POUR UNE APPROCHE COMMUNE ET ÉQUILIBRÉE POUR CONTRER LES PRATIQUES COMMERCIALES DELOYALES

Les discussions sur la nécessité de rééquilibrer les relations au sein la chaîne alimentaire ne sont pas nouvelles au niveau européen. Toutes les institutions ont participé à plusieurs tentatives demandées par les différentes parties impliquées, mais à la fin, aucune mesure concrète n’a été prise avant cette année.

En 2013, sept Associations Européennes incitées par l’ancien Commissaire Verheugen ont lancé l’Initiative de la chaîne d’approvisionnement (ICA) en tant qu’action volontaire et privée visant à renforcer l’équité des relations commerciales tout au long de la chaîne alimentaire.

Depuis lors, certains progrès ont été réalisés, notamment en promouvant les évolutions de culture ainsi que l’amélioration de l’éthique dans les affaires, mais une série de lacunes importantes ont également été mises en évidence lors de l’analyse de sa mise en oeuvre. Faiblesse de la gouvernance, transparence limitée, absence de mesures de mise en oeuvre ou de sanctions, absence de moyens de dissuasion efficaces contre les pratiques commerciales déloyales et pas de possibilité de plaintes anonymes de victimes potentielles, absence d’enquêtes d’initiative par un organe indépendant et sous-représentation des PME et des agriculteurs en sont les plus importantes. Les principales préoccupations liées au sujet de pratiques commerciales déloyales sont nées dans les Etats Membres, et 20 d’entre eux, d’une manière ou d’une autre, ont recherché activement des solutions. Si nous résumons ce qui se passe dans les différents États membres, plusieurs distinctions peuvent être faites :

  • Certains États membres ont adopté des mesures spécifiques pour la chaîne alimentaire (à savoir l’Espagne, le Royaume-Uni, l’Italie…) et d’autres se réfèrent directement à la législation horizontale (Allemagne, France…).
  • Quatre principaux types de modèles coexistent : régulés en détail (Royaume-Uni, Espagne, Italie..), auto réglementés (Belgique), modèle mixte (Espagne, Royaume-Uni), réglementation horizontale et pays sans réglementation des pratiques commerciales déloyales spécifique (Danemark, Suède, Luxembourg, ..).
  • Lorsqu’il existe un cadre réglementaire avec des autorités de contrôle, il peut s’agir du ministère des finances (France), des autorités de la concurrence (Allemagne), des départements en charge de la sécurité alimentaire et de l’économie (Portugal) ou de l’agriculture (Espagne).2

Néanmoins, il est clair que malgré les efforts déployés, l’autorégulation ou les approches volontaires ne suffisent pas à résoudre les déséquilibres actuels de la chaîne alimentaire et que les disparités entre les systèmes nationaux en place ne permettent pas de garantir des conditions équitables et le bon fonctionnement du marché intérieur, alors que la nature fragmentée des marchés expose les opérateurs à des conditions différentes, à  une incertitude réglementaire.

Compte tenu de ces faits, le Commissaire Hogan a lancé en 2016 un groupe de travail sur les marchés agricoles (AMTF), qui a examiné la position de l’agriculteur dans la chaîne d’approvisionnement et proposé un certain nombre de recommandations sur certains points, parmi lesquels les pratiques commerciales sur les marchés agricoles et la contractualisation.

Le rapport a été longuement débattu au Conseil Agricole, dont les conclusions tirées en Décembre 2016 sur « le renforcement de la position des agriculteurs dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire et la lutte contre les pratiques commerciales déloyales » ont clairement montré que les déséquilibres des positions de négociation entraînaient souvent des pratiques commerciales déloyales, ainsi que la nécessité d’un environnement équilibré pour tous les acteurs de la chaîne.

L’AMTF n’a pas été la seule initiative sur la du fonctionnement de la chaîne alimentaire européenne. Le Parlement européen a également été très actif et son dernier positionnement a été adopté en juin 2016 avec l’adoption d’une nouvelle résolution sur les pratiques commerciales déloyales dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire dans laquelle il promet ouvertement une législation-cadre au niveau européen, afin de lutter contre les pratiques commerciales déloyales.

Allant dans le même sens, le Comité Economique et Social Européen a approuvé la dernière résolution du Parlement européen dans son opinion adoptée en plénière en octobre 2016 (« Une chaîne d’approvisionnement agroalimentaire plus équitable ») et souligna la nécessité d’une législation-cadre au niveau européen, ainsi que prendre des mesures rapides pour empêcher les pratiques commerciales déloyales.

Dans ce contexte, la Commission est venue en 2018 avec une proposition législative visant à traiter des pratiques commerciales déloyales et à rééquilibrer la relation entre les différents maillons de la chaîne alimentaire.

BESOIN D’UN ENSEMBLE DE MESURES CONCRETES.

 Si l’Europe veut une chaîne alimentaire forte et équilibrée, capable de partager la valeur ajoutée générée dans des conditions équitables, capable de renforcer la position des producteurs en tant que maillon le plus vulnérable et de générer de la richesse pour le consommateur, un ensemble minimum de problématiques doit être traité.

Ces problématiques sont les suivantes :

  1. Avoir un ensemble de principes directeurs pour les relations commerciales dans la chaîne alimentaire. Il existe trois types de relations dans la chaîne alimentaire : 1) industrie-producteur, 2) producteur – distribution, 3) industrie -distribution. Dans tous les cas, la relation doit être régie par les principes d’équité et de réciprocité juste entre les parties, la liberté de conclure des accords, la bonne volonté, l’intérêt mutuel, le partage équitable des risques et des responsabilités, la coopération, la transparence et le respect de la concurrence.
  2. Identification des pratiques déloyales à exclure des pratiques commerciales.Il existe une littérature abondante sur les pratiques commerciales déloyales et, en termes généraux, elles peuvent être décrites comme toutes sortes de pratiques imposées au fournisseur qui ne respectent pas l’équité dans la relation contractuelle, transmettant les inefficiences ou les risques sans aucune compensation.  Sous cette description générale, nous devons inclure :
    • Les modifications unilatérales ou rétroactives des conditions convenues (concernant les volumes, les normes de qualité, les prix),
    • Les facturations commerciales non prévues,
    • Les charges pour services fictifs,
    • Le transfert des frais dans les promotions au fournisseur sans négociation ni participation de l’acheteur,
    • le retour imposé et inconditionnel des marchandises invendues,
    • Le non-respect des délais de paiement établis dans la directive 2011/7 / UE,
    • L’annulation soudaine et injustifiée d’un contrat,
    • Les enchères électroniques non transparentes et discriminatoires.
    • Les demandes de paiement initial pour sécuriser ou conserver des contrats.
  3. Contrats écrits.Les relations commerciales modernes impliquent de prendre en compte un ensemble de questions complexes – qualité, quantité, prix, remises, logistique et transport, conditions de livraison, … – qui ne peuvent être laissées à l’incertitude. De plus, des conditions claires signifient des relations sûres et stables, ainsi que moins de controverses juridiques. Nous proposons en règle générale la nécessité de contrats écrits le long de la chaîne, avec un ensemble minimum de critères, conditions qui devraient être obligatoires à la demande du fournisseur. Dans le cas des producteurs agricoles, les organisations de producteurs et les organisations interprofessionnelles pourraient jouer un rôle important dans ce domaine et négocier en leur nom, les interprofessions pouvant établir des contrats types.
  4. Application effective des règles. L’expérience montre les lacunes et les limites des modèles d’application volontaire non contraignants. Le moyen le plus efficace est la supervision et le contrôle par une autorité indépendante, dotée de pouvoirs publics, afin d’assurer l’application effective de l’ensemble de règles proposées.
  5. Éviter des facteurs de peur.La bonne application des règles devrait être possible soit à l’initiative des autorités indépendantes, soit par les opérateurs et leurs organisations. Dans ce sens, il est essentiel de mettre en place un système efficace de dépôt de plaintes garantissant l’anonymat.
  6. Sanctions et dénonciation.Le non-respect de l’ensemble de règles proposées devrait faire l’objet de sanctions, avec un caractère dissuasif, et inclure des dispositions relatives à la publicité faite sur les contrevenants.

Toutes ces propositions devraient s’inscrire dans un cadre européen commun.

Cela devrait être complété au niveau national par la participation effective des parties prenantes à travers des codes de conduite / accords volontaires, comme moyen de mieux mettre en œuvre un système global.

PROPOSITION DE LA COMMISSION CONCERNANT UNE DIRECTIVE RELATIVE AUX PRATIQUES COMMERCIALES INJUSTES DANS LES RELATIONS ENTRE ENTREPRISES ET ENTREPRISES DANS LA CHAINE D’APPROVISIONNEMENT ALIMENTAIRE.

 (Extrait de la commission de l’agriculture et du développement rural, projet de rapport sur la proposition de directive du parlement européen et du conseil relatif aux pratiques commerciales déloyales dans les relations interentreprises dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire (Com (2018) 0173 – c8-0139 / 2018 – 2018/0082 (Cod)) Rapporteur : Paolo de Castro 2018/0082 (Cod))

« L’absence, jusqu’à présent, d’un cadre de pratiques commerciales déloyales commun contraste avec les autres domaines régis par la PAC et qui concernent directement les opérateurs, tels que les règles de concurrence, les règles relatives aux aides d’État et les normes de commercialisation. Dans ces domaines, l’organisation commune des marchés (règlement (UE) no 1308/2013) établit des règles communes relatives aux conditions du marché auxquelles les opérateurs sont confrontés dans l’UE afin de contribuer à la cohésion économique et sociale et aux règles de jeu équitables dans le marché unique.

La présente proposition de directive vise à réduire la fréquence des pratiques commerciales déloyales dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire en introduisant une norme commune minimale de protection dans l’ensemble de l’Union européenne qui consiste en une liste restreinte de pratiques commerciales déloyales spécifiques interdites. La protection couvre les fournisseurs de la chaîne d’approvisionnement alimentaire dans la mesure où ils vendent des produits alimentaires à des acheteurs qui ne sont pas de petite et moyenne taille. Ce champ d’application vise à contribuer à un niveau de vie équitable pour la communauté agricole, objectif de la PAC au titre de l’article 39 du TFUE.

L’article 43 du TFUE, en tant que base juridique principale de la PAC, constitue la base juridique unique de la proposition de la Commission. Les mesures prévues dans la proposition concernent les pratiques commerciales déloyales intervenant dans la chaîne d’approvisionnement agricole et alimentaire en relation avec le commerce de produits originaires de producteurs agricoles. Il convient de noter que, conformément à l’article 38, paragraphes 2 et 3, du TFUE, la PAC couvre principalement les produits agricoles énumérés à l’annexe 1 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Cependant, la Cour de justice des Communautés européennes a explicitement confirmé que les produits alimentaires non énumérés à l’annexe I du TFUE (les produits de l’annexe I sont considérés comme des « produits agricoles » en vertu du traité) peuvent également être couverts par l’article 43 dans la mesure ou cela contribue à un ou plusieurs des objectifs de la PAC et que les produits agricoles sont principalement couverts. 1

De plus, une approche qui protège les producteurs agricoles et leurs associations (coopératives et autres organisations de producteurs) doit également prendre en compte les effets négatifs indirects de pratiques commerciales déloyales qui auraient lieu en aval dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire, c’est-à-dire concernant des opérateurs non agriculteurs mais dont la position dans la chaîne en aval les rend vulnérables aux pratiques commerciales déloyales. La protection contre les pratiques commerciales déloyales applicables aux fournisseurs en aval évite les conséquences imprévues pour les agriculteurs en raison du détournement des échanges vers leurs concurrents – par exemple au stade de la transformation – qui ne bénéficieraient d’aucune protection (par exemple, moins de risques juridiques pour des acheteurs d’être accusés de pratiques commerciales déloyales).

En outre, la Commission souligne que les mesures proposées complètent les mesures existant dans les États membres et le code de conduite de la SCI.

POSITION DU RAPPORTEUR DU PE ET AMENDEMENTS PROPOSÉS

Le rapporteur soutient la proposition de la Commission en tant qu’instrument législatif attendu depuis longtemps pour défendre la position de négociation des producteurs agricoles dans la chaîne d’approvisionnement agricole et alimentaire ; un instrument qui peut enfin compléter les mesures introduites par le règlement (UE) 2017/2393, appelé règlement omnibus, visant à renforcer les prérogatives de négociation des agriculteurs de l’UE. Il convient de rappeler que la conviction de la nécessité d’un tel instrument a été confortée par les conclusions du groupe de travail sur les marchés agricoles publié en novembre 2016 et partagé par le Parlement dans sa résolution adoptée le 7 juin 2016, ainsi que par les ministres de l’agriculture de l’UE qui ont adopté des conclusions à l’unanimité à cet égard lors de leur réunion informelle du Conseil des 12 et 13 décembre 2016 à Bratislava.

Le rapporteur souligne que l’achèvement de la procédure législative sur la proposition des pratiques commerciales déloyales avant la fin de la présente législature, faisant ainsi de cette nouvelle législation un « délivrable » concret pour les agriculteurs européens, est un objectif important et réaliste pour ce Parlement. Du côté de l’autre Co législateur, la présidence autrichienne a clairement indiqué son intention de donner la plus haute priorité à la proposition des pratiques commerciales déloyales, comme indiqué dans une lettre du 4 juin 2018 de la ministre autrichienne du développement durable et du tourisme, Elisabeth Köstinger au président de la commission AGRI. La lettre indiquait que la proposition des pratiques commerciales déloyales était l’une des principales priorités de la présidence autrichienne et a rappelé que le Parlement et le Conseil avaient demandé à plusieurs reprises une législation visant à protéger les agriculteurs qui constituent le maillon faible de la chaîne d’approvisionnement avant de conclure à la nécessité d’harmoniser vingt réglementations nationales différentes et établir des normes minimales pour tous les États membres »afin de« résoudre les problèmes des agriculteurs traités injustement par d’autres partenaires plus puissants de la chaîne d’approvisionnement ».

Amendements proposés par le rapporteur

Tout en soutenant largement la proposition, le rapporteur propose néanmoins un certain nombre d’amendements pour améliorer son efficacité. Ce sont les suivantes :

  • ? Extension du champ d’application aux fournisseurs de la chaîne d’approvisionnement alimentaire qui ne sont pas des PME afin d’inclure les organisations d’agriculteurs et d’éviter les détournements d’échanges possibles des PME ;
  • ? Extension du champ d’application à tous les produits agricoles, c’est-à-dire non seulement aux produits alimentaires, afin d’inclure le secteur horticole, l’industrie de l’alimentation animale et d’autres secteurs agricoles ne relevant pas de la production alimentaire ;
  • ? L’extension de la définition de « l’acheteur » aux opérateurs qui, bien qu’établis en dehors de l’UE, achètent et vendent des produits sur le marché de l’UE. L’objectif est d’éviter qu’un acheteur puisse échapper aux dispositions de la directive en déplaçant simplement son lieu d’établissement en dehors de l’UE ;
  • ? Toujours en ce qui concerne la définition de « l’acheteur », la fourniture de services connexes devrait être incluse dans le champ d’application, de même que la transformation, la distribution ou la vente au détail de produits agricoles et alimentaires ;
  • ? Inclusion d’une définition de « pratique commerciale déloyale » (au sens d’un principe global), conforme à la définition donnée dans les conclusions du Conseil du 12 décembre 2016, qui est reflétée au considérant 1 de la directive proposée.
  • ? Inclusion d’une définition de la « dépendance économique » en tant que relation de pouvoir entre un fournisseur et un acheteur ;
  • ? Introduction d’un délai de paiement pour les produits non périssables à 60 jours à compter de la réception de la facture, comme le prévoit également la directive 2011/7 / UE sur les retards de paiement ;
  • ? Exemption des dispositions relatives aux conditions de paiement pour toutes les contributions des agriculteurs à leurs organisations de producteurs et coopératives, ainsi que pour les accords entre organisations interprofessionnelles lorsque ces accords concernent des produits de qualité ;
  • ? Définition de la notion de « préavis court » (lorsqu’un acheteur annule des commandes de produits alimentaires périssables) dans un délai déterminé (60 jours) ;
  • ? Amélioration de la phrase introductive du paragraphe 2 de l’article 3 (dénommée «pratiques commerciales déloyales grise ») en incluant le concept de « dépendance économique » afin de prendre en compte le déséquilibre de pouvoir entre les acteurs, déséquilibre qui peut être utilisé par des acheteurs pour imposer unilatéralement leurs conditions à des fournisseurs dont le pouvoir de négociation serait faible;
  • ? Introduction de la possibilité pour les États membres d’interdire toute autre pratique commerciale déloyale (c’est-à-dire aller au delà des interdictions de l’article 3), sur la base de la définition des « pratiques commerciales déloyales » ajoutée à l’article 2 ;
  • ? Inclusion de contrats écrits obligatoires à la demande d’un fournisseur, conformément au « règlement omnibus » – à l’article 168 de l’OCM unique et de la possibilité pour les États membres d’encourager une contractualisation accrue entre les différents acteurs de la chaîne d’approvisionnement ;
  • ? l’inclusion de la possibilité pour les plaignants de porter plainte auprès des autorités étrangères par l’intermédiaire de leurs propres autorités nationales ;
  • ? Extension aux associations représentatives du droit de porter plainte au nom d’un ou de plusieurs de leurs membres ;
  • ? Inclusion de l’obligation pour l’autorité chargée de l’exécution d’engager une enquête dans les 60 jours à compter de la date à laquelle la plainte a été déposée et de la conclure dans un délai de six mois. Dans des cas dûment justifiés, les six mois peuvent être prolongés de six mois (toute l’enquête doit donc être achevée dans les quatorze mois à compter de la plainte) ;
  • ? Inclusion de l’obligation pour l’autorité d’exécution, en cas d’infraction établie, d’obliger l’acheteur à mettre fin à la pratique commerciale interdite ;
  • ? Introduction de la possibilité pour les États membres de promouvoir le recours à la médiation ou à un autre mécanisme de règlement des litiges ;
  • ? Introduction de l’obligation pour les États membres d’inclure dans leur rapport annuel à la Commission une évaluation de l’efficacité des mesures mises en œuvre afin d’interdire les pratiques commerciales déloyales».

