux aliments peuvent être des aliments nouvellement développés, des aliments innovants, des aliments produits à l’aide de nouvelles technologies et de nouveaux procédés de production, ainsi que des aliments qui sont ou ont été traditionnellement consommés en dehors de l’UE. 

Le processus Novel Food prend généralement entre 18 et 24 mois, mais peut durer davantage comme dans le cas des graines de Chia pour lesquelles la demande déposée par les autorités britanniques auprès de la Commission en 2004 avait abouti en 2009. L’autorité européenne pour la sécurité sanitaire y joue un rôle prépondérant. 

Si, lors d’un évènement au Parlement européen le 13 juillet 2022, un représentant de la Commission européenne avait indiqué que les produits cellulaires devaient suivre la règlementation Novel Food, cette opinion est loin de faire l’unanimité, en raison de la multitude de questions soulevées par ces produits disruptifs. Certains experts estiment au contraire que la règlementation sur les OGM est plus adaptée dès lors que, la plupart du temps, le processus de fabrication implique des organismes génétiquement modifiés. Par ailleurs, compte tenu de leur proximité avec les produits pharmaceutiques, pourrait se poser la question d’études pré-cliniques et cliniques à mener en amont de toute mise sur le marché, à l’image des nouveaux médicaments. Et ce, d’autant plus que les risques eux-mêmes ne sont pas à ce stade entièrement identifiés de l’aveux même de scientifiques ayant travaillé sur le dossier, et que les technologies employées s’apparentent davantage au domaine pharmaceutique qu’alimentaire. 

Vers un cadre spécifique encore à bâtir 

« Si de nombreux risques sont déjà bien connus et existent tout aussi bien dans les aliments produits de manière conventionnelle, il peut être nécessaire de se concentrer sur les matériaux, les intrants, les ingrédients (y compris les allergènes potentiels) et les équipements spécifiques à la production d’aliments à base de cellules », relèvent l’OMS et la FAO dans sa première analyse à grande échelle des enjeux liés aux produits cellulaires rendue publique le 5 avril dernier. Ce travail fait ressortir des risques spécifiques à prendre en compte qui rapproche davantage les produits cellulaires des biotechnologies, du clonage ou encore des thérapies géniques dans le champ de la santé humaine. C’est en particulier le cas des nouvelles toxines ou allergènes, utilisées au stade de la production des cellules, et de celui de la stabilité, structurelle ou chimique, du matériel génétique utilisé, risque associé à l’ensemble des biotechnologiques utilisées dans le champ alimentaire. 

«  Il existe actuellement une quantité limitée d’informations et de données sur les aspects de la sécurité alimentaire des aliments d’origine cellulaire pour aider les régulateurs à prendre des décisions éclairées », soulignent la FAO et l’OMS, dont les analyses se limitent aux enjeux sanitaires pour lesquelles elles appellent à davantage de la coopération internationale et à la transparence. Sans compter que ces agences internationales ne se penchent pas sur les questions éthiques, économiques ou commerciales soulevées par ces nouveaux produits tels que la question du brevetage du vivant qui restent un sujet particulièrement sensible dans le domaine stratégique de l’alimentation. 

Il en ressort clairement que l’ensemble des risques tant liés à la sécurité sanitaire des produits finaux, qu’à la stabilité des procédés de production eux-mêmes, amène les scientifiques impliqués dans l’évaluation en territoires inconnus. 

Il conviendrait donc, avant de conclure sur la nécessité d’accélérer le pas, comme le suggère le projet de rapport sur la stratégie protéine européenne en cours de discussion au sein du Parlement européen, de faire preuve d’une grande vigilance. Une étude approfondie des impacts de la mise à l’échelle, et l’ensemble des processus et consommations industrielles que cela impliquerait, semble être absolument incontournable. D’ailleurs, la FAO et l’OMS se montre particulièrement prudentes. A minima une analyse, suivie d’une réflexion approfondie et ouverte sur un cadre d’analyse ad hoc devrait être envisagée par la Commission européenne avant même le démarrage d’un quelconque processus d’approbation.