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1Résolution du PE du 7 juin 2016 sur les pratiques commerciales déloyales dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire.

2Informations plus amplement détaillées dans l’étude commissionnée par l’agence espagnole pour le contrôle et l’information alimentaire (Spanish Agency for Food Information and Control : AICA), ‘’Informe sobre la aplicacion de la regulacion de practicas comerciales en los paises UE” 2016. www.aica.gob.es

Nouvelles techniques de sélection végétale : Conclusions préliminaires de la CJUE

Une première base solide et prometteuse sur laquelle s’appuyer.

Le 18 janvier 2018, l’avocat général de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) a rendu des conclusions préliminaires sur la question de savoir si certaines des nouvelles techniques de génie génétique entrent dans le champ d’application de la législation européenne sur les OGM (affaire C-528/16).
Pour un aperçu de ce que sont les NBT (New Breeding Techniques), leur classification juridique dans l’UE et en particulier la pertinence de cette application des nouvelles techniques dans l’agriculture de l’UE, vous trouverez ici notre rapport (LINK).
Tout d’abord, ce que l’avocat général M. Michal Bobek a fait était de fournir une interprétation juridique en réponse à l’enquête de la France de 2016, qui demandait à la CJUE de préciser si un type de colza résistant aux herbicides devaient subir le processus d’approbation pour les OGM, et donc si les plantes résultant des nouvelles techniques seront couvertes par la législation de l’UE sur les OGM – Article 2 (2) de la Directive OGM 2001/18 / CE. Puis, l’opinion de l’Avocat général tente de préciser si et dans quelle mesure les organismes développés par des techniques conventionnelles et innovantes de sélection végétale (spécifiquement la mutagenèse) doivent être régulés soit par le même cadre que la sélection végétale conventionnelle soit comme organismes génétiquement modifiés (OGM).

Brussels, January 18th

“Ever since humans have grown plants and raised animals for food, they have selected plants and animals with beneficial traits for further breeding. Such traits reflected naturally occurring genetic variations and resulted, for example, in an increased yield or resistance to diseases or environmental pressures”.

EFSA (European Food Safety Authority)

“Targeted genome modification techniques could have revolutionary applications in agriculture. They consist in introducing very precise genetic modifications which make it possible to accelerate the selection speed. They represent a fundamental departure from the « old » GMOs, insofar they could occur naturally and are virtually undetectable”.

French Parliamentary Office for evaluation of scientific and technological options (OPECST)

Today, January 18th 2018, the European Court of Justice (ECJ) Advocate General issued preliminary conclusions on whether some of the new genetic engineering techniques fall within the scope of the European legislation on GMOs (Case C- 528/16).

It is true that this is only a first opinion on the long-standing issue, whose final conclusions, and the related framework, are expected to be presented by the ECJ by summer 2018, however it has to be underlined what this outcome may entail for the future of plant improvements at European level.

For an overview of what NBTs are, their legal classification in the EU and in particular the relevance of these New Techniques application in EU agriculture, here you find our report (LINK).

On this issue, it is absolutely necessary to focus first and foremost on facts, namely scientific arguments.

First of all, what the Advocate General Mr. Michal Bobek did today, was to provide a legal interpretation as a response to France enquiry in 2016, which asked the ECJ to specify whether a type of herbicide-resistant rapeseed obtained through gene- editing should undergo the approval process for GMOs, and so if plants resulting from the new techniques will be covered by the EU GMO legislation – Article 2(2) of GMO Directive 2001/18/EC. To be even more precise, French Council of the State posed to the ECJ four interlocutory questions (available here) on the scope of the EU’s GMO legislation and specifically, (i) if classical and/or newer site-directed mutagenesis plant breeding techniques produce GMOs and (ii) if EU Member States retain any discretion in transposing these EU Directives to their national laws.

“Directive 2001/18/EC regulates the deliberate release into the environment of genetically modified organisms (‘GMOs’) and their placing on the market within the Union. In particular, the organisms covered by that directive must be authorized after an environmental risk assessment. They are also subject to traceability, labelling and monitoring obligations”.

“Article 3(1), read in conjunction with Annex I B, states that the GMO Directive shall not apply to organisms obtained through certain techniques of genetic modification, such as mutagenesis (‘the mutagenesis exemption’)1”.

The Advocate General’s opinion attempts to make clear if and to what extent organisms developed through conventional and innovative plant breeding techniques (specifically mutagenesis), are to be regulated either through the same framework as conventional plant breeding or as genetically modified organisms (GMOs). It is necessary to specify that under the current EU legislative framework, organisms developed through traditional mutagenesis breeding techniques are regulated as conventional and are therefore exempt from the EU’s main GMO regulation, Directive 2001/18/EC.

“In my view, provided that they meet the substantive conditions of Article 2(2) of the GMO Directive, organisms obtained by mutagenesis are GMOs within the meaning of the GMO Directive (a). However, as long as the process of mutagenesis does not involve the use of recombinant nucleic acid molecules or GMOs other than those produced by one or more of the techniques listed in Annex I B, those organisms are exempt from the obligations laid down by the GMO Directive by virtue of Article 3(1) of the GMO Directive, read in conjunction with its Annex I B (b)”. – Advocate General on the scope of the GMO Directive and of the mutagenesis exemption.

Furthermore, he also specified that: “Like the Commission, I am of the opinion, that there is only one relevant distinction that should be made in order to clarify the scope of the mutagenesis exemption: the caveat set out in Annex I B, namely whether the mutagenesis technique involves ‘the use of recombinant nucleic acid molecules or [GMOs] other than those produced by … mutagenesis [or] cell fusion … of plant cells of organisms which can exchange genetic material through traditional breeding methods’ (‘the Annex I B caveat’)(1). No further distinctions should — or even could — be made judicially”.

Having in mind that this legal advice is not binding but that it is usually followed by European Court of Justice (ECJ) panel of judges, what it states in short is that crops obtained by the plant breeding technique of mutagenesis do not fall under laws restricting the use of genetically modified organisms ( G M O s ) however, and this is a point which has to be thoroughly analyzed, the Advocate General pointed out that the Directive 2001/18 does not preclude

1 “Mutagenesis involves an alteration of the genome of a living species. Unlike Transgenesis, which is a genetic engineering technique that consists in inserting one or more genes from other species into the genome of another species, it does not, in principle, entail the insertion of foreign DNA into a living organism. Techniques of mutagenesis have evolved over time as the result of scientific progress in biotechnology” Source: Case C-528/16 – OPINION OF ADVOCATE GENERAL BOBEK, 18 January 2018(1)

Member States from adopting measures governing mutagenesis provided that, in so doing, they respect the overarching obligations arising from EU law.

“Against this background, I am of the opinion that Member States have the competence to regulate organisms obtained through mutagenesis provided that they comply with their overall EU law obligations, whether of secondary law origins or the rules of primary law, such as Articles 34 and 36 TFEU”.

For a more precise explanation here below an extract from the Advocate General’s conclusion:

(1) Provided that they meet the substantive criteria of Article 2(2) of Directive 2001/18/EC of the European Parliament and of the Council of 12 March 2001 on the deliberate release into the environment of genetically modified organisms and repealing Council Directive 90/220/EEC, organisms obtained by mutagenesis are genetically modified organisms within the meaning of that directive;

The exemption laid down in Article 3(1) of Directive 2001/18, read in conjunction with its Annex I B covers all organisms obtained by any technique of mutagenesis, irrespective of their use at the date of the adoption of that directive, on the condition that they do not involve the use of recombinant nucleic acid molecules or genetically modified organisms other than those produced by one or more of the methods listed in Annex I B.

(2) Council Directive 2002/53/EC of 13 June 2002 on the common catalogue of varieties of agricultural plant species is to be interpreted as exempting varieties obtained by mutagenesis from the specific obligations laid down therein for the inclusion of genetically modified varieties in the common catalogue of agricultural plant species.

(3) Directive 2001/18 does not preclude Member States from adopting measures governing mutagenesis provided that, in so doing, they respect the overarching obligations arising from EU law.

As clarified by a USDA-FAS Report on January 16th on the expected legal opinion for New Breeding Techniques in the EU, “Advocates General are assigned to most cases before the ECJ to serve as an advisor to the court on how the case should be resolved. Their opinions are given considerable weight, and often are followed by the court, but are non-binding in all cases”. Furthermore, USDA Rapporteur found that by reviewing ECJ case law, what appears is that the majority of ECJ judgements complement the opinions of the advocate general.

In order to provide a brief background on the issue but without going back to the far past, last year, on April 28, 2017 the SAM-HLG (Scientific Advice Mechanism -High Level Group) released its explanatory Note in response to the request, formulated in the Scoping Paper (adopted by the HLG on 25 November 2016), by the European Commission, to provide an up-to-date overview and a comprehensive scientific comparison on new techniques in agricultural biotechnology, including their potential agri applications in both fields of synthetic biology and gene drives, considering the key characteristics of each of these new techniques.

Among the others, the Note highlighted that “all breeding techniques applicable in agriculture (conventional breeding techniques, CBT; established techniques of genetic modification, ETGM; and new breeding techniques, NBT) make use of genetic diversity and change whether naturally occurring or resulting from human intervention, in order to select or generate plants, animals or microorganisms that exhibit preferred characteristics” and that “the NBT of genome editing offer not only the ability to target insertions (resulting in comparatively fewer unintended effects on the expression of other genes or their disruption) but also the ability to make small, precise and specific changes, such as point mutations, which can also be observed in nature”.

This independent explanatory note, as also specified in the Scoping Paper, does not take a position; it does not cover legal issues and it does not make policy recommendations to policymakers. It is another piece to the puzzle.

Background notes :

New Plant Breeding Techniques (notably the CRISPR-Cas9, which is basically a technology that uses a DNA-cutting enzyme called nuclease to edit in a very targeted way parts of the genome, by removing, adding or altering sections of the DNA sequence) can play a key role in allowing plant breeders to introduce in an efficient way, very precise, targeted genetic modifications, which have the capacity to fasten the selection speed, when compared with conventional plant-breeding techniques. NBTs allow to develop plant varieties that can adapt to climatic changing conditions and ensure high level of biodiversity.

As also outlined in the Explanatory Note, “the speed with which mutations can be introduced using NBT is often higher (in particular when using the CRISPR-Cas genome editing system) than that which can be achieved with ETGM and CBT, mainly due to the reduced need for time-consuming screening procedures and/or back-crossing, with correspondingly lower costs”.

CRISPR-Cas9, for instance, is already a technique, which is having a great impact on our society. It is the most tangible example of how biotechnology has been able to make considerable progress with the targeted modification technologies of genome.

By focusing on the potential application in agriculture and food systems, some induced mutations that this technique could target are, among the others:

– “Bad” traits such as allergens or toxins can be selectively inactivated
– Specific mutations (herbicide resistance to more environmentally friendly substances or insect resistance) can be knocked-in
– Flowering time
– Metabolic engineering (starch, fatty acid profile)

On the other side of the Atlantic, the US Department of Agriculture (USDA) has changed the attitude toward genetic engineering, specifically with the new gene- editing techniques of plant breeding. In a recent article published on Nature Biotechnology, it is explained that the agency is giving “free-pass” to some plant varieties developed with CRISPR technique. In other words, CRISPR-Cas 9-edited plants can be cultivated and sold free from regulation burden and costs, so they fall outside USDA’s authority. For instance, in April 2016, the USDA clarified that it would not have regulated a non-browning mushroom genetically modified using CRISPR–Cas9 – the first US CRISPR-edited product to obtain “green light”2.

Aiming to provide a full picture, there are indeed other agricultural products (i.e. commodity crops such as corn, soybeans, canola, rice, wheat) which are undergoing targeted genetic engineering for drought resistance, pest resistance or higher yields. There is currently a quite wide consensus among scientists, who believe in the capacity of innovative NBTs to help farmers deal with climate change and a growing population.

In the overall discussion, taking into account the legal, scientific and of course societal aspects, we should keep in mind that greater priority has to be given to research in this area, since, as also the US concrete and illustrative example shows, the development of NBTs is happening in any case outside Europe.

In this context, there is a clear challenge : not to lose ground at global level and above all, not to neglect the revolutionary contribution and benefits of these new techniques to the sustainability and competitiveness of EU agriculture.

Today’s decision marks another relevant step towards the need for the EU to develop a clear legal framework for the new plant breeding techniques (NBTs), and so enabling these tools of agricultural innovation to be separated to the EU’s current laws on genetically modified organisms (GMOs) and thus ensuring regulatory clarity in view of the commercial application of these products, which could bring tangible benefits and potential improvements to crop productivity, quality, sustainable farming methods and, in general, addressing current and future agricultural and food challenges.

2 Available here: http://www.nature.com/news/gene-edited-crispr-mushroom-escapes-us-regulation- 1.19754

Nouvelles Techniques de Sélection Végétale (New Breeding Techniques) : de quoi parle-t-on ?

NOTE POLITIQUE

Aujourd’hui, les secteurs agroalimentaires sont plus que jamais confrontés à trois demandes majeures de notre société :
– Fournir des aliments sûrs et de qualité,
– Maintenir les zones rurales vivantes et viables,
– Optimiser la bonne gestion de l’environnement et lutter plus efficacement contre le changement climatique et les risques liés à des maladies de plus en plus étendues.
Etre capable de répondre conjointement à ces trois défis est à coup sûr un défi en soi, mais faisable, si nous acceptons de faire un usage efficace de la science et de concentrer nos efforts sur la double performance : économique et  environnementale. C’est la condition fondamentale du succès de l’agriculture de l’UE et de l’UE pour assurer à la fois la croissance, l’emploi et l’environnement.

Pour atteindre cet objectif, nous devons changer notre attitude, vivre dans notre temps et considérer ce que la science nous dit, et non ce que certains disent que la science pourrait dire. Cela est vrai en ce qui concerne la précision et l’agriculture intelligente et comment les politiques peuvent inciter le passage de l’agriculture de l’UE à une agriculture moderne, plus écologiquement efficace. C’est vrai aussi quand il s’agit de génétique.
Pendant plus d’une décennie, la productivité globale du secteur agricole de l’UE a été réduite de moitié. Au cours de cette décennie, la productivité du capital de ce secteur est devenue négative. Il est temps maintenant de réinvestir dans l’innovation et la recherche, de réinvestir dans la génétique et de développer une approche scientifique concrète à cet égard. Dans ce cadre, l’objectivité et la transparence seront essentielles. Les nouvelles techniques de reproduction seraient prometteuses en ce qui concerne l’extension moderne et plus rapide des techniques de reproduction traditionnelles habituelles.
Mais si l’objectif est de développer des politiques et des orientations sensées basées sur des bases solides, la première question à laquelle il faut répondre en ce qui concerne les NBT est : de quoi parlons-nous?
– Scientifiquement, qu’est-ce que les NBT, qu’est-ce que cela signifie en termes simples?
– Économiquement, quelles sont les attentes et ce qui est déjà connu à coup sûr?

– Sur l’environnement, y a-t-il une valeur ajoutée?

Today, the agri-food sectors are more than ever confronted with 3 major demands from our society:

  • –  To provide safe and quality food not only to European citizens but as well to world markets, having in mind the segmentation of these markets, considering both commodities, mid-range and premium markets. Each of them deserves to be considered.
  • –  To keep rural areas lively and viable. This means, first and foremost to maintain and develop a profitable farming activity in all rural areas across the EU. Agriculture is indeed the basis of any possible economic development. Can you build a house without solid foundations? No, indeed. Same story when it comes to economic development of rural areas.
  • –  To optimize the good management of the environment and to fight more effectively against climate change and risks linked to wider and wider spread diseases.Being able to answer jointly to these three challenges is for sure a challenge itself, but a feasible one, if you accept to make effective use of science and concentrate your efforts on double performance: economic performance and environmental performance.

    This is the very basic condition of any success of the EU and the EU agriculture to ensure both growth and job and more environment.

To reach this objective, we need to change our attitude, to live in our time and consider what science tells us, and not what some say that science could tell.

This is true when it comes to precision and smart farming and how policies can incentivize the move of the EU agriculture to a modern, a more eco-environmentally efficient agriculture.

This is true as well when it comes to genetics.

For more than a decade, the global productivity of the EU farming sector has halved. During this decade, the capital productivity of this sector has become negative. According to the EU Commission, this trend would result in a new decrease by 14% of the EU agri incomes in the next 10 years.

Should you accept this simply as a fate? For sure not.

Productivity of EU agriculture has been stagnating for years. It is time now to reinvest in innovation and research, to reinvest in genetics and develop a concrete science- based approach in that respect.

In this framework, objectivity and transparency will be key.

New breeding techniques are said to be promising as modern and faster extension of usual traditional breeding techniques.
But if the aim is to develop sensible policies and orientations based on solid ground, the first question to be answered when it comes to NBTs is: what are we talking about?

– Scientifically, what are NBTs, what does it mean in simple words?
– Economically, what are the expectations and what is already known for sure? – On Environment, is there any added value?

New Plant-Breeding Techniques in a nutshell

New Plant-Breeding Techniques (NBTs) are methods allowing the development of new plant varieties with desired traits, by modifying the DNA of the seeds and plant cells. They are called ‘new’ because these techniques have only been developed in the last decade and have evolved rapidly in recent years.

Moreover, as these practices are still continuously evolving, there is no limited set of techniques that can be put under the ‘umbrella term’ of NBTs.1 Based on assessments of the European Commission, the following plant-breeding techniques can currently be considered as the main NBTs:

1) Site-Directed Nucleases (SDN) (including ZFN-1/2/3 and CRISPR systems); 2) Oligonucleotide Directed Mutagenesis (ODM);
3) Cisgenesis;
4) RNA-dependent DNA methylation (RdDM);

5) Grafting (non-GM scion on GM rootstock); 6) Reverse breeding;
7) Agro-infiltration. 2

These New Plant-Breeding Techniques, which have emerged as the result of advances in scientific research, enable more precise and faster changes in the plant’s genome than conventional plant breeding techniques, which use chemical and radiation processes to alter the genetic characteristics of plants.3

As such, they have a significant potential for the plant breeding and agri-food industry, as they entail technical advances, economic savings and the improvement of crop characteristics.

First of all, NBTs have technical advantages compared to traditional plant breeding techniques. Some techniques (such as ODM and ZFN) allow site-specific and targeted changes in the genetic material of the plants, and for many of the techniques, the genetically modified code for the desired trait is only present in the first plant, but not in their offspring.

Secondly, NBTs have economic advantages, as the use of these techniques reduce the necessary time for plant breeding compared to conventional approaches (for which breeding can take up to 10 years), thus leading to lower production costs.

Crop improvements as a result of NBTs include the resistance of plants to diseases and drought tolerance, which can lead to higher yields, as well as higher nutritional qualities and storage or processing qualities.4

New Plant Breeding Techniques are currently in an uncertain situation regarding their legal classification, as there is considerable debate on how these practices should be

1 European Parliamentary Research Service, New plant-breeding techniques: Applicability of GM rules, 2016, p. 2.
2 European Commission, New plant breeding techniques, https://ec.europa.eu/food/plant/gmo/legislation/plant_breeding_en.

3 EPRS, op.cit., pp. 1-2.
4 Joint Research Centre of the European Commission, er the genetic characteristics of plants-the-art and prospects for commercial development’evJRC Scientific and Technical Reports, 2011.

regulated and whether they (or some of them) should fall within the scope of the EU GMO legislation. 5

Registration and certification of non-GM and GM seeds in the EU

Seeds, the main focus of New Plant-Breeding Techniques which aim at improving their genetic characteristics, are regulated in the EU by 12 Directives: Directive 2002/53/EC on the common catalogue for varieties of agricultural plant species and 11 sectoral Directives that govern the seeds of specific crop species (for beets, cereals, fodder plants, forest material, fruit plants, oil and fiber plants, ornamental plants, potatoes, vegetables, and wine).

The legislative framework for seeds is based on two elements:

1)  Registration of the seed varieties;

2)  Certification of the seed varieties before they can be sold on the EU market.

The general principle is that companies can register their new seed varieties in the national catalogue of one of the EU Member states, which needs to notify the Commission, after which the seed variety will be registered in the Common Catalogue of the EU.

Before registering the variety, the seed needs to be tested for 4 elements:

– Distinctiveness: it needs to differ clearly on, at least, one important characteristic from another registered seed variety;

– Uniformity: all resulting plants should be identical;
– Stability: the plant characteristics should remain in place over generations;
– For agricultural crops, the ‘Value for Cultivation and Use’ needs to be proven. 6

The first three elements are assessed through so-called DUS-tests (Distinctiveness, Uniformity, Stability), while agricultural plant varieties are subjects to additional VCU trials (Value for Cultivation and Use). The DUS-tests allow for the identification and description of varieties, while VCU trials test the agronomic performance of the plants resulting from the seeds, for instance on their yields. In order to be registered in the catalogue, the VCU tests need to show that the seed offers better results in terms of

5 EPRS, loc.cit.
6 Library of the European Parliament, Seeds and other plant reproductive material: towards new EU rules, 2013, pp. 2-3.

cultivation or use than other varieties that are available on the market. In general, DUS tests are conducted over a period of 2 years, while the VCU trials usually last between 2 and 3 years.

Before the seeds can be legally sold on the EU market, they also need to undergo a certification procedure, through inspections that verify and guarantee their identity, health and quality (for instance in terms of disease resistance). This is applicable to both seeds from inside the EU and seeds coming from outside the EU.

For most varieties, seeds are required to have multiplied over at least two generations (corresponding to around 2 years of control) and need to be sealed, labelled, sampled and tested to ensure that they meet the prescribed minimum standards. Seed certification costs usually account for 1 to 2% of the total production costs, which are mostly shared between the public authorities and the industry

For GM seeds, the legislation also requires the varieties to be authorised in line with the procedures outlined in GMO Directive 2001/18/EC before they can be included in the Common Catalogue and be sold on the European market. If the GM seed will also be used in food and feed, it has to follow the rules of Regulation (EC) 1829/2003 on genetically modified food and feed as well. As a result, the registration of GM seeds requires significant additional costs compared to non-GM seeds.

The authorisation process of “novel foods”

Novel foods are food or food ingredients that have not been consumed significantly within the European Union before 1997, when the first Regulation 258/97 on novel foods entered into force. It involves food from new sources; food obtained through new technologies (such as nanotechnology) or the use of new substances (for instance plant sterols), as well as food traditionally eaten outside of the EU (for example chia seeds). 7

A novel food requires a scientific safety assessment and an authorisation before it can be sold on the EU market, and must fulfil the following criteria in order to be authorised:

7 EFSA, Novel and traditional food: guidelines finalised, https://www.efsa.europa.eu/en/press/news/161110.

  • –  it must not pose a risk to human health
  • –  it must not be less nutritious if it replaces a similar food, and
  • –  it must be labelled to avoid misleading the consumers. 8Companies need to submit their applications for the marketing of their novel food to the relevant Member State authority, and are required to present several types of scientific data on the compositional, nutritional, allergenic and toxicological characteristics of the products, as well as information on the production process and the intended use. The authority can allow the marketing of the product if the Commission and other EU Member States do not object, and are also able to ask EFSA for an additional assessment. If a decision of the Commission is needed, it will ask the opinion of the Standing Committee on Plants, Animals, Food and Feed. 9

    The rules applicable to novel foods will be updated in 2018, with the entry into force of Regulation (EU) 2015/2283. Within this new regulatory framework, an authorisation procedure can be started by an interested party, a country of by the Commission itself. The Commission will have to possibility to ask EFSA for an opinion on the safety of the novel food and will also need the endorsement of the Standing Committee on Plants, Animals, Food and Feed.

    The legislation on novel foods does not cover additives, flavourings, extraction solvents, and most importantly, does not apply to GMOs – which are subject to Regulation EC 1829/2003 on GMOs for food and feed.

    So far, there have been around 180 applications for novel foods (7 to 10 applications per year), of which 80 have been authorised for use in the European Union. 10

    The average cost of submitting an application for novel foods is estimated at between €20 000 and €45 000, although based on the fees charged by the national authorities and the data requirements, the expenditures can vary between a few hundred to one million euro. The Novel Food Regulation also foresees the possibility of a simplified procedure for foods similar to existing products, for which the requested fee ranges from €900 to €2000. The average period between the application and the final authorisation is 2 to 4 years. 11

    8 European Parliamentary Research Service, Updating rules on novel foods to keep up with scientific advances, 2015, p. 2.
    9 EFSA, loc.cit.
    10 European Commission, Authorisations, http://ec.europa.eu/food/safety/novel_food/authorisations_en.

    11 European Parliamentary Research Service, Updating rules on novel foods to keep up with scientific advances, 2015, p. 3.

 

Main legislation

GMOs

  • –  Directive 2001/18/EC on the deliberate release into the environment of genetically modified organisms
  • –  Regulation (EC) 1829/2003 on genetically modified food and feed
  • –  For cultivation: assessments of the environmental risks, monitoring of the GMOs after their release, labelling and registration requirements, and public consultations.
  • –  For food and feed: authorisation; supervision; and labelling (if they contain more than 0.9% of GMO components).- Registration fee: up to € 90 000
    – Total costs of €6.8 million on average for the required data collection (has varied from €3.8 million to €10.3 million)
  • –  For cultivation: 3 years
  • –  For food and feed: 3 to 4 years

Seeds

– Directive 2002/53/EC on the common catalogue for varieties of agricultural plant species

– 11 sectoral Directives

– GM seeds also need to follow the GMO legislation: Directive 2001/18/EC and Regulation (EC) 1829/2003

– For registration:
* DUS tests: identification and description of the seed variety.

* VCU trials (for agricultural crops): to test the agronomic performance of the plants resulting from the seeds.

– For certification: inspections verifying and guaranteeing the identity, health and quality of the seeds; labelling; and tests of samples.

Registration:
– DUS tests: €90 – €2000

per year *
– VCU tests: €1000 –

€2550 per year *

Certification: 1% – 2% of total seed production costs *

* mostly shared or even fully paid by the public authorities

Registration:

– DUS tests: 2 years

– VCUtests:2to3 years

Certification: at least 2 years

Novel foods

– Regulation 258/97, which will be replaced by Regulation (EU) 2015/2283 from 2018 onwards

– Does NOT apply to GMOs, which are subject to Regulation (EC) 1829/2003 on genetically modified food and feed

Safety assessment and authorisation, requiring data on the compositional, nutritional, allergenic and toxicological characteristics of the products, as well as information on the production process and the intended use.

€20 000 – €40 000 (but can vary from a few hundreds to one million euro)

For the simplified procedure of novel foods similar to existing products: between €900 and €2000

2 to 4 years

Requirement s

Average costs for approval

Average duration for approval

Relevance of “New Techniques” application in EU agriculture

Given the enormous pressure that EU agriculture has to face, such as high population growth, climatic events and shrinking natural resources, the biggest challenge is how to meet increasing food demand (over 9 billion people by 2050), ensuring a high rate of productivity, without impacting the environment.

In this overall alarming context, the use of some of these NBTs can play a key role in allowing plant breeders to introduce in an efficient way, very precise, targeted genetic modifications, which have the capacity to fasten the selection speed. In other words, this translates into: low cost, ease of use and speed up of innovation processes, when compared with conventional plant-breeding techniques. Furthermore, NBTs are not only a valuable option for breeders, but these modern biotechnologies also allow to develop plant varieties that can adapt to climatic changing conditions.

To summarize, NBTs’ potential application in agriculture and food systems12 can be identified in:

  • Precise and rapid alteration of crops to boost yields (genetic engineering is more predictable than conventional approach, given the targeted way through which direct modifications of an organism’s own genetic sequence are inserted)
  • Improved crop & vegetable resource efficiency
  • Reduced inputs needs
  • Plants with herbicide tolerance
  • Plants with pest or insect resistance
  • Plants with drought or flood resistance (climate change resilience)
  • Enhanced nutritional quality of food crops
  • Changes in composition of nutrients in plants (i.e. vitamins or fatty acids)
  • Food crops with reduced allergenicity (for example wheat without gluten)
  • Increased fruit and vegetable shelf-lifeFocusing on the health-safety dimension, as highlighted by the SAM-HLG explanatory note “an assessment of safety can only realistically be made on a case- by-case basis and depends on features of the end product including:
    unintended and intended effects, the species, the environment in which the product is used, the agricultural practice in question, the intended use and the exposure”.

    12 European Parliamentary Research Service, New plant-breeding techniques: Applicability of GM rules, 2016 p. 2

Accordingly, NBTs should go hand in hand with good agricultural practices. This means that the potential benefits of these new techniques should be further evaluated by considering their complementarity to the conventional farming methods.

Positions of experts, EU institutions and Member States on NBTs High Level Group of the Commission’s Scientific Advice Mechanism (SAM)

In October 2007, upon the request of the EU Member States, the European Commission set up an expert working group composed of nationally appointed scientists, in order to assess whether or which NBTs should be regulated by the GMO legislation. The working group examined the following techniques: ODM, ZFN, cisgenesis and intragenesis, grafting, agro-infiltration, RdDM, reverse breeding and synthetic genomics. 13

The working group completed its work in 2012, but the final report was never released due to a lack of consensus among the members. While the experts unanimously agreed that plants developed through cisgenesis and intragenesis should fall under Directive 2001/18/EC, opinions were still pending on the regulatory status of the remaining NBTs. 14

On April 28, 2017 the SAM-HLG released its explanatory Note in response to the request, formulated in the Scoping Paper (adopted by the HLG on 25 November 2016), by the European Commissioners for Health and Food Safety, Vytenis Andriukaitis and for Science, Research and Innovation, Carlos Moedas to provide an up-to-date overview and a comprehensive scientific comparison on new techniques in agricultural biotechnology, including their potential agri applications in both fields of synthetic biology and gene drives, considering the key characteristics of each of these new techniques.

The Note underlines, among the other, that:

• “All living organisms are subject to alterations to their genetic information due to molecular processes which can occur spontaneously and due to exposure to environmental stressors”.

• “All breeding techniques applicable in agriculture (conventional breeding techniques, CBT; established techniques of genetic modification, ETGM; and new

13 European Commission, loc.cit. 14 EPRS, op.cit., p. 4.

breeding techniques, NBT) make use of genetic diversity and change whether naturally occurring or resulting from human intervention, in order to select or generate plants, animals or microorganisms that exhibit preferred characteristics”.

• “There is heterogeneity within the NBT, and some similarities between some NBT and some CBT and some ETGM, and this is reflected in the variety of end products which can result from the employment of NBT. These similarities and differences relate to 1) molecular mechanisms; 2) the size, location and frequency of the resulting genetic changes (precise and intended vs. imprecise and unintended); 3) the extent to which ETGM are employed in NBT; and 4) the presence or otherwise of exogenous nucleic acids (DNA or RNA) in intermediate and end-products. These factors affect among others the extent to which the genetic changes are detectable”.

• “The genome editing subset of NBT can produce precisely located alterations to DNA sequences, ranging from ‘point mutations’ (changes of one or a few nucleotides, which may be either random or specified) to the insertion of (endogenous or exogenous) genes. Other NBT, such as RNA-dependent DNA methylation (RdDM) make no changes to DNA sequences at all”.

• “The end products of NBT may or may not contain exogenous DNA depending largely on the technique(s) employed. The development of an end product that involves the use of NBT may additionally use ETGM in one or more intermediate steps (e.g. in genome editing, RdDM), agro- infiltration, etc.), and as a consequence, exogenous nucleic acids may be present in intermediate products but not necessarily in the end product”.