NGTs : L’UE REPORTE LA PROPOSITION DE LOI

Alors que l’Italie a donné son accord le 30 mai pour tester les NGT sur le terrain à des fins expérimentales, et que la future présidence espagnole du Conseil a déclaré son intention de soutenir la recherche et la mise en œuvre des nouvelles technologies génétiques, la publication de la proposition officielle de règlement de la CE sur les NGT a été reportée du 7 juin au 5 juillet .

Parallèlement, le Canada a assoupli sa réglementation sur les NGT, tandis que le Japon a mis au point des œufs sans allergènes CRISPR.

CRISE UKRAINIENNE : INVESTIR DANS LA BIOÉCONOMIE, UNE SOLUTION DURABLE

Les changements structurels appellent des réponses structurelles. Les liens plus étroits entre l’Ukraine et l’UE sont là pour durer. Il est très probable que de nouvelles capacités de transformation seront nécessaires pour valoriser les produits agricoles qui seront attirés par le marché de l’UE, en fonction de l’évolution des marchés mondiaux et des coûts de transport. Cette nouvelle réalité appelle à donner une nouvelle orientation au Green Deal. Un nouvel élan donné à la bioéconomie dans l’UE permettrait non seulement de renforcer les productions stratégiques (alimentation humaine et animale, biocarburants, biomatériaux, etc.) et de stabiliser les marchés agricoles, mais aussi d’apporter un soutien à long terme à l’économie et à la démocratie ukrainiennes.

Les importations de céréales en provenance d’Ukraine vers les pays voisins de l’UE ont perturbé les marchés locaux, poussant les agriculteurs à demander la fin des importations en franchise de droits, et certains pays à suivre leur exemple et à les bloquer. La crise a provoqué une onde de choc à Bruxelles, car le soutien bien justifié à l’économie ukrainienne, victime de l’agression russe, a suscité un vaste mouvement d’opposition à l’un de ses éléments clés : la suppression temporaire de tous les droits de douane.

La Commission a tenté de compenser les agriculteurs touchés par un premier paquet de soutien supplémentaire via la réserve de crise de la PAC, mais un deuxième paquet plus important a rapidement été jugé nécessaire. Malgré les ressources mises en œuvre pour calmer les protestations, les appels à l’application de clauses de sauvegarde sont toujours d’actualité.

La compétitivité du blé, du maïs, du tournesol et de l’orge ukrainiens (pour ne citer que quelques secteurs) est bien connue. Il y a plus de 20 ans déjà, après la chute du mur de Berlin et la fin de l’URSS, les importations de blé ukrainien entraient dans l’Union européenne, même après avoir payé l’intégralité des taxes à l’importation. Cette situation a conduit l’Union européenne à renégocier sa protection extérieure pour le blé dans le cadre de l’OMC, en augmentant les droits appliqués.

Les exportations ukrainiennes ont souffert de l’agression russe, chutant dans le cas du maïs des sommets de 27 millions de tonnes en 2021/22 à une prévision de 20 millions de tonnes pour la campagne actuelle, dans le cas du blé d’environ 19 à 15 millions de tonnes et dans le cas de l’orge d’environ 6 à 3 millions de tonnes pour les mêmes années de campagne. Toutefois, malgré la baisse des exportations, l’ouverture d’autres voies commerciales vers la traditionnelle mer Noire a permis d’écouler de grandes quantités de céréales ukrainiennes dans les pays voisins de l’UE.

Les causes profondes du problème ne disparaîtront pas. Les marchés de l’UE sont plus attrayants pour les exportations ukrainiennes que les marchés lointains des pays en développement. Même lorsque la guerre sera terminée et que l’Ukraine commencera, espérons-le, à se remettre de ses blessures, il est probable que l’Union européenne prolongera ses formes de soutien financier, économique et commercial pendant une longue période, notamment en vue d’une éventuelle adhésion de l’Ukraine à l’UE.