• “This variety and versatility of NBT explains why comparisons between NBT and CBT, and NBT and ETGM, in the Note are only made where relevant, and suggests that grouping techniques together as NBT may not be optimal for scientific or other reasons”.

• “Differences between the groups of techniques (CBT, ETGM, and NBT), of relevance to unintended effects and efficiency, depend on the extent to which changes can be targeted, and how precisely they can be made. Changes made with CBT, in particular by mutation breeding in plants, require the screening of a large population in which changes have been randomly induced and the selection of desirable progeny. ETGM and NBT by contrast do not require such extensive screening as pre-defined changes are made to defined genetic sequences or to gene expression”.

• “ETGM and NBT differ in the extent to which they produce ‘unintended effects’. Unintended mutations do not however always have phenotypic effects, and not all phenotypic effects are detrimental”.

• “Random insertion of nucleic acids is characteristic of the employment of ETGM in plants and animals, and multiple insertion events can also occur at untargeted and therefore uncontrolled genetic locations. By contrast, the NBT of genome editing offer not only the ability to target insertions (resulting in comparatively fewer unintended effects on the expression of other genes or their disruption) but also the ability to make small, precise and specific changes, such as point mutations, which can also be observed in nature. The employment of the NBT of gene editing does not exclude ‘off-target’ effects, where a precise change is made to a genetic sequence identical or similar to that in which the change is desired, but in another location. By contrast with unintended effects resulting from ETGM and CBT, NBT off-target effects are rare, and in general, the frequency of unintended effects in NBT products is much lower than in products of CBT and ETGM”.

• “The precision available from the employment of NBT and efficiency of their use means that some products can only be realistically obtained with the use of these techniques and not through the use of CBT or ETGM. The issues of unintended effects due to NBT (and in particular, genome editing related off-target effects) are the subject of much research at present as evidenced by the rapidly growing number of publications in the field”.

• “The Note makes qualitative statements about the relative costs and speed of product development. The speed with which mutations can be introduced using NBT is often higher (in particular when using the CRISPR-Cas genome editing system) than that which can be achieved with ETGM and CBT, mainly due to the reduced need for time-consuming screening procedures and/or back-crossing, with correspondingly lower costs. The time and costs related to subsequent regulatory approval are not within the scope of the Note”.

This independent explanatory note, as also specified in the Scoping Paper, does not take a position; it does not cover legal issues and it does not make policy recommendations to policymakers.

The European Food Safety Authority (EFSA)

The European Food Safety Authority (EFSA) has published opinions on two specific types of NBTs and their safety assessment, namely on plants developed by cisgenesis and intragenesis, and on the Zinc Finger Nuclease 3 technique. EFSA concluded that the existing rules on risk assessments for GMOs are appropriate for cisgenic and intragenic plants, as well as for the ZFN-3 technique.

In its opinion on cisgenesis and intragenesis, EFSA argued that cisgenic plants have similar risks than plants bred with conventional breeding techniques, but that intragenic (and transgenic) plants can involve additional risks. It notices that all of these breeding techniques can produce ‘variable frequencies and severities of unintended effects’, which cannot be predicted beforehand and need to be assessed on a case-by-case basis. In general, however, such unwanted genetic traits can be removed by breeders during the selection and testing phases. EFSA concludes that the risks of these NBTs for human and animal health will depend on factors such as the extent to which the plant is cultivated and consumed. 15

In its opinion on Zinc Finger Nuclease 3, EFSA found that this technique can minimise the risks of genetic disruption compared to the currently used transgenesis methods, as it allows a more precise insertion of DNA into a defined area of the plant genome. These techniques would also involve less olve less invchanges in the plant genes than most mutagenesis techniques, and when these changes do occur, they would be similar to those produced by conventional breeding techniques. 16

The Joint Research Centre (JRC)

In 2011, the Joint Research Centre (JRC) of the European Commission published a report on ‘New plant breeding techniques: State-of-the-art and prospects for commercial development’, which includes an assessment of the intended and unintended changes and effects of NBTs.

The JRC concludes that it is currently impossible to identify the genetic modification for plants bred with the following NBTs: ZFN-1 and 2, ODM, RdDM, grafting, reverse breeding and agro-infiltration. On the condition that information on the introduced DNA is provided, it is however possible to identify the genetic modifications created through ZFN-3 technology, cisgensis/intragenesis and floral dip. Without any prior knowledge on the DNA introduced by the NBT, it is not possible to identify genetic modification in the modified plants.

The European Parliament

On 25 February 2014, the European Parliament issued a resolution on ‘Plant breeding: What options to increase quality and yields?’, in which it stressed the importance of developing and using NBTs that respond to societal and agricultural demands and being open to the new technologies available. The Parliament also

15 EFSA, 退 Scientific opinion addressing the safety assessment of plants developed through cisgenesis and intragenesisn, EFSA Journal, Vol. 10, No. 2, 2012.
16 EFSA, 退 Scientific opinion addressing the safety assessment of plants developed using Zinc Finger Nuclease 3 and other Site-Directed Nucleases with similar function’, EFSA Journal, Vol. 10, No. 10, 2012.

expressed concerns over the delayed regulatory assessment of NBTs and called on the Commission to clarify their legal status as a matter of urgency. 17

France

In France, the Environmental Code excludes organisms obtained through mutagenesis from the GMO regulation through Article D.531.2. Nine organisations and trade unions have challenged the legality of this article and requested its repeal to the Prime Minister, who in turn has requested the Council of State (Conseil d’Etat) to repeal the article and pronounce a moratorium on herbicide-tolerant plant varieties obtained through mutagenesis.

On 3 October 2016, the Council of State referred 4 questions to the European Court of Justice (CJEU), related to whether a variety of herbicide-resistant rapeseed obtained through New Plant Breeding Techniques should follow the GMO approval process. These questions especially address the NBTs of ODM (oligonucleotide directed mutagenesis) and SDN (site directed nuclease), and revolve around the following issues:

1) Do organisms obtained through mutagenesis constitute GMOs, and are they therefore subject to the rules of Directive 2001/18/EC on the deliberate release into the environment of genetically modified organisms? Or are these organisms, or some of them, exempted from the precautionary measures, impact assessment and traceability requirements included in this Directive?

2) Do varieties obtained through mutagenesis constitute ‘genetically modified varieties’ subject to the rules laid down by Directive 2002/53/EC on the common catalogue of varieties of agricultural plant species, or are they exempted from the obligations laid down in this Directive?

3) If organisms obtained through mutagenesis are excluded from Directive 2001/18/EC, does this mean that EU Member States are not allowed to subject these organisms to the obligations laid down by the Directive, or do they have a margin of appreciation to define the regime applied to these organisms?

4) Does the precautionary principle, guaranteed by Article 191.2 of the TFEU, call into question the validity of Directive 2001/18/EC? Should we take into account the evolution of genetic engineering processes, the emergence of plant varieties obtained through these techniques and the current scientific uncertainties about their impacts and the resulting potential risks for the environment and human and animal health?

17 European Parliament, Resolution on iament, ressing the safety assessment of plants developed usin, 2014, p. 6.

The Council of State will rule on this matter after receiving the opinion of the Court of Justice, which is now foreseen on the 20th of December 2017. 18

On 29 March 2017, the French Parliamentary Office for evaluation of scientific and technological options (OPECST)19 – assisted in its work by a Scientific Committee – issued a report on “the economic, environmental, health and ethical challenges of biotechnology in the light of new research tracks”, which adopts an holistic perspective on the topic, by examining research in biotechnology, applications of new biotech to human medicine, to the environment, agricultural applications (NBTs), legal and security issues as well as risk assessment and public discussion.

The Report was published after more than a year of study. The overall process gathered a wide variety of actors: from scientists, doctor and academics, to politicians, industries and representatives of civil society.

Having developed this holistic approach, “the rapporteurs support the development of new breeding techniques, which will happen in any case outside Europe”.

The rapporteurs call for greater priority to be given to research in this area and decisions to be taken to avoid EU researchers and companies to relocate and so the EU and its Member States to lose ground at global level on this key economic sector.

Regarding the potential role of new breeding techniques applied to agriculture, the rapporteurs, after consultations with scientific experts, concluded that :

  • –  “New Plant-Breeding techniques should be considered on a case-by-case basis to fully understand the impact of a new genetic trait on the environment”;
  • –  “Targeted genome modifications techniques could have revolutionaryapplications in agriculture, as consisting in the very precise introduction of genetic traits, which enable to accelerate the selection speed. Furthermore, they could occur naturally and are virtually undetectable”;
  • –  “NBTs are complementary to the other agroecology methods. They can be appropriate for both big and small producers”18 Feed Navigator, France asks ECJ to decide if plants from new breeding techniques are GMOS, http://www.feednavigator.com/Regulation/France-asks-ECJ-to-decide-if-plants-from-new-breeding- techniques-are-GMOs.
    19 OPECST, which was set up by Act n° 83-609 of July 8, 1983, following a unanimous vote of the French Parliament, aims  » to inform Parliament of scientific and technological options in order, specifically, to make its decisions clear « . OPECST  » collects information, launches study programmes

and carries out assessments ». More details available here: http://www.assemblee- nationale.fr/11/documents/index-oecst-gb.asp

Overall, the rapporteurs specify that “new breeding techniques are not GMOs within the meaning of the EU Directive 2001/18” and that “assessments must be adapted to the risks involved”.
With regard to the public opinion dimension, and by recognizing the difficulties that the process would involve, they consider necessary to engage the public in a renewed debate on these new biotechnologies, “even if they are still at an experimental stage”, by adopting a multidisciplinary approach.

Germany

On Thursday 24 November 2016, Minister of Agriculture Schmidt (CDU/CSU) announced that the Federal Government adopted a draft amendment to the Genetic Engineering Act (18/10459). Under the proposal, organisms obtained through new breeding techniques are not necessarily regarded as GMOs; whether the techniques would fall under the Genetic Engineering Act or not would be assessed on an individual case-by-case basis, and will be both process- and product-related.

The views on NBTs also remain highly divided within the German government. For instance, a legal analysis commissioned by the German Federal Agency for Nature Conservation concludes that the organisms produced by NBTs fall under the scope of Directive 2001/18/EC. The analysis based this judgement on the fact that genetic modifications are carried out purposefully by NBTs and lead to changes in the organisms which do not occur naturally. 20 Meanwhile, the German Federal Office of Consumer Protection and Food Safety argues that certain techniques – ODM and CRISPR-Cas9 – do not constitute GMOs in the sense of the Directive, because the modifications can also be generated through conventional mutagenesis techniques and cannot be distinguished from them. 21

Other EU Member States

Opinions on the legal status of the various NBTs also differs widely between other Member States and their national government agencies.

In 2015, the Board of Agriculture of Sweden announced, after questions from Swedish researchers, that some Arabidopsis plants that were developed using the CRISPR-Cas9 technology do not fall under the EU definition of a GMO and thus fall outside the scope of the Directive.

20 German Federal Agency for Nature Conservation, Legal Analysis of the applicability of
Directive 2001/18/EC on genome editing technologies, 2015.
21 German Federal Office of Consumer Protection and Food Safety, Opinion on the legal classification of New Plant Breeding Techniques, in particular ODM and CRISPR-Cas9, 2016.

In the United Kingdom, the Advisory Committee on Releases to the Environment indicated that only plants obtained through cisgenesis and intragenesis should be recognised as GMOs. On the contrary, the Commission on Genetic Modification (COGEM) of the Netherlands has argued that cisgenic plants should be exempt from the GMO Directive, as this technique only inserts genetic elements from the same or cross-compatible plant species.

Furthermore, the crop development company Cibus has also asked six countries for their opinion on the ODM technique, namely Finland, Germany, Ireland, Spain, Sweden and the United Kingdom. All of these Member States told Cibus that they do not consider the ODM-technique to lead to a GMO as defined by EU legislation.

ANNEX: Short explanations of technical NBT terms

1) Site-Directed Nucleases (SDN)

SDN refers to the general technology of using a DNA-cutting enzyme (nuclease) to generate a targeted break in the DNA. The aim is to take advantage of the DNA break and the plant’s natural repair mechanisms to introduce targeted changes in the plant characteristics.

The various applications of SDN are usually called SDN-1, SDN-2 and SDN-3, depending on the specific DNA break and repair process. Examples of SDN techniques include Meganuclease (MN), Zinc Finger Nuclease (ZFN), Transcription Activator-Like Effector Nucleases (TALENs) and Clustered Regularly Interspaced Short Palindromic Repeat (CRISPR).

2) Oligonucleotide Directed Mutagenesis (ODM)

The ODM technology uses a site-specific oligonucleotide (an organic molecule that forms the basic building block of DNA) to cause a specific single-base change to one or only a few bases of the DNA. The oligonucleotide is identical to the DNA sequence in the plant, except for the single base-pair change. The plant cell will repair this ‘mismatch’ by incorporating it into its own DNA sequence, resulting in a desired specific change in the plant’s genome (the oligonucleotide is degraded by the cell after a short period of time).

3) Cisgenesis/Intragenesis

Cisgenesis and intragenesis refer to the introduction of a DNA fragment into a plant that is derived from the same or closely related species, in order to transfer useful genes.

While cisgenesis refers to the introduction of whole unchanged genes, intragenesis uses a new combination of DNA fragments taken from the species itself or from compatible plant species. As such, only cisgenesis can achieve results that are also possible through traditional breeding methods (although in a much shorter time period), while it also entails less risks for unintended effects than intragenesis.

4) RNA-dependent DNA methylation (RdDM)

RdDM uses epigenetic processes to change the activity of targeted genes without changing the DNA itself. As such, it regulates the gene expressions induced by developmental or environmental changes, for instance drought resistance when plants are exposed to drought conditions. These changes in plants are mediated by small interfering RNA (hence the name RNA-dependent methylation), and may persist for a number of generations, after which the effect will gradually fade away.

5) Grafting (non-GM scion on GM rootstock)

Grafting involves attaching a non-genetically modified scion (the upper part of the plant) onto a genetically modified rootstock. Examples include fruit trees, grapes, tomatoes, cucumbers, and roses.

6) Reverse breeding

Reverse breeding is a method in which the order of events leading to the production of a hybrid plant variety is reversed. The resulting hybrid plant is genetically similar to the original plant and does not contain foreign DNA.

7) Agro-infiltration

Plant parts, mostly leafs, are inserted in the plant through liquid Agrobacterium tumefaciens in order to transfer desired genetics or genetic expressions to the genome of the plant. The response of the plant is monitored to select plants for further breeding. This technique is mainly used to create resistance for crops against diseases.

Chaîne alimentaire, nutrition et bien être. Appel à une cohérence dans l’UE

NOTE POLITIQUE

Chaîne alimentaire, nutrition et bien être. Appel à une cohérence dans l’UE

 

Le modèle agroalimentaire européen évolue et s’améliore constamment, et sa relation avec les problèmes de santé devient de plus en plus importante. Habituellement, cette relation est généralement perçue en termes négatifs, ou du moins de manière unidirectionnelle – problèmes de nutrition. Une grande partie des discussions autour de cette question sont polarisées, stériles et fondées davantage sur des opinions que sur la science. Dans l’agenda politique européen actuel, deux questions doivent être gardées à l’esprit: la réforme de la politique agricole commune et le bilan de qualité de la législation alimentaire générale, tant que le binôme alimentation et santé autre présent. Farm Europe veut contribuer à ce sujet avec les commentaires suivants et les questions ouvertes, afin de proposer des propositions concrètes et essayer de trouver le chemin vers un cadre plus vertueux et plus complet.

INTRODUCTION.

The European agro food model is constantly evolving and improving, and its relationship with health issues is becoming growingly important.

Usually this relationship is perceived mostly in negative terms, or at least in a quiet unidirectional way – nutrition issues-, putting aside other elements as important as culture and traditions, sociology, employment and economics, internal market principles, environment, genetics, lifestyles… On the other hand, the contribution of food to the European socio- economic development and wellness in the last decades cannot be neglected.

Much of the discussions around the issue are quiet polarized, sterile and more based in opinions than in science, which doesn’t help any progress on what can be considered the common goal: how to better integrate food and health for the benefit of consumers and society as a whole.

In the current European political agenda, two issues under discussion should be kept in mind – the reform of the Common Agricultural Policy and the Fitness Check of the General Food law – as long as in both ́food and health ́ binomial would be one way or the other present.

It is also worth noting the growing importance of International Organisations and its implications in the European internal debates on this issue.

Farm Europe wants to contribute to this topic with the following comments and open questions, in order to come up with concrete proposals and try to find the way to a more virtuous, comprehensive framework.

THE ISSUES

A . Numerous initiatives, poor results .

It is far more than evident the key role that food and drink plays in human health. It is like a two- lane highway in which one provides life; the other can have a negative impact on health. In order to prevent this negative effects (NCD ́s) public authorities try to promote different policies and actions with a dubious impact.

If we make a short overview of measures in place, those are the most relevant:

When it comes to public intervention, instruments are rather restrictive, and applied in different areas:

  • –  Commercial communication,
  • –  Taxes,
  • –  Advertising,
  • –  Points of sale,
  • –  Labelling,
  • –  Nutrition profiles
  • –  Nudge conceptThere are also voluntary agreements and codes of conduct, both at European and national level, reaching issues like:- reformulation of products ( 2016 Council resolution on product improvement and similar national initiatives ),

    – advertising ( i.e. SpiritsEUROPE Guidelines for the Development of Responsible Marketing Communications ),

    – labelling ( private schemes), …

    The point here is: to what extent this approach has been effective in practical terms?

If we put it into an European perspective, we have to realise that we participate in a sort of “collage” of measures, mixing European and national initiatives, in different areas, with different aims and ways, that need to be reconsidered – sometimes , politics is stronger than evidence.

A lot of examples can be shown in this sense:

  • –  national taxes on different products, mainly sugar and fats , distorting trade and competition in the markets.
  • –  Prohibition of sales in selected points ( canteens, schools,..).
  • –  Limits to advertising in tv and other media.
  • –  UK traffic lights system as well as French Nutriscore model.
  • –  Minimum Unit Pricing for alcoholic beverages in Scotland and Ireland,…Internal market principles – the basis of European integration –have been sidelined with direct impact on business, free circulation, competition and consumer welfare.It is quite clear that at European level health is a joint responsibility which ultimately rests in the hands of Member States, but there’s a need for a more coordinated, harmonised approach to get out form this messy situation.

    On the other hand, the Commission and it’s Services as guardian of the Treaty should strictly monitor wether all the Member States correctly apply and implement community law , avoiding the breach of the common rules.

    B. Evidence based science loosing ground with respect to opinion.

    Second issue or point for discussion, Science. It has to be acknowledge the improvements made in terms of food safety in Europe in the last 15 years. Both EFSA and the Commission have delivered a sound set of criteria that have created a strong consensus around the best science to inform food safety – and a comprehensive system to evaluate and manage risks. But in the last years , food safety has been replaced in the debate by nutrition and in this case we have to admit that the system developed for food safety has proven not to be fit for “health issues”. On the contrary, the general consensus has been replaced by divergence of scientific criteria, lack of trust in the institutions and the system itself, and confusion.

Science is top priority. Science is critical not only because it leads the way for improving human wellbeing, but also because evidence based science orients political action – or at least should-.

On the other hand, science is far more than a single discipline. The present “nutrimania” simply puts aside other fields of knowledge like sociology, genetics, physical activity or environment, while multifactorial problems need multidisciplinary approaches. Even when it comes to nutrition focus is more on products (“good” or “bad”) than in diets itself. And as a matter of fact “ we eat food, not nutritiens”.

Having said that, the question would be how can Europe improve its decision making in order to take any political action on evidence based science? How can we avoid science to be substituted by opinion when informing political and legal decisions?

Unfortunately, in recent times we have had also some examples that show how complex and confusing some issues can be:

  • –  the case of bisphenol A ,
  • –  Endocrine disruptors ,
  • –  Glyphosate …First of all we need more confidence in our institutions. EFSA must continue to be respected as the reference for excellence in science and food and at the same time, it must be able to better coordinate national Agencies in his effort to align criteria and inform action.Second and most important, how can we provide European Parliament with fundamentals to guide its legislative action? Its critical responsibilities ought to be backed with the best available science in order to help the decision making process.

    An idea would be to promote the creation of an Office for Scientific Support under the umbrella of the EP, and the cooperation of the Commission and EFSA. This Office / Unit would have the task of helping MEP ́s in taking their decisions with independent, neutral and comprehensive state-of-the art science.

    The basic idea is to provide MEP ́s with objective interpretative skills, a critical set of knowledge they need. The role of the Unit would not be to “make science” but to select the best available and be able to provide some objective assessment to help MEP ́s to better decide. At the same time it could promote independent debates, educational activities, hearings etc. so as to cooperate with stakeholders, journalists, scientists..

So progressively, a set of principles/ consensus/ basic ideas would be shaped and what is more important, a “triage” or rating of scientific production would be created according to its evidence, origin of publication, degree of support by the scientific community, etc.

Collaboration with other initiatives already in place like STOA (Scientific & Technical Options Assessment) in the EP and the Scientific Advice Mechanism set up by the Commission should also be enhanced.

C. Public opinion misperceptions.

A third issue is public perception. There is a growing misperception in public opinion around food, drink and health issues. The post-truth era is emphasising almost only negative facts or promoting magic wand nutrients. Misinterpretation of complex information and a great deal of news and sources (social media) makes really difficult to avoid confusion and distress in the public opinion spreading a bad and fake image around food.

How can this public image problem be avoided?

First of all, it has to be said that this is a common responsibility. As already stated, a more powerful role and respect to EFSA as scientific reference, and more active communication on its side would be needed. On the other hand, the Office for Scientific Support in the EP would also help in making the difference between opinion and science.

Lastly, Media have also its crucial role in laying down the foundation of a better informed and educated consumer, along with scientific bodies, ngo’s, agro food and consumers organisations, whose responsibility towards a sound, fact- based communication is also important.

D. The need for a common ground.

Finally, the issue of cooperation. The way in which debate takes place is not the most constructive one, it seems that each stakeholder sticks to its own position being more interested in counter-arguments and defending specific interests that in finding ways to progress against NCD ́s through cooperation.

Something has to be done. If we agree on the issues highlighted in this paper it can be assumed that there is a need for action.

In fact experience shows us that there is no “one-size-fits-all” effective solution, that demonising food and drink is not only counterproductive but unfair, and that something has to be done in order to overcome defensive positions.

So is there any possibility to improve cooperation and bring together all interested parties?

We think that if we give the lead to the European Parliament, there is an opportunity to open a debate with all stakeholders and get a broad agreement on common objectives: a better and sound healthy lifestyle in Europe, and a firm contribution from the food chain – it is crucial to understand that this is a common issue in which all the members of the chain ( farmers, industry and trade ) must work together and united.

This debate should lead to a set of compromises and guidelines based on science, responsible behaviour and concrete compromises for each and one of the stakeholders as a way to cooperate under clear rules, and measurable actions.

TOPICS FOR DISCUSSION

Apart from the measures proposed, the following questions are open for debate:

– What do we expect from private stakeholders? What role could they have or shouldn’t they have in a European process of thinking, concertation and decision making?

– What role can be expected from the food chain? What kind of commitments can be taken by producers, industry and retailers and consumers organisations?

– How can the EU better participate in international and global debates?

– How can you make sure that EU decisions will be based first and foremost on science whatever the inputs of national, European or international forum can be?

– How can the European institutions and notably the European Parliament (as elected representative of EU citizens) lead the way to a common action with all the stakeholders involved?

Why the sub-mentioned initiatives regarding improving health and nutrition are not either operational or on the contrary efficient ?

UNE VISION DE L’AVENIR DU SECTEUR AGRO- ALIMENTAIRE EUROPÉEN

NOTE POLITIQUE

UNE VISION DE L’AVENIR DU SECTEUR AGRO- ALIMENTAIRE EUROPÉEN

POUR UN SECTEUR AGRO-ALIMENTAIRE AUX DIMENSIONS DE L’EUROPE

Le secteur agro-alimentaire européen est à un carrefour de son histoire. Il a subi une succession de crises, une décennie de stagnation des revenus, un déséquilibre de la chaîne de valeur et, dans le même temps la société exige que l’on en fasse toujours plus pour protéger l’environnement et assurer une alimentation saine et nutritive.

Si le secteur veut sortir de ses difficultés actuelles, tout en répondant aux attentes sociétales et en renouant avec la prospérité, il lui faut dessiner une vision de l’avenir.

Cette vision doit s’appuyer sur ce qui a déjà été fait, sur un examen approfondi des défis actuels, puis poser les fondements d’un avenir qui conjugue croissance et durabilité économique et environnementale.

Depuis un demi-siècle, l’agriculture dans l’Union européenne a été façonnée et soutenue par la Politique Agricole Commune. Le destin de ce secteur est intimement lié aux orientations et à la force de la PAC.

Le débat sur l’avenir de la PAC ne peut donc pas faire l’économie d’une réflexion sur l’avenir souhaité pour ce secteur. Pour avancer sur le sujet, la bonne démarche est de

passer en revue les réussites de cette politique ainsi que ses insuffisances pour enfin dégager des pistes de progrès.

Il est urgent que le secteur se dote d’une vision globale traduite par un ensemble cohérent de mesures politiques. Sans cette vision, et sans cet ensemble de mesures cohérentes inscrites dans la PAC, il sera difficile de sortir du marasme actuel.

Demeurer dans le statu quo rendra le métier d’agriculteur de moins en moins attrayant pour les jeunes générations, diminuant le renouvellement agricole ainsi que le niveau d’entreprenariat. De sombres perspectives d’avenir diminueront l’investissement, les exportations baisseront et les importations augmenteront, la croissance sera plus faible et cela nuira à l’emploi. L’environnement se dégradera à mesure que les zones rurales seront désertées, et les agriculteurs auront davantage de difficultés à investir dans la production agricole tout en répondant aux défis du changement climatique.

Ce scenario catastrophe peut être évité et il faut qu’il le soit. Une version modernisée de la PAC pourrait et devrait avoir les moyens de construire un avenir meilleur. Il est grand temps de prendre les choses en main et de présenter à la société au sens large une vision solide de l’avenir.

ATTENTES SOCIETALES

La société désire davantage d’emplois et de croissance, une meilleure protection de l’environnement, une alimentation nutritive et saine, ainsi qu’un équilibre territorial ne laissant aucune région de côté.

Nous devons créer davantage d’emplois et générer de la croissance, mais le dilemme auquel le secteur agro-alimentaire est confronté est que l’agriculture est en train de perdre des emplois et que les revenus stagnent.

Cela n’est pas une fatalité. Il est possible, et même nécessaire de ramener le secteur agricole sur la voie de la croissance. Pour ce faire, il nous faut adopter les bonnes mesures. N’oublions pas que seule la croissance peut générer des emplois pérennes.

Les créations d’emplois et la croissance peuvent aller de paire avec l’augmentation de la productivité et de la compétitivité. Produire davantage à partir de ressources moindres ne mène pas nécessairement à des suppressions d’emplois car la croissance de l’ensemble du secteur peut générer davantage d’emplois qu’elle n’en supprime.

Nous devons encore progresser dans la protection de l’environnement. La PAC actuelle introduit un changement de paradigme par rapport aux politiques antérieures car elle place l’environnement au centre des mesures de conversion écologique. Mais cette conversion s’accompagne d’une réglementation lourde et très contraignante qui ne permet pas de valoriser les résultats atteints par les agriculteurs.

Il nous faut réduire la pollution des eaux générée par les intrants apportés en excès et, mettre un terme à la dégradation des sols, réduire les effets négatifs des pesticides sur la biodiversité, limiter nos pratiques non durables.

Le secteur doit répondre et s’adapter aux accords historiques sur le changement climatique conclus à Paris, ainsi qu’aux objectifs fixés par l’Union européenne.

L’Union européenne a également pris des engagements dans le domaine du développement durable dont un grand nombre sont directement liés à l’agriculture, comme par exemple l’objectif visant à éradiquer la faim dans le monde et l’engagement de protéger la planète de toute dégradation, la lutte contre le réchauffement climatique, ou encore l’enjeu de maitrise des émissions et du stockage du carbone.

Les agriculteurs peuvent être au rendez-vous et ils y seront si les bonnes incitations sont mises en place. Les nouvelles technologies peuvent jouer un rôle considérable dans la transformation de l’agriculture en une activité environnementale durable.

Il faudrait que tous comprennent bien qu’il est dans l’intérêt à la fois du secteur agro- alimentaire, et de la société au sens large, d’avoir une population agricole dynamique, avec un véritable avenir en tant que secteur d’activité, une communauté formée d’entrepreneurs, capables d’investir, de s’adapter et prenant une part croissante à la protection de l’environnement.

Les agriculteurs sont les gardiens effectifs de l’environnement. Sans eux, sans leur action, aucune mesure de protection n’est crédible.

Nous devons continuer à produire une nourriture saine et de qualité. L’Union européenne est au premier rang mondial pour la qualité et la sécurité alimentaire. L’UE a les normes les plus exigeantes et il n’est pas question de remettre cela en cause.

Nous devons respecter un équilibre territorial. La société ne peut accepter que les régions intermédiaires et les zones les plus fragiles déclinent et finissent par être abandonnées.

Les politiques de développement rural qui constituent le second pilier de la PAC ont contribué à inverser ces tendances négatives mais il faudrait faire davantage pour redonner vie aux régions les moins bien dotées ou les plus éloignées des centres économiques où se trouve l’essentiel de la consommation.

LES DEFIS A RELEVER

Cela fait des décennies que la PAC nous fournit un cadre commun, un ensemble de règles et de ressources qui ont fortement aidé au développement de l’agriculture de l’UE.

Les dernières réformes de la PAC ont cherché à améliorer la compétitivité de l’agriculture de l’UE sur la scène mondiale. La désindexation des aides sur les prix a visé à rétablir une logique de marché, les paiements directs jouant un rôle indispensable en matière de revenus agricoles en Europe aujourd’hui. Les programmes de développement rural sont quant à eux importants pour venir en aide aux régions fragiles. La politique s’est également mise en phase avec d’autres objectifs politiques importants – la protection de l’environnement, la sécurité alimentaire, le bien-être animal.

La question n’est donc pas de décider si la PAC doit être poursuivie pour venir en aide au secteur agro-alimentaire et à la société dans son ensemble. Il s’agit davantage de décider des changements à introduire pour lui permettre de répondre aux besoins actuels et à venir.

Il s’agit d’apporter une réponse efficace aux problèmes et déficiences identifiés et qui entravent l’avenir du secteur agricole européen.

La volatilité des prix a augmenté, du fait d’une plus grande ouverture et d’une intégration croissante aux marchés mondiaux. Le changement climatique s’est également traduit par des événements extrêmes qui affectent la production et les marchés, contribuant à renforcer la volatilité.

La volatilité des prix est devenue une norme, l’amplitude de la volatilité des prix, sur la période 2004-2016, 87% pour les céréales, 62% pour le porc, 51% pour le lait, et plus de 400% pour les légumes.

La volatilité des revenus s’est elle aussi accrue. Au moins 20% des agriculteurs connaissent chaque année une perte de revenus supérieure à 30%.

Plusieurs marchés ont récemment connu une profonde crise. La crise laitière a duré un an et frappé des millions de personnes. Ce fut aussi le cas des producteurs de fruits et légumes et des éleveurs de porcs. La production bovine souffre quant à elle d’une crise de longue durée.

Il n’est pas surprenant que les revenus des agriculteurs connaissent une stagnation. Ces dix dernières années, le revenu global des facteurs de production a stagné. Le revenu du capital et des facteurs de production a chuté de manière significative, de plus de 10%.

Au sein de la Commission européenne, la DG AGRI prévoit une décennie supplémentaire de stagnation des revenus et une baisse supplémentaire de 14% du revenu agricole global en valeur réelle. Les conséquences seraient rudes pour l’Union européenne car un déclin de l’agriculture affecterait l’ensemble de l’industrie manufacturière

Le secteur accuse un déficit d’investissement productif, une certaine timidité dans le recours aux nouvelles technologies, ainsi qu’un retard en matière d’innovation.

Le manque d’investissement et la lenteur des changements technologiques empêchent le secteur de progresser en productivité, de générer davantage de richesse, et de procurer aux agriculteurs de meilleurs revenus.

Bien que les exportations de l’UE aient augmenté en valeur absolue, la part de marché de l’UE diminue du fait de taux de croissance plus élevés des exportations de ses concurrents.

L’UE est au premier rang des exportations de produits alimentaires de qualité et haut de gamme, mais il est urgent de progresser en compétitivité sur le marché intérieur sous peine de voir ce positionnement menacé.

La chaîne de valeur est très déséquilibrée au détriment des agriculteurs. La majeure partie de la valeur ajoutée est captée par des acteurs qui bénéficient d’un degré de concentration bien supérieur. Un petit groupe de cinq distributeurs contrôlent entre 43 et 92% de chaque marché alimentaire national alors que 80% de la production européenne est effectuée par 1 100 000 exploitations.