Par conséquent, l’UE devrait trouver des solutions durables aux importations de céréales ukrainiennes, au lieu d’empiler les mesures de compensation les unes après les autres. Le renforcement de la bioéconomie pourrait apporter une solution durable à la disponibilité supplémentaire de céréales, bénéfique pour la sécurité alimentaire mondiale. 

En encourageant les investissements dans la bioéconomie, il est possible de valoriser la production de maïs, de blé, d’orge et de tournesol, pour n’en citer que quelques-uns, pour en faire des protéines, de l’énergie et toutes sortes de biomatériaux de grande valeur et absolument stratégiques. Ces produits sont indispensables pour relever les défis de la sécurité alimentaire et des transitions environnementales, tout en stabilisant les marchés agricoles. La sécurité alimentaire mondiale en bénéficierait, car les importations en provenance d’Ukraine réduiraient l’empreinte globale de l’UE sur d’autres marchés, notamment celui du soja en provenance d’Amérique du Sud. 

Au cours des cinq premiers mois de 2023, l’Union européenne a importé d’Ukraine à peu près la même quantité de céréales que pendant toute la campagne d’avant-guerre. Et ce, malgré l’impact de la guerre sur l’agriculture ukrainienne. Une grande partie de ces céréales éprouve des difficultés à être réexportée vers les marchés mondiaux, comme c’est déjà le cas pour la production des pays d’Europe centrale. Les défis logistiques dans cette partie de l’Europe ne sont pas nouveaux.

L’Union européenne doit mettre en place de nouvelles capacités de transformation pour valoriser une production supplémentaire provenant de l’Ukraine sur une base structurelle, qui autrement pèserait chaque année sur le marché de l’UE, surtout si l’on tient compte de la poursuite de l’intégration de l’économie ukrainienne dans le marché intérieur.

Les mesures à court terme prises par l’UE ne suffiront pas à relever un défi structurel. En effet, l’absence d’outils efficaces de mécanismes de marché actuellement inclus dans la Politique agricole commune pour faire face aux perturbations du marché est évidente. Cela devrait inciter l’Union européenne à repenser sa politique agricole afin de donner plus de mordant à ses leviers économiques. Toutefois, dans la situation actuelle, aucune mesure de marché ne permettra de compenser un changement profond de la réalité du marché. Les changements structurels appellent des réponses structurelles. 

Dans un contexte où les denrées alimentaires, les aliments pour animaux, l’énergie et les biomatériaux à haute valeur ajoutée sont de plus en plus stratégiques, l’UE ne devrait pas tarder à lancer une nouvelle vague d’investissements dans ces secteurs. Cet effort devrait donner une nouvelle orientation à l’approche du Green Deal, en promouvant une croissance durable pour l’agriculture et les secteurs connexes. 

Dans le cadre de l’actuelle directive sur les énergies renouvelables (RED), l’Union européenne dispose d’une marge de manœuvre pour encourager la bioéconomie, qui produit à la fois des denrées alimentaires, des aliments pour animaux, des biocarburants et des produits biochimiques. Aujourd’hui, le pourcentage de biocarburants d’origine végétale dans le bouquet énergétique des transports dans l’UE est inférieur à 5%, alors que la RED accepte une limite plus élevée de 7% pouvant être pris en compte dans les mandats de l’UE en matière d’énergie renouvelable. Des objectifs climatiques ambitieux exigent une contribution plus importante de l’agriculture à l’effort de décarbonisation de l’économie. 

Les récentes conclusions du Conseil « sur les opportunités de la bioéconomie à la lumière des défis actuels, avec un accent particulier sur les zones rurales », à l’initiative de la présidence suédoise, « soulignent le rôle d’une bioéconomie durable et circulaire dans la gestion des questions liées au climat, à la biodiversité, à l’énergie et à la sécurité alimentaire, ainsi que son potentiel de diversification des revenus, de création d’emplois dans les zones rurales et côtières, et de soutien à la transition verte et à la résilience accrue de l’UE ».