Les pratiques commerciales injustes sont monnaie courante et pénalisent le maillon le plus faible – l’agriculteur. Les tentatives d’auto-régulation de la chaîne de commercialisation n’ont mené nulle part.

En cas de crise, le choc est essentiellement absorbé par l’agriculteur, alors que l’augmentation des prix bénéficie à d’autres acteurs.

Les réglementations de la PAC sont devenues trop lourdes et tous s’accordent pour dire qu’elles doivent être simplifiées, sans savoir comment s’y prendre.

S’il est un domaine où l’excès de réglementation devient étouffant, c’est bien celui de la protection de l’environnement et de la conversion écologique. La PAC a placé la protection de l’environnement au centre de ses préoccupations, , mais elle l’a fait de manière contraignante, au lieu de se concentrer sur les buts à atteindre. Les agriculteurs et les gouvernements locaux supportent le poids de ces dispositions très contraignantes et peinent à mettre en évidence ce qui a été réalisé.

Cette situation a renforcé la détermination des écologistes à obtenir une orientation de la PAC plus verte, parfois au mépris des besoins du secteur, refusant souvent de

reconnaître qu’il est illusoire d’attendre des agriculteurs qu’ils prennent soin de l’environnement si leurs revenus et leurs perspectives d’avenir ne s’améliorent pas.

La mise en place d’un marché unique, qui est l’un des acquis essentiels de la PAC, est mise à mal par la prolifération de labels nationaux et de normes sanitaires. L’UE tarde à trouver un terrain commun dans ces domaines, ce qui risque de porter préjudice au marché unique, diminuant son efficacité.

Tels sont les maux dont souffre le secteur de l’UE. Il est nécessaire d’y répondre avec détermination et cohérence.

Ces vingt dernières années, la PAC a traversé de nombreuses réformes. Le secteur en sort quelque peu épuisé, ce qui est compréhensible car stabilité et prévisibilité sont de précieux atouts.

Néanmoins, dans un contexte de baisse prévisible des revenus agricoles décourageant l’investissement et l’adoption des nouvelles technologies, le secteur attirant moins les jeunes générations et répondant de moins en moins aux exigences sociétales, il devient urgent d’agir.

Le secteur connaît une pression croissante du fait d’une part de la concurrence dans l’accès aux ressources, que le Brexit ne fera qu’accentuer, et d’autre part de visions divergentes des priorités politiques au sein de l’UE.

L’UE est à la veille de devoir prendre des décisions sur l’allocation de ses ressources pour le prochain cadrage financier.

La solution n’est pas de ne rien faire. Si le secteur ne prend pas d’initiatives visant à structurer son avenir, d’autres le feront, et ce ne sera pas dans l’intérêt du secteur, ni même de l’Union européenne au sens large.

Le secteur a aujourd’hui la capacité de prendre son avenir en main, de cesser de se conformer systématiquement aux politiques actuelles au nom de la stabilité. Ce serait une erreur car les pressions externes et internes rendent cette stabilité très improbable, comme nous venons de l’expliquer.

Que convient-il de faire ? Cette contribution entend présenter, secteur par secteur, les propositions élaborées par Farm Europe. L’objectif n’est pas de bouleverser la PAC ou de révolutionner ses principes et ses objectifs, mais de moderniser les outils dont elle dispose pour s’adapter aux besoins actuels et à venir.

RESILIENCE :

La nouvelle stratégie européenne visant à établir des systèmes agro-alimentaires résilients devrait intégrer l’idée suivante: plus que jamais l’agriculture est confrontée à des perturbations générées par le marché et par le changement climatique.

Pour le bien de l’ensemble de la chaîne agro-alimentaire de l’UE, la PAC devrait proposer un éventail d’outils de gestion des risques permettant de renforcer la résilience des modèles agricoles de l’UE dans leur diversité.

Au niveau européen, le résultat escompté ne pourra être obtenu grâce à un instrument unique, mais par un choix très réfléchi et cohérent d’instruments complémentaires, plaçant les agriculteurs au centre des décisions en fonction de leur situation et de leurs besoins spécifiques. Dans chaque état-membre, les agriculteurs devraient avoir la liberté de souscrire à une assurance individuelle et/ou à un fond mutuel.

La Politique Agricole Commune est une politique économique, et l’un de ses aspects fondamentaux est à cet égard d’assurer le développement d’une agriculture efficace et durable à travers l’ensemble de l’Union Européenne. Son objet principal est donc de renforcer la résilience de l’agriculture de l’UE, basée sur une gamme très variée de structures agricoles familiales.

– A travers l’UE, les subventions directes de la PAC doivent continuer à assurer un premier niveau de stabilité des revenus agricoles. Ces subventions directes sont légitimes et impératives au regard de la rémunération des services rendus au bien public par les agriculteurs, avec au premier rang, la sauvegarde de l’activité agricole dans chaque région de l’UE. Elles jouent un rôle de solidarité et de reconnaissance indispensable pour l’ensemble des secteurs agricoles européens. De plus elles sont vitales pour plusieurs secteurs qui souffrent aujourd’hui d’une difficulté structurelle à dégager des revenus équitables. Pour ces secteurs, notamment dans l’élevage des paiements directs forts doivent être associés à une politique de relance, d’investissement et de création de valeur de façon à inverser la tendance à l’effritement progressif.

– Les subventions directes ne constituent pas néanmoins la réponse à la nécessité de renforcer la résilience vis-à-vis des alea climatiques et de la volatilité du marché. Leur nature est d’apporter un soutien de base aux revenus nécessaire en condition normale d’activités. S’agissant de la volatilité des marchés, il n’est pas crédible d’opter au niveau européen pour un modèle unique qui permettrait d’y pallier. Les aléas et risques auxquels doivent faire face les agriculteurs européens ne sont pas

de même nature selon les filières et les régions. Dans chaque état-membre, les agriculteurs doivent avoir la liberté de choisir les outils de stabilisation les mieux adaptés à leur situation spécifique et à leurs besoins. Cet éventail d’options complémentaires et volontaires doit être défini au niveau européen, par le biais d’une boîte à outils de gestion des risques.

Certains de ces outils figurent déjà dans la législation en vigueur dans l’UE, mais certaines améliorations s’imposent. D’autres doivent être définies et mises en œuvre dans la prochaine réforme de la PAC.

On trouve au centre de cette boîte à outils l’assurance climatique qui protège les agriculteurs des pertes financières dues aux événements climatiques difficiles. L’assurance climatique est déjà prévue partiellement par la législation actuelle, et certains états-membres l’ont testée avec succès.

Après analyse, il semble que l’assurance climatique peut s’appliquer à l’ensemble des récoltes, aux vignes et aux cultures fruitières, ainsi qu’aux pâturages. Ce dispositif peut être co-financé en l’état actuel de la PAC.

Le taux de souscription à l’assurance climatique dans le cadre de la PAC est néanmoins trop bas. L’une des raisons est que les instruments de gestion des risques ne sont pas au centre de la politique actuelle. A cela s’ajoute le fait que le remboursement des assurances intervient uniquement lorsque les pertes dépassent 30%. Le seuil est bien trop élevé et cela décourage les agriculteurs de souscrire une assurance qui n’intervient que dans les rares cas de catastrophes. Pour que cet outil gagne en efficacité, il faudrait ramener le seuil à 20%.

Le co-financement de la PAC ne figurerait plus dans la « boîte verte » de l’OMC mais cela ne devrait pas empêcher l’UE de mieux protéger ses agriculteurs puisque qu’elle dispose pour ce faire d’une marge plus que suffisante, en particulier grâce à la disposition « de minimis » prévue dans l’Accord sur l’Agriculture de l’OMC.

Même dans le cas extrême où il serait adopté par l’ensemble des agriculteurs de l’UE il coûterait environ 4 milliards d’euros par an sur le budget de la PAC. Cette analyse est affinée en note spécifique qui évalue la mobilisation budgétaire PAC pour atteindre les niveaux élevés souhaitables et crédibles de couverture pour les différentes filières agricoles.

Cette base de l’assurance climat acquise, il faudrait mettre à la disposition des agriculteurs des outils de stabilisation de leurs revenus efficaces, comme c’est le cas des fonds mutuels. On pourrait mettre en place des fonds mutuels dans des secteurs aussi stratégiques que l’industrie laitière ou la production de sucre. La Commission a proposé d’introduire des outils sectoriels de stabilisation des revenus dans la boîte à outils de la PAC.

Pour que les outils de stabilisation des revenus sectoriels deviennent attractifs, il faudrait non seulement compenser les pertes au-delà du seuil de 20%, et prendre en compte les revenus générés par une production spécifique et non l’ensemble du revenu de l’exploitation.

Par la même occasion, la PAC devrait financer, les contributions annuelles à ces fonds, dans le but d’offrir davantage de choix aux agriculteurs et de fournir à ces fonds mutuels un cofinancement stable de la PAC. Des indicateurs pertinents doivent pouvoir être utilisés pour évaluer la perte de revenus des agriculteurs, et ainsi faciliter et accélérer le processus de compensation.

Pour couronner le tout, les options complémentaires doivent être évaluées dans la perspective d’une réforme de la PAC après 2020 :

– un mécanisme de sauvegarde préventif permettant aux agriculteurs de gérer leur propre système d’auto-assurance en constituant des réserves de liquidités tout en bénéficiant d’une stabilisation de l’impôt sur le revenu sur plusieurs années. Bien que les politiques fiscales dépendent des états-membres, un tel dispositif devrait faire partie du cadre européen, avec quelques principes communs (compte bancaire dédié, liberté de retrait, etc).

– Les expériences d’assurance revenus devraient être encouragées.

Tous ces instruments servent à renforcer la résilience à la fois des agriculteurs et de l’industrie face aux crises, tout en améliorant leurs capacités d’investissement pendant les périodes favorables. Ils sont en cohérence avec le besoin de mettre au point de nouvelles manières concrètes et efficaces de gérer les risques tout en maintenant un niveau suffisant de financement direct, dont la légitimité demeure inchangée et prenant en compte les exigences sociétales imposées à l’agriculture de l’UE et la production de biens publics.

– En parallèle, l’UE devrait renforcer la capacité de la PAC à réagir avec davantage d’efficacité sur les marchés en crise où la valeur ajoutée des décisions prises au niveau de l’UE ne fait aucun doute. Face à une crise existante, la solution la plus rapide est souvent la moins chère et la plus efficace. Pour ce faire, il faudrait non seulement donner à la commission européenne le pouvoir d’agir, mais aussi la mettre en demeure de présenter les mesures qu’elle entend prendre à des co-législateurs puis de le mettre en œuvre (ou alors de justifier sa décision de ne pas agir), et cela dès que les marchés se détériorent au-delà des seuils d’activation des outils de gestion des risques définis par la PAC. De telles actions exigeraient des financements, même si, à l’usage (à la fois en 2009 et en 2015), ils se sont avérés moins onéreux que la décision politique de débloquer une enveloppe permettant davantage de gérer la dimension politique de la crise que son impact économique. A cet égard, la constitution d’un fond européen pour la gestion des crises agricoles, avec une dotation initiale et un

financement annuel remplaçant le mécanisme actuel de réserve de la PAC, serait une solution à envisager.

La durabilité environnementale : un programme ambitieux visant une double performance orientée vers le résultat

Compte tenu de l’augmentation de la demande mondiale de denrées alimentaires et de l’inquiétude croissante face à l’impact du changement climatique, le secteur agricole de l’UE devra relever le défi de maintenir un niveau élevé de production tout en assurant une utilisation durable de ses ressources naturelles.

L’accord de Paris sur le changement climatique conclu lors de la COP21, par lequel l’UE s’est engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 40% au moins d’ici 2030, aura un impact non négligeable sur l’agenda de l’UE dans plusieurs secteurs de sa politique.

En juillet 2016, la commission européenne a proposé une réglementation sur le partage de l’effort (ESR) afin d’assurer que ces engagements seront respectés.

Les pratiques agricoles de haute technologie produisent des résultats très positifs, permettant de mieux gérer les exploitations, d’optimiser les quantités d’intrants, réduisant ainsi l’impact environnemental du secteur agricole tout en augmentant la productivité, produisant en fin de compte davantage avec moins de ressources.

L’adoption de ces pratiques de haute technologie par les agriculteurs demeure néanmoins limitée et varie énormément en fonction des états-membres.

En ce qui concerne ces avancées technologiques, les institutions de l’UE devraient prendre la mesure de l’énorme potentiel d’innovation qu’elles représentent et concevoir des politiques simples et efficaces allant dans le sens de la durabilité, de la compétitivité tout en réduisant le nombre de procédures bureaucratiques auxquelles les agriculteurs sont soumis.

Au cours des six prochaines années, l’Union européenne devrait inciter ses agriculteurs à passer à une agriculture intelligente et à une gestion de précision de la chaîne alimentaire par des moyens numériques. Elle devrait inciter les agriculteurs à mettre en œuvre de nouveaux systèmes de production plus résilients, limitant leur impact sur l’environnement.

A cet égard, la PAC devrait être revue dans le sens d’un investissement massif dans l’innovation et proposer un programme ambitieux visant à une performance double de l’agriculture européenne (économique et environnementale). Ce programme devrait s’appuyer sur la mise en œuvre des technologies relevant de la smart agriculture « agriculture intelligente » et de l’agriculture de modulation intraparcellaire de précision,

permettant de faire de l’agriculture intelligente et de précision une norme pour l’avenir et ainsi de développer et tirer bénéfices d’une gestion multifactorielle des exploitations agricoles.

Ce plan européen très ambitieux devrait s’appuyer sur deux composants intégrés :

– des investissements dans des projets de haute compétitivité durable. L’Union européenne devrait élaborer, puis mettre en place, par le biais d’une PAC ambitieuse, un « plan Marshall » facilitant la double performance de son agriculture, une agriculture moderne, en phase avec les attentes des citoyens. Une PAC basée sur une agriculture de précision et plus largement une « smart agriculture » ou « agriculture intelligente », permettra d’utiliser pleinement l’agronomie pour tenir des engagements forts en matière de production alimentaire, de prestation environnementale efficace, favorisant l’émergence de communautés agricoles vivantes et un développement rural équilibré. Les nouvelles techniques d’élevage compteraient au nombre des investissements afin d’augmenter la rentabilité du secteur et de réduire les émissions de chaque unité produite, mais aussi de valoriser davantage les externalités positives issues de ces filières, notamment en matière de biodiversité, de stockage de carbone et de participation à l’économie circulaire..

– le passage d’une PAC contraignante à une politique orientée vers le résultat basée sur les actions de lutte contre le changement climatique et en faveur de l’environnement, venant en complément des critères de conversion écologique et basée sur la volonté des agriculteurs eux-mêmes. Les producteurs auraient le choix entre les politiques existantes fondées sur des mesures de reconnaissance d’action précises imposées de façon règlementaire et une approche basée davantage sur les résultats.

Ce serait un nouveau paradigme pour la PAC, dotée d’un outil basé sur des objectifs quantifiables, adapté aux connaissances, aux capacités des agriculteurs et aux spécificités de chaque exploitation. Cette double approche des problématiques environnementales permettrait de mieux prendre en compte la diversité des agricultures européennes et la diversité des réponses possibles et différentes d’une exploitation à l’autre, le tout, dans un cadre européen clairement défini.

Il faudrait mettre au point au niveau communautaire un éventail d’indicateurs environnementaux clairs, bien définis et quantitatifs permettant d’évaluer l’action des agriculteurs dans la mise en œuvre de techniques et de pratiques respectueuses de l’environnement.

Les méthodes d’une agriculture « intelligente » et de précision contribuent à la durabilité de notre système de production, en explorant plus précisément la relation agronomique et environnementale et en en facilitant l’application, grâce à des outils plus ergonomiques.

Cette contribution à la durabilité de notre système alimentaire devrait être encouragée de trois manières :

– Inclure dans la PAC renouvelée la priorité à donner à un programme européen pour développer une agriculture intelligente et de précision. La PAC doit encourager fortement l’innovation dans les fermes ainsi que dans la chaîne de production alimentaire au cours de toute cette période en concentrant l’effort sur les investissements combinant les aspects économiques et environnementaux de la compétitivité, en y consacrant une part importante du budget et en mettant en place des mesures d’entrainement avec des taux incitatifs et un co-financement européen.

– Dans le même temps, ces politiques devraient fournir un soutien spécifique aux agriculteurs désirant convertir leur exploitation à l’agriculture intelligente.

Ce dispositif de soutien couvrirait les coûts supplémentaires initiaux auxquels les agriculteurs devraient faire face en lien avec l’acquisition d’un savoir nouveau et les risques inhérents à l’adoption de nouvelles technologies.

– Enfin, la possibilité de mettre en place un mécanisme de promotion de l’agriculture intelligente de précision et de nouvelles techniques agricoles. Un tel dispositif devrait être simple, réactif, flexible et ouvert à tous les acteurs de la chaîne de production alimentaire qui adopteraient ce concept d’agriculture intelligente et de précision pour un impact clairement positif sur l’environnement. Dans ce nouveau cadre, la mise en place de l’ensemble de ces nouvelles pratiques d’agriculture en cohérence avec les objectifs de durabilité des mesures de transition écologique pourrait valider de manière automatique la bonne application des exigences de la PAC. Cela se traduirait par une réduction des coûts administratifs fois pour les agriculteurs et pour les pouvoirs publics.

Pour atteindre ces objectifs et construire dans les moindres détails ce plan européen ambitieux, Farm Europe s’emploie à évaluer pour chacun des secteurs agricoles les besoins en investissement dans les méthodes d’agriculture intelligente et de précision, le coût que cela représente, les retombées économiques et environnementales, ainsi que les besoins de financement par la PAC. Il s’agit de trouver l’équilibre entre la conversion rapide des agricultures européennes, le soutien des pouvoirs publics et la responsabilité entrepreneuriale et de cibler les secteurs pour lesquels les technologies sont matures, permettant un basculement politique, ce qui ne sera pas le cas pour l’ensemble des secteurs agricoles.

La chaîne agro-alimentaire

Le manque de coopération au sein de la chaîne agro-alimentaire de l’UE diminue l’aptitude du secteur à faire face aux défis de la mondialisation et de l’investissement.

La nouvelle donne devrait commencer par réaffirmer la prééminence de la PAC sur les règles générales de la concurrence. Ce principe devrait être appliqué également par les instances nationales chargées du respect de la concurrence.

La transparence devrait être améliorée, y compris en matière de prix et de volumes tant au niveau de la production qu’au niveau du consommateur final.

Il faudrait encourager les relations contractuelles sur la base de règles plus claires, permettant des négociations contractuelles collectives au niveau des organisations de producteurs et des groupements d’organisations de producteurs.

Pour encourager la coopération chez les agriculteurs, il faudrait autoriser de manière explicite une approche de branche des négociations de prix et de volumes afin de garantir une meilleure répartition de la valeur quand les prix sont à la hausse et à la baisse.

Ces mesures devraient être mises en place sans perdre de vue que les marchés les plus appropriés pour la production agricole sont souvent organisés à l’échelle européenne, plus qu’au niveau national ou régional.

Lorsqu’il s’agit de pratiques commerciales injustes, un certain nombre de pratiques devraient être prohibées, cela s’accompagnant de mécanismes de sanction clairs et dissuasifs, protégeant pleinement l’identité des plaignants.

Dans le contexte d’une fragmentation du secteur agricole et d’un accès très limité et très partiel des agriculteurs aux informations concernant les tendances de marché et la valeur des produits, les trois piliers de la chaîne agro-alimentaire de l’UE n’agissent pas de manière collective.

La volatilité croissante des prix depuis 2007 a complètement changé les règles du jeu, du fait de l’impact violent des variations de prix sur les acteurs de la chaîne agro- alimentaire.

– Lorsque les prix baissent, ce sont les agriculteurs qui amortissent la majeure partie du choc pour l’ensemble de la filière. Leurs marges se réduisent rapidement, et cela fragilise leur situation économique déjà précaire.

– Sur les marchés européens, les baisses de prix sont rarement répercutées sur les consommateurs, sauf dans le cas des produits très périssables comme les fruits et légumes. Ce sont les transformateurs et les distributeurs qui bénéficient de l’effet d’amortisseur supporté par les agriculteurs, ils parviennent même parfois à augmenter les marges dégagées dans l’UE sur les produits transformés.

– Lorsque les prix augmentent, la capacité des agriculteurs à profiter de ces hausses dépend de la nature de leur production, et plus précisément de la possibilité de vendre leurs produits directement sur le marché. Ainsi, lorsque les produits agricoles

doivent subir une transformation (comme le sucre par exemple), ou une phase de transformation et de conditionnement (comme le lait) avant d’être mis sur le marché, la capacité des agriculteurs à répercuter les hausses de prix sur la chaîne de production alimentaire semble limitée ou implique de long délais.

Dans ce contexte, il faut que les législateurs de l’UE agissent sans attendre afin de mettre fin à ce déséquilibre. Sans même mentionner l’importance des règlementations relatives aux pratiques commerciales injustes, il est urgent que les législateurs apportent une réponse à chacun des déséquilibres suivants :

– prévoir que les Etats-membres décident, à la demande des agriculteurs ou des organisations de producteurs, de rendre obligatoire la signature de contrats. En effet, le recours à des contrats aide à renforcer la responsabilité des opérateurs et leur faire prendre conscience de la nécessité de mieux prendre en compte les signaux du marché, afin d’améliorer la transmission des prix et d’adapter l’offre à la demande. L’usage de contrats permettrait d’éviter certaines pratiques injustes, protégeant ainsi les agriculteurs des abus d’autres acteurs de la chaîne.

– prolonger les dispositions des accords laitiers au-delà du 30 juin 2020 car ils sont la base nécessaire à l’amélioration des conditions économiques des producteurs laitiers.

– adopter une disposition permettant aux organisations de producteurs ou à leurs associations, de négocier de manière collective les termes des contrats, y compris les prix, avec un transformateur ou un acheteur, et cela pour tout ou partie de la production de leurs membres. Leur pouvoir de négociations vis-à-vis des transformateurs serait renforcé et se traduirait par une répartition plus juste de la valeur ajoutée sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement.

– permettre aux organismes inter-professionnels de négocier des accords de répartition de la valeur, incluant pertes et profits, facilitant ainsi la transmission des signaux envoyés par le marché et renforçant le bon fonctionnement de la chaîne.

– considérer l’UE comme le niveau géographique adapté à la définition du marché pertinent telle qu’elle apparaît à l’article 207 de l’organisation du marché unique européen, l’application des règles communes ayant produit au fil du temps une meilleure intégration des marchés agricoles.

Equilibre territorial et durabilité économique : concentrer l’attention et l’investissement sur des stratégies sectorielles intégrées

L’ambition de sauvegarder une industrie agro-alimentaire dynamique à travers l’UE devrait devenir réalité. Ces dix dernières années, la compétitivité du secteur agricole de l’UE a diminué. La croissance de la productivité globale de l’agriculture a chuté de 54% et la productivité du capital est désormais négative.

L’Europe ne doit pas limiter ses interventions à une série de mesures visant à accompagner la décroissance du secteur agricole. Son ambition ne doit pas non plus se limiter à une agriculture cantonnée à la préservation des zones les plus fragiles.

Au contraire, le cadre politique européen devrait s’employer à mettre en œuvre des stratégies économiques ciblées et dynamiques visant à relancer l’investissement dans toute la chaîne agro-alimentaire européenne.

La dimension économique de la Politique Agricole Commune doit connaître un renouveau. La PAC est avant tout une politique économique, et à cet égard, l’un de ses aspects fondamentaux est le développement d’une agriculture durable et efficace à travers l’ensemble du territoire de l’Union européenne. On considère pourtant souvent la PAC comme une politique qui accompagne passivement les ajustements à l’œuvre dans le secteur agricole, plutôt que comme une politique animée d’une réelle ambition économique, pour les secteurs géographiques intermédiaires et fragilisés notamment.

L’Union européenne est très variée. Certaines régions sont extrêmement compétitives sur la scène mondiale, d’autres souffrent au contraire d’un déficit de compétitivité structurel. Au-delà de l’ambition économique qui voudrait que la PAC relève les défis auxquels l’agriculture est confrontée partout sur son territoire, y compris dans les régions les plus compétitives, des outils spécifiques doivent être mis en œuvre pour les régions intermédiaires et les régions fragiles afin de les protéger d’un déclin inexorable du nombre d’exploitations, du niveau de production entrainant les industries de transformation, le tourisme et tous les emplois induits.

Les financements conjoints ainsi que les financements aux régions les moins favorisées demeurent et demeureront un excellent outil de solidarité. La politique de transfert budgétaire a néanmoins montré ses limites, ne parvenant pas à juguler l’hémorragie du secteur agricole dans ces régions les moins favorisées et dans les zones intermédiaires, confrontées à une concurrence très rude, notamment en ce qui concerne les filières d’élevages localisées dans ces régions.

Pour commencer, il n’y a pas de réponse unique aux défis de compétitivité. Il existe déjà une myriade de mesures, et c’est en partie ce qui pose problème : cette multitude

de dispositions ne doit pas conduire à une dispersion des moyens qui minerait l’efficacité de ces mesures et pourrait même entrainer des décisions très éloignées des préoccupations des personnes vivant et travaillant dans les filières agricoles.

Ensuite, ce qui compte, c’est la cohérence. Il est donc nécessaire avant tout de réfléchir à la façon d’améliorer la gouvernance afin de mobiliser les outils nécessaires au niveau local et de mettre sur pied de véritables projets économiques générateurs de croissance pour ces régions.

Pour certaines régions, les zones montagneuses par exemple, une politique centrée sur la qualité et la segmentation du marché pourrait être la réponse appropriée permettant de déclencher un développement économique en protégeant certains secteurs de la concurrence directe européenne et mondiale, des zones les plus compétitives en termes de production.

Le continent européen a déjà connu de nombreux succès. Il pourrait être utile de lancer de nouvelles initiatives en matière de segmentation de marché, dans le domaine de la viande par exemple, avec la stratégie et les soutiens appropriés.

Le marketing et les indications géographiques ne sont pas la seule réponse.

Pour les secteurs qui ne sont pas suffisamment structurés pour entamer un processus de segmentation, il est nécessaire de réfléchir à des stratégies comprenant des projets économiques et territoriaux. Ces plans devraient mettre en mouvement l’ensemble du secteur en mobilisant des ressources et dans le même temps, des outils simples et clairs permettant de les mettre en œuvre.

Une stratégie de développement dans un esprit proprement de filière, une approche par chaîne de production, a fait le succès de l’industrie du sucre dans les régions productrices. Parallèlement, même dans des secteurs souffrant d’un déficit de productivité, on peut prendre l’exemple du développement du secteur des biocarburants. Ce secteur a la capacité de générer une demande stable dont bénéficie l’agriculture locale tout en répondant dans le même temps aux exigences sociétales de durabilité.

De plus, au niveau des exploitations agricoles, et dans certaines régions intermédiaires en particulier, il est peut-être temps de remettre en question les stratégies de spécialisation excessives. Nous devrions nous intéresser à de nouveaux modèles d’exploitations pratiquant une polyculture efficace et un élevage de bétail varié. Associé à des connaissances agronomiques et à la gestion des écosystèmes, ce renouveau de

diversité agricole peut s’avérer être un choix efficace. Dans d’autres secteurs où le revenu par hectare est plus faible, et dont le défi principal est de résister à la concurrence de régions plus performantes, quand les modèles évoqués plus haut se révèlent inopérants, on ne peut écarter de manière dogmatique la question de l’expansion intensive ou extensive des exploitations dans l’espoir de réaliser des économies d’échelle.

Dans ce contexte de grande diversité des solutions, il faut apporter une réponse à la question de l’amélioration de la gouvernance des soutiens de la PAC afin de se concentrer en priorité sur de nouvelles stratégies sectorielles et/ou régionales intégrées qui pourraient faire la différence en termes de croissance durable et d’emploi, accompagnant une PAC investissant dans la double performance et dans la résilience ; une PAC capable d’accompagner l’émergence de façon cohérente et dynamique de véritable chaines de valeurs agricoles et environnementales.

Quelle stratégie EU pour les protéines végétales ?

Note politique, Octobre 2017.

Quelle stratégie EU pour les protéines végétales ? Mesures de la PAC et évolution des cultures protéagineuses, oléoprotéagineuses et oléagineuses, Quels enseignements ? Quelles orientations ?

Sujet récurrent dans l’Union européenne : son indépendance protéique, ou plutôt la très forte dépendance de ses filières élevage aux importations, essentiellement de soja.

Depuis trois décennies, l’Union européenne le hisse régulièrement au rang de priorité stratégique lors de chaque étape politique : négociations de Blair House, réformes de la PAC de 1992 / 2000 / 2003 / 2008 / 2013, stratégie européenne en faveur du développement de biocarburants d’origine agricole ; et ce, avec plus ou moins de bonheur et de résultats.

Alors que le Commissaire Hogan a décidé de se ressaisir de cette problématique dans un contexte délicat de modification des règles des mesures PAC verdissement, de proposition de révision de la directive REDII, de morosité économique flagrante du secteur agricole et de préparation des débats sur le futur budget EU et la PAC post2020,il paraît important de tirer les enseignements des mesures déjà expérimentées pour tracer les lignes d’un plan d’essor qui porterait réellement ses fruits.

Trois leviers d’action ont essentiellement été mis en œuvre via les politiques communautaires durant cette période de 30 ans :

– des aides couplées aux cultures protéiques et oléoprotéagineuses, les Etats membres ont eu à se prononcer sur l’adoption de ce type d’aides volontaires en 2003, 2008 et 2013 ;

– des objectifs de taux de biocarburants dans l’énergie utilisée pour les transports dans l’Union européenne ;

– l’obligation faite par la PAC de 2013 de consacrer 5 % des terres arables en surfaces d’intérêt écologique (SIE) et de pouvoir y cultiver des plantes fixatrices d’azote et des cultures dérobées.

L’impact de ces trois facteurs principaux destinés à accroître les surfaces et quantités produites de protéagineux et oléagineux dans l’Union européenne est ici analysé.

La première partie du présent document trace la situation des cultures protéagineuses et oléoprotéagineuses :

– un premier temps est consacré à une description de l’évolution de la PAC et des incitations à ces cultures ;

– un second temps cherche à établir le degré de corrélation entre les différentes mesures évoquées et l’évolution des surfaces et productions protéagineuses et oléoprotéagineuses.

La seconde partie du document analyse les inflexions de la production oléagineuse communautaire en lien avec l’évolution de la politique communautaire en matière de biocarburants.

Cette analyse montre l’impact positif de la réforme de 2013, qui a permis le doublement de la culture protéagineuse et oléo-protéagineuse, du fait, essentiellement de la mise en place du verdissement et de l’utilisation des Surfaces d’intérêt écologique, associé à une faculté maintenue, pour les Etats membres, de verser des aides couplées pour ces cultures.

I- Cultures protéagineuses et oléoprotéagineuses (pois, fèves et féveroles, soja)

1) Evolution de la PAC et de ses incitations en faveur des cultures protéagineuses

– 1999 : l’Agenda 2000

A la suite de l’accord de Berlin, la réforme de la PAC dite “Agenda 2000” est adoptée. Elle instaure notamment le principe d’éco-conditionnalité pour les aides directes, et introduit une réglementation commune pour les grandes cultures (céréales, oléagineux, protéagineux).

En 1999 et 2000, une aide est établie avec une valeur commune à toutes les cultures (63 euros/t) et prenant en compte les rendements historiques locaux des productions. Une aide majorée est instaurée pour les cultures protéagineuses. L’aide allouée aux cultures protéagineuses s’élève initialement à 78,5 euros/t, puis est ramenée à 72,5 euros/t à partir de 2000-2001, soit une majoration de 9,5 euros/t spécifique aux protéagineux.

– 2003 : Accord de Luxembourg

Nouvelle réforme de la PAC, dans le cadre d’une révision à mi-parcours, elle amorce le découplage des aides par une réduction de 75% des enveloppes consacrées aux aides couplées dans le budget PAC et le passage à un “paiement unique” par exploitation. En addition de ce paiement unique à l’hectare, une prime de 55,57 euros/ha est décidée pour les protéagineux.

– 2008 : bilan de santé de la P.A.C.

La nouvelle programmation de la PAC s’ouvre, pour la période 2007-2013. En 2010, 6 Etats membres utilisent l’article 68 (faculté pour les Etats membres de mettre en place des aides du 1er pilier pour des actions spécifiques, financées par prélèvement sur les aides découplées du 1er pilier de la PAC du pays) pour soutenir les cultures de protéagineux : la Finlande, la France, la Lituanie, la Pologne, la Slovénie et l’Espagne (source : CE-DG Agri 2010).