Cette volonté politique doit déboucher sur des investissements réels. La Commission devrait faciliter le processus grâce à des politiques qui encouragent les investissements dans la bioéconomie, sans exclure aucun secteur susceptible d’y contribuer. Il convient de veiller tout particulièrement à ne pas entraver les investissements par des réglementations fiscales mal conçues. Les États membres devraient établir des mandats et des politiques nationales qui favorisent ces investissements.

Réagissons à la crise actuelle pour apporter des solutions durables, tournées vers l’avenir, en mobilisant les capacités d’investissement de l’UE pour déclencher une poussée de la bioéconomie européenne. Cela permettrait également de soutenir à long terme l’économie et la démocratie ukrainiennes.

Les mesures de lutte contre l’érosion sont-elles fair-play pour les agriculteurs wallons ?

Face aux critiques liées à la complexité de la Politique agricole commune (PAC) et à sa déconnexion de la réalité du terrain, la Commission européenne a proposé la mise en œuvre de plans stratégiques nationaux, laissant aux États membres (ou aux régions) le soin de définir le détail des mesures à mettre en œuvre pour conditionner les paiements directs. Il s’agit là d’une caractéristique essentielle de la nouvelle PAC, qui a de graves répercussions sur l’égalité des conditions de concurrence au niveau de l’UE. La mise en œuvre des BCAE5 met en lumière cette nouvelle réalité, dont les agriculteurs wallons paient le prix fort. 

Les articles 12 et 13 du règlement 2021/2115 sur la Politique agricole commune (PAC) traitent de la conditionnalité, c’est-à-dire de l’ensemble des obligations relatives aux bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE) que les agriculteurs doivent respecter pour avoir accès aux fonds du premier pilier de la PAC. Les plans nationaux soumis par les États membres doivent préciser les détails de ces mesures, en indiquant concrètement comment ils entendent les appliquer. 

Cette nouvelle approche, présentée initialement comme une évolution de bon sens, a pu séduire face à l’échec des multiples tentatives de simplification de la PAC. Elle présente néanmoins un écueil majeur: dès lors qu’il s’agit de l’aide de base, elle place les agriculteurs européens face à des règles à géométrie variable, avec des impacts économiques et agronomiques parfois fortement divergents. 

Chacune de ces mesures (BCAE) vise à relever des défis communs — environnementaux, sanitaires ou de bien-être animal — avec l’ambition d’avoir un impact positif à très grande échelle, sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne, par la mobilisation d’un effort collectif de l’ensemble des agriculteurs. Ces actions se doivent d’être complémentaires à d’autres mesures spécifiques et financées par ailleurs dans le cadre des éco-régimes ou des mesures agro-environnementales. 

L’ensemble des plans stratégies nationaux (ou régionaux) sont désormais connus. D’ores et déjà, de nombreux Etats membres envisagent de procéder à des ajustements de leur plan stratégique, avec le recul d’une année de mise en œuvre. Il est donc utile de se pencher sur le détail des mesures, d’analyser leurs impacts non seulement environnementaux, mais aussi socio-économiques. Car il apparaît que les administrations nationales ou régionales sont parfois tout aussi — voire plus — créatives que l’administration européenne en matière de complexité et de sur-règlementation, laissant parfois les agriculteurs démunis face à un risque renforcé d’inéquité de traitement, sans réel débat européen. 

A ce titre, l’analyse de la BCAE5 est particulièrement significative. Face au défi de l’érosion des sols, la règle de conditionnalité indique simplement dans le règlement européen qu’il est nécessaire de « gérer le travail du sol en vue de réduire le risque de dégradation et d’érosion des sols, en tenant compte de la déclivité ». L’objectif à poursuivre est celui d’une « Gestion minimale de la terre reflétant les conditions locales spécifiques en vue de limiter l’érosion ». Cette mesure joue un rôle important à l’échelle européenne, aux côtés des BCAE 4 et 6 pour lutter contre ce phénomène qui affecte la fertilité à long terme des sols. 

L’ensemble des autres paramètres sont désormais du ressort des Etats membres ou des régions. Ils font l’objet de l’étude comparative ci-dessous. Auparavant malgré des flexibilités, les détails étaient fixés par un acte délégué de 2014, qui établissait les principes de base de couverture minimale des sols, la surface minimale des exploitations devant être couverte, la rotation des cultures ou encore la réduction du labour.  

Le défi de l’érosion à travers l’Union européenne

Au préalable, il convient de rappeler que l’érosion est un défi qui touche l’ensemble des régions de l’Union européenne, sans exception, comme le montrent les données récemment publiées par le Centre commun de recherche dans le cadre des discussions sur la stratégie sols. 

Le premier vecteur d’érosion des sols, tant quantitativement que géographiquement, est l’eau. Celle-ci concerne la plupart des Etats membres, avec une acuité plus forte pour les pays méditerranéens et les pays d’Europe centrale, davantage sujets au ruisselement. Même si elle est de moindre ampleur en terme quantitatifs, l’érosion liée au labour a aussi une emprise géographique très large. Elle touche l’ensemble des Etats membres, avec un moindre impact en Belgique, aux Pays-Bas, et dans certaines régions du nord de l’Allemagne et de la Pologne.

Quand aux phénomènes d’érosion éolienne ou d’érosion liée aux récoltes, ils sont naturellement plus localisés. Pour les premiers sur la façade nord-ouest, certaines régions de la mer Noire, du sud de l’Italie ou du nord de l’Espagne. Les seconds correspondent aux zones de cultures impliquant un arrachage. L’érosion liée aux récoltes représente une moindre part du phénomène d’érosion à l’échelle de l’Union. Pour celle-ci, les mesures prévues au titre de la BCAE5 ont une pertinence limitée. Les mesures de prévention requièrent des moyens techniques, par exemple destinés à limiter la quantité de terre emportée lors du prélèvement des pommes de terre ou des betteraves par le déterrage doux ou usage de tapis roulants spécifiques.

Des fortes divergences dans la définition des zones ciblées

Dans le cas de la Région wallonne, la BCAE5, dont on rappelle qu’elle conditionne l’octroi de l’intégralité des aides aux agriculteurs, est particulièrement détaillée et onéreuse. Comme nous le verrons, le choix wallon est très différent de celui de la majorité des autres Etats membres. Nous analyserons en quels termes.

Une première différence substantielle réside dans les critères utilisés par les États membres pour définir les zones où la BCAE doit être appliquée. La grande majorité des États membres (BG, EE, EL, ES, FR, HR, IT, CY, LV, LT, HU, MT, PL, PT, SI) n’indiquent que la « pente » du sol comme critère de définition des zones d’intervention et se réfèrent presque toujours à des zones dont la pente est supérieure à 10 %.

Les autres plans nationaux ont toutefois des critères différents. Pour l’essentiel, il s’agit de critères liés à des pentes différenciées ou de mesures qui s’appliquent à toutes les zones, quel que soit leur risque d’érosion. Par exemple, le plan stratégique de l’Autriche. Tout en faisant référence à une pente du sol supérieure à 10 %, il prévoit également l’interdiction du travail du sol par des machines agricoles sur des sols gelés, saturés d’eau, inondés et enneigés pour toutes les surfaces agricoles. L’Irlande fait référence aux pentes de plus de 15 % et 20 %, mais propose des critères pour toutes les prairies. Le labourage de toutes les prairies est interdit entre le 16 octobre et le 30 novembre.

Pour les Pays-Bas, il existe des mesures pour les pentes supérieures ou égales à 2 % et supérieures à 18 %. Et pour la Slovaquie, des mesures spécifiques pour les zones gravement menacées par l’érosion hydrique ou éolienne sont mentionnées, mais sans spécifier de critères, les mesures s’appliquant aux pentes de plus de 3 %. La Finlande, le Danemark et la Suède introduisent des critères relatifs à la proximité des sols par rapport aux cours d’eau.

La Région wallonne quant à elle se différentie nettement. Elle identifie trois zones (risque d’érosion élevé, risque d’érosion très élevé, risque d’érosion extrême) à l’aide d’une équation basée sur l’équation universelle des pertes en sol révisée (RUSLE), qui tient compte des facteurs suivants : l’indice d’érosivité des pluies [MJ. mm/ha.h.an] ; l’indice d’érodibilité du sol [t.h/MJ.mm] caractéristique du type de sol et de ses propriétés ; le facteur topographique [-] combinant la longueur de la pente et son inclinaison.

Les seuls plans nationaux qui, avec celui de la Région wallonne, identifient différentes zones territoriales avec des risques d’érosion différenciés basés sur des critères multiples sont ceux de la Région flamande, de l’Allemagne, du Luxembourg et la République tchèque. Ces Etats membres utilisent cet outil avec des différences importantes à prendre en compte par rapport au plan Wallon. 

Le Plan stratégique de la Région flamande prévoit que : « la sensibilité à l’érosion d’une parcelle est déterminée sur la base d’un modèle de calcul de l’érosion annuelle potentielle moyenne par hectare en utilisant l’équation universelle révisée de perte de sol ou RUSLE (Revised Universal Soil Loss Equation). De cette manière, la pente, la longueur de la pente et le type de sol sont pris en compte. Il existe six classes de sensibilité à l’érosion : très élevée (violet), élevée (rouge), moyenne (orange), faible (jaune), très faible (vert clair) et négligeable (vert). L’impact de cette formule en Flandre est marginal en comparaison de celui pour la Wallonie, selon les simulations réalisées respectivement par les organisations agricoles wallonnes (FWA) et flamande (Boerenbond) (1). 

Le plan stratégique allemand, quant à lui, délègue aux Lander la désignation des zones à risque, selon des critères uniformes, tels que : le facteur d’érodabilité du sol, le facteur de pente, le facteur d’érosion pluviale et de ruissellement de surface. Le risque d’érosion éolienne est également déterminé.

Le plan stratégique de la République tchèque identifie plusieurs zones selon les critères suivants : l’inclinaison et la longueur de la pente, la structure et la texture de la couche arable, la teneur en matière organique du sol, la sensibilité du sol à l’érosion, l’effet protecteur de la végétation, l’efficacité des mesures anti-érosives, la perméabilité du profil du sol.

Enfin, le plan stratégique luxembourgeois pour la classification des zones à risque d’érosion utilise pour les terres arables une méthodologie utilisant l’apprentissage statistique multivariée (Machine Learning). Le calcul d’une érosion potentielle issue de la RUSLE est utilisé, mais uniquement pour les prairies. En outre, il existe des mesures pour toutes les terres agricoles, par exemple : les terrasses de retenue existantes doivent être maintenues sur l’ensemble de la SAU (en terres arables, prairies permanentes et cultures permanentes).

Des mesures plus ou moins précises, au niveau d’ambition divergeant

Quant aux mesures d’intervention, elles sont nombreuses. Les plus courantes sont liées à des restrictions du travail du sol, telles que l’interdiction du labourage à certaines périodes. 20 plans nationaux prévoient de telles mesures (AT, BE-FL, BE-WA, CZ, DE, DK, EE, IE, FR, IT, CY, LT, LU, HU, MT, NL, RO, SI, SK, SE). En outre, 13 plans stratégiques (AT, BG, DE, EE, EL, ES, FR, HR, LV, MT, PL, PT, RO) comprennent des mesures sur l’orientation du travail du sol par rapport à la pente. Vingt-trois plans stratégiques (AT, BE-FL, BE-WA, BG, CZ, DE, DK, EE, IE, EL, FR, HR, IT, LV, LT, LU, HU, NL, PL, SI, SK, FI, SE) comprennent des mesures relatives au couvert végétal.

Outre ces mesures communes, de nombreux États membres ou régions identifient d’autres mesures pour lutter contre l’érosion des sols. Par exemple, la « bande anti-érosion ». Le Danemark, la Finlande et la Suède font référence à une bande tampon le long des cours d’eau avec une interdiction de fertilisation, de pulvérisation, de travail du sol sur une bande de trois mètres de large au minimum (6 pour la Suède), une mesure qui répond également à la BCAE 4, mais qu’ils considèrent également comme une mesure anti-érosion.

L’Allemagne et la République tchèque mentionnent les bandes tampons comme mesure anti-érosion, mais ne précisent pas leur longueur, l’Allemagne laissant aux Lander le soin de définir les détails des mesures. Le plan stratégique luxembourgeois prévoit, dans les zones présentant un risque d’érosion élevé et moyen, l’installation obligatoire (sauf dans le cas des prairies) de bandes herbeuses anti-érosion d’une largeur minimale de 3 mètres.

La France et l’Autriche prévoient également des bandes végétalisées, d’une largeur minimale de 5 mètres dans les deux cas, comme mesure anti-érosion.

Conclusion

L’analyse des 28 plans stratégiques de la nouvelle PAC montre ainsi que seuls les plans wallons et flamands mobilisent pour l’ensemble des terres agricoles de leur région la méthodologie de cartographie RUSLE afin de cibler les mesures d’application de la BCAE5. La Flandre est peu concernée par cette cartographie, compte tenu des fortes différences topographiques avec la Wallonie. Ces deux plans se distinguent également par l’ampleur des bandes tampons allant jusqu’à 9 mètres. 

L’impact de la méthodologie de ciblage des parcelles excluant la plupart des agriculteurs flamands du dispositif fait que le choix de mise en œuvre de la BCAE5 en Wallonie place les agriculteurs wallons dans une position unique en Europe, avec, à la clef, de réelles distorsions de concurrence. Et ce, alors qu’il s’agit d’une mesure de conditionnalité ayant un impact sur l’ensemble des aides PAC, et non pas d’une mesure spécifique faisant l’objet d’une compensation ad hoc. 

Si les options prises par certains Etats membres s’expliquent du fait de conditions agronomiques, climatiques ou topographiques particulières, il est difficile de singulariser la Wallonie pour expliquer une telle différence d’approche. D’autant que l’impact attendu en Wallonie est sans commune mesure par rapport à l’impact de cette même mesure ailleurs au sein de l’Union européenne.

A la différence des mesures agro-environnementales ou des éco-régimes, une mesure de conditionnalité n’implique pas une rémunération supplémentaire permettant de compenser des distorsions. Elle a un caractère obligatoire pour l’ensemble des agriculteurs concernés, et pas simplement ceux qui souhaitent s’engager dans la mise en oeuvre d’une pratique agricole sur une base volontaire et rémunérée de façon spécifique.

VIN – VEILLE PERIODIQUE

Le mois d’avril a notamment été marqué par des inquiétudes dans les pays du sud de l’Union Européenne quand à la récolte 2023 au regard de déficits hydriques persistant, et par la finalisation des négociations au sein du Parlement européen sur la refonte du règlement sur les Indications Géographiques.

Par ailleurs, l’Organisation internationale du vin a publié des données sur la production, la consommation et les exportations mondiales de vin pour 2022. Ces données relèvent une nouvelle baisse des exportations en volume, et un nouveau record d’exportation en valeur qui a été atteint en raison de l’inflation.

Note complète disponible sur l’espace Membres de Farm Europe. 

NTGS: DERNIÈRE LIGNE DROITE AVANT LA PROPOSITION LEGISLATIVE

Après que l’UE a envisagé, début 2023, d’assouplir les réglementations et les exigences relatives à l’étude et à l’expérimentation des NGT, les avis des États membres restent partagés.
La CE a décidé d’approfondir son analyse d’impact qui sera présentée en même temps que sa proposition législative sur les NGT.,Cette proposition est toujours prévue pour le mois de juin (fin juin au lieu de juin, 7th).

Aux États-Unis, les autorités nationales ont décidé de ne pas réglementer une version génétiquement modifiée de la céréale éthiopienne teff, tandis que des résultats montrent que les gènes de cactus peuvent aider à développer des plantes résistantes à la sécheresse.

Note complète disponible sur l’espace Membres de FE