Etats membres

Détails

Finlande

6,5 M euros pour protéagineux et oléagineux en 2011 ; 83 000 ha soit environ 78 euros/ha

France

80 M euros en 2010-2011; pois, féverole, lupins : 100 euros/ha en 2010 et 140 euros/ha en 2011

Pologne

21,6 M pour 2010-2011; 163 euros/ha en 2012

Espagne

1 M euros/an en 2010 et 2011

Tableau 1 : aides relatives à l’article 68 pour les cultures protéagineuses lors de la programmation 2008 de la P.A.C. (Sources : Parlement Européen, Le rôle environnemental des cultures protéagineuses dans la nouvelle Politique Agricole Commune, 2013)

– 2013 : réforme de la PAC

La réforme de la PAC décidée en 2013 a prévu la faculté pour les Etats membres de consacrer 13 % de leur enveloppe aides directes du 1er pilier à des aides couplées, ces 13% pouvant être portés à 15% si l’Etat membre décide de consacrer 2% ou plus du dit budget à des aides couplées aux productions de protéines végétales (dont soja).

Les Etats membres ont notifié à la Commission européenne, le 1er août 2014, leurs aides couplées à la production des cultures protéagineuses. 11% des aides couplées ont été allouées dans l’Union européenne aux cultures protéagineuses, pour une surface maximale de 4,3 millions d’hectares et un montant annuel moyen disponible de 441 millions d’euros (soit 102 euros en moyenne par hectare). Le secteur des cultures protéagineuses se place au quatrième rang des secteurs recevant des aides couplées, loin derrière la filière élevage. Ces aides sont entrées en application en 2015, et leur planification s’étend jusqu’en 2020 (source : Note d’information de la Commission du 30 juillet 2015).

Les 16 Etats membres ayant opté pour soutenir ainsi ces cultures (montant en millions d’euros) sont :

Etats membres

Détails

Bulgarie

16 M euros

République Tchèque

17 M euros

Grèce

7 M euros

Espagne

45 M euros (209 euros/ha)

Finlande

6 M euros

France

146 M euros (187 euros/ha)

Hongrie

27 M euros

Croatie

4 M euros

Irlande

3 M euros

Italie

36 M euros

Lituanie

14 M euros

Luxembourg

Lettonie

4 M euros

Pologne

68 M euros (266 euros/ha)

Roumanie

49 M euros

Slovénie

3 M euros

Tableau 2 : aides couplées allouées aux cultures protéagineuses, entrées en application en 2015 (Source : Note d’information de la Commission du 30 juillet 2015).

Avec la réforme de 2013 qui visait notamment l’augmentation de la suffisance en Matières Riches en Protéines de l’Union européenne, la production de soja est devenue éligible au bénéfice d’aides couplées. En 2015, dans les Etats ayant adopté ces aides pour cette culture, leur montant oscille entre 96 et 419 euros euros/ha.

Les 9 états membres ayant opté pour soutenir ces cultures (montant en euros/ha) sont : Bulgarie : 156 ; Croatie : 260 ; République Tchèque : – ; France : 100 dans la limite de 12,5 ha par exploitation ; Hongrie : 150-200 ; Italie : 96 ; Pologne : – ; Roumanie : 325 ; Slovénie : 419.

D’autre part, la réforme PAC 2013 a lié 30% des aides directes du 1er pilier à des mesures dites de verdissement dont la présence de surfaces d’intérêt écologique (SIE) pour au moins 5 % des terres arables de chaque exploitation. Cette exigence a été largement remplie par les agriculteurs européens : 15% des superficies arables étaient en S.I.E. en 2016, soit 8 millions d’hectares. Presque 40% des S.I.E. sont composées de surfaces en cultures fixatrices d’azote. S’agissant de la culture de soja, sur les 12 Etats membres producteurs, 10 l’ont rendu éligible dans les S.I.E.

2) Evolution des surfaces et des productions au sein de l’Union européenne

– Pois protéagineux

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Figure 1 : Evolution des quantités produites et superficies utilisées pour la culture du pois protéagineux de 2000 à 2016 (source : base de données Eurostat)

L’Union européenne a connu un déclin progressif de la production de pois de 2000 à 2003. Les surfaces sont demeurées stables, autour de 750 000 ha, le déclin de la production étant lié à la baisse récurrente des rendements.

En 2004, la production marque un rebond, avec l’entrée de 10 nouveaux pays dans l’Union. Le recul des surfaces et quantités produites qui reprend dès l’année 2005 et se prolonge jusqu’en 2009 n’en paraît que plus marqué. Le problème de rendements faibles (et donc de rentabilité médiocre face aux alternatives existantes au sein des grandes cultures pour les agriculteurs) perdure, et les superficies en protéagineux marquent des replis importants d’une année sur l’autre, nonobstant l’aide couplée de 55,57 euros/ha. Jusqu’en 2009 inclus, la culture de pois protéagineux est en totale perte de vitesse en Europe. Les surfaces cultivées s’effondrent de 851 290 ha en 2004 à 411 930 ha en 2008, soit un recul de 51,61%.

Entre 2009 et 2011, les surfaces cultivées croissent de nouveau, avant de rechuter en 2012 et 2013. Une corrélation pourrait être établie entre l’arrêt de la chute de la production et même un modeste sursaut et l’utilisation du nouvel article 68 né du bilan de santé de la PAC de 2008. Cependant, cette mesure n’a pas permis d’éviter une nouvelle baisse des surfaces en 2012 et 2013.

Depuis 2014, cette évolution s’est inversée et le pois protéagineux enregistre une croissance continue de la production et des surfaces cultivées. Les années 2015 et 2016 ont connu un net regain de production du pois protéagineux, en atteignant respectivement 2,076 millions de tonnes sur 744 260 hectares et 2,329 millions de tonnes sur 911 690 hectares, soit le plus haut niveau depuis 2000. Augmentation de production de 60,83% et de surfaces de 60,70% entre 2013 et 2015. Augmentation de production de 80,49% et de surface de 96,85% entre 2013 et 2016.

Cette croissance suit la mise en œuvre de la réforme de 2013. Les mesures en faveur de l’essor de cette production y sont de deux natures : aides couplées d’une part, surfaces exigées en S.I.E. et possibilité de les consacrer aux cultures protéagineuses d’autre part.

L’examen de la situation du pois protéagineux en Allemagne, pays n’ayant pas mis alors d’aides couplées aux cultures protéagineuses, permet d’apporter un éclairage complémentaire.

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Figure 2 : Evolution des quantités produites et superficies utilisées pour la culture du pois protéagineux de 2000 à 2017 en Allemagne (source : base de données Eurostat)

Alors que depuis 2000 les surfaces et quantités produites de pois protéagineux en Allemagne déclinaient chaque année, et globalement végétaient depuis le début les années 2008, elles ont connu un bond très significatif entre 2014 et 2015 (+78,23% de production et +89,68% de surface). La croissance entre 2013 et 2016 s’élève à 124,09% pour les quantités produites et 130,87% pour les surfaces utilisées.

Dans cet Etat membre, comme sur l’ensemble de l’Union européenne (et sans préjuger de l’impact relatif des aides couplées dans les Etats membres en ayant mis en place), la mesure « verdissement » ouvrant les cultures protéagineuses sur S.I.E. a été manifestement un facteur décisif de retour à une croissance des surfaces et quantités de pois protéagineux produits.

– Fèves et féveroles

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Figure 3 : Evolution des quantités produites et des surfaces utilisées pour la culture des fèves et féveroles de 2000 à 2016 (source : base de données Eurostat)

Les cultures de fèves et féveroles suivent les mêmes évolutions que celles des pois protéagineux sur la période 2000-2013. Nonobstant les différentes mesures prises entre 2000 et 2013, les cultures n’arrivent pas à croître, le faible sursaut post de 2009-2010 s’émoussant immédiatement ensuite.

Par contre, entre 2014 à 2017, les fèves et féveroles sont, tout comme le pois, en augmentation avec un bond extrêmement important de la production et des surfaces entre 2014 et 2015. L’année 2016 est stabilisée sur les niveaux de 2015, et 2017 enregistre une nouvelle hausse des surfaces. Entre 2014 et 2015, la production a augmenté de 55 % et les surfaces utilisées de 61 %.

Comme pour le pois protéagineux, la présomption de causes à effets sur la période 2014 à 2017 entre la hausse de la production EU de fèves et féveroles et les aides décidées lors de la réforme PAC 2013 semble forte.

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Figure 4 : Evolution des quantités produites et des surfaces utilisées pour la culture des fèves et féveroles de 2000 à 2017 en Allemagne (source : base de données Eurostat)

Comme pour les pois protéagineux, l’évolution entre 2014 et 2017 notée en Allemagne tend à démontrer l’impact très positif des mesures verdissement SIE liée aux cultures fixatrices d’azote (dont protéagineuses). En effet, le graphique précédent montre un constant accroissement des quantités produites et surfaces utilisées à partir de 2014, alors que les niveaux étaient stables auparavant. Ainsi de 2013 à 2016, la croissance est de 157,45% pour la production, et de 135,15% pour les surfaces utilisées. Et, comme pour le pois, ce bond est particulièrement manifeste entre 2014 et 2015 (+52,05% de production et +83,41% de surface).

La mesure en faveur des cultures fixatrices d’azote sur S.I.E. a donc aussi clairement favorisé la culture des fèves et féveroles dans l’Union européenne.

– Production de Soja

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Figures 5 : Evolution des quantités produites et superficies utilisées pour la culture du soja de 2000 à 2016 (source : base de données Eurostat)

Jusqu’en 2013 inclus, l’observation du graphique montre les fluctuations des surfaces et quantités produites pour la culture du soja dans l’Union, qui, à l’exception des années 2007-2009 (baisse) réussit tout au plus à se maintenir.

Les années 2015 et 2016 enregistrent une augmentation notable de la production et des surfaces utilisées pour cette culture. Les niveaux atteints se distinguent très nettement des niveaux moyens précédents, l’année 2013 incluse. L’année 2015 enregistre une augmentation de production de 112,34% et de surface de 103,21% par rapport à la moyenne des années jusqu’à 2013 incluse.

Même si les niveaux de l’année 2016 sont légèrement plus bas que ceux de l’année 2015, une corrélation nette entre la mise en œuvre par les EM de la réforme de la PAC décidée en 2013 (entrée en vigueur en 2015) et la dynamique de culture du soja se dessine. Dans le cadre de cette application de la réforme de 2013, les principaux pays producteurs de soja de l’Union européenne ont opté à la fois pour un encouragement via des aides couplées et pour un encouragement via la possibilité de consacrer des SIE à la culture de soja. Des enseignements sur la part relative de l’une et l’autre mesure dans la croissance forte de la culture de soja depuis 2014 ne sauraient être tirés immédiatement.

En résumé :

Sur les périodes 2000-2013, les mesures portées par les réformes et ajustements de la PAC n’ont pas réussi à inverser une tendance de recul ou stagnation. Seul le sursaut pour le pois protéagineux de 2009 à 2011 pourrait être relié à l’impact momentané des mises en œuvre des outils adoptés lors du bilan de santé de 2008.

En revanche, sur la période post réforme 2013, l’augmentation des surfaces et quantités produites de pois protéagineux, de fèves et féveroles et de soja, apparaît très corrélée à la double décision d’exigence de 5% des terres arables en SIE et d’y permettre les cultures fixatrices d’azote. Cette double décision a eu la conséquence favorable de permettre un véritable décollage de la production européenne de protéagineux et soja et d’avoir non pas des SIE à hauteur de 5 % des terres arables tel que la réglementation l’exige, mais à hauteur de 15 %.

En absence d’aides couplées et donc avec la double mesure SIE comme incitation essentielle, l’Allemagne connaît des croissances analogues à celles décrites pour l’Union européenne dans son ensemble. Cependant, l’observation du cas de l’Allemagne qui n’a pas recours aux aides couplées en 2013 ne saurait exclure une corrélation entre les aides couplées et la dynamique nouvelle pour ces productions dans les autres Etats membres.

Pour les années à venir, une interrogation majeure existe : la décision de la Commission d’interdire toute utilisation de pesticides sur les cultures fixatrices d’azote réalisées sur SIE aura-t-elle ou non pour conséquence un coup d’arrêt, voire un recul marqué des productions communautaires protéagineuses ? En optant pour une interdiction totale et non une exigence d’utilisation raisonnée, la Commission a-t-elle mesuré avec précaution le risque encouru d’arrêt de ce type de productions sur SIE par les agriculteurs qui doivent désormais s’arbitrer entre :

– coût de mise en place et conduite de ses cultures sans assurance de pouvoir réagir face des invasions de pestes

– et choix des dits agriculteurs de réduire la part des SIE à la stricte demande règlementaire, voire d’y préférer des terres sans production (et donc ouvrir à la porte à plus d’importations de protéines par l’Union européenne et une entaille à la sécurité alimentaire tant européenne que mondiale) ?

Un autre point de progrès encore à rechercher apparaît être l’amélioration des performances techniques de ces cultures, une meilleure stabilisation des rendements face aux variations des conditions climatiques. Cela passe à la fois par la recherche d’itinéraires techniques plus pointus et par un investissement fort dans la recherche variétale, investissement délaissé par les firmes semencières puisque ces productions étaient au mieux stagnantes au pire baissières dans l’Union européenne, et donc ne présentaient pas les caractéristiques de marchés d’avenir pour de telles entreprises.

Les conditions d’un retour à des investissements porteurs de sélection variétale peuvent être acquises dès lors que ces productions retrouvent un profil dynamique et une taille critique faisant d’elles des marchés crédibles. De telles conditions premières semblaient commencer à se réunir depuis la période 2014-2017. Encore faudrait-il que cette dynamique ne soit pas cassée. L’objet n’est pas tant d’orienter ou non de l’argent public dans cette recherche variétale que d’établir les conditions favorables pour que cette recherche ait lieu, via la PAC, via aussi des positions responsables que l’Union européenne devra prendre, par exemple, sur le sujet des nouvelles techniques de sélection variétale.

S’agissant de la PAC, les atermoiements s’agissant des conditions évoquées ci- avant relatives aux mesures verdissement posent la question de la finalité recherchée par la PAC: une politique s’engageant sur des résultats et responsabilisant les agriculteurs, en tant qu’entrepreneurs aptes à décider des moyens d’actions à prendre, ou une politique dictant les conditions agronomiques d’exercice du métier d’agriculteur pour répondre à des ressentis supposés de « l’opinion publique » ?

II- Les cultures de colza

1) Politique communautaire en matière de biocarburants

L’Union européenne a lancé dans les années 90 une politique en faveur de la production des biocarburants afin de diminuer la dépendance énergétique aux énergies fossiles importées et de renforcer la résilience du secteur agricole. Des objectifs de contribution des biocarburants dans l’énergie du secteur des transports ont été fixés : en 2003, 2%, puis en 2009, 5% à l’horizon 2010 et 10% à l’horizon 2020. Suite à la directive sur les biocarburants de 2003, et à la réforme concomitante de la PAC, une aide pour les cultures à visée énergétique de 45 euros par hectare fut octroyée, et ce jusqu’au bilan de santé de la PAC en 2008. Une industrie des biocarburants est donc née, dans un contexte de perception favorable, et avec des incitations européennes règlementaires et financières.

A la suite des révoltes de la faim de l’année 2007 et des actions de lobbying intenses de certaines organisations, la perception publique des biocarburants a changé, pour les biocarburants conventionnels, quand bien même les arguments avancés en la matière se sont avérés erronés et ont depuis été formellement contredits par des instituts tels que la FOA, par le monde scientifique et la Commission elle-même (DGagri, JRC). Les objectifs ont cependant été revus à la baisse, le niveau de 7% de contribution à l’horizon 2020 a été décidé en 2015, et les Etats encouragés à progressivement réorienter leurs aides au profit des biocarburants dits “avancés”.

2) Evolution des surfaces et des productions

Le colza est la première matière première employée dans l’Union européenne pour la production de biodiesel, devant l’huile de palme (importée), et loin devant le soja et le tournesol (la part de ce dernier restant ténue sur toute la période).

 

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Figure 6 : Evolution des quantités produites et des surfaces utilisées pour la culture du colza de 2000 à 2016 (source : base de données Eurostat)

L’observation du graphique précédent montre un saut des quantités produites pour la culture du colza à partir de l’année 2004 (+35% par rapport à la moyenne des années précédentes). Les surfaces cultivées augmentent, elles aussi, mais plus sensiblement (+9% par rapport à la moyenne des années précédentes). La croissance de la production se poursuit jusqu’en 2007.

Pour les surfaces utilisées, on observe la même tendance de hausse de 2004 à 2007, puis de stabilisation : de 2003 à 2007, l’accroissement surfacique est de 57%.

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Figure 7 : Approvisionnement en huile de colza des marchés de l’alimentaire et des biocarburants (Source : calculs effectués par FEDIOL, sur la base de données propres et de Oil World Annual 2012- 2000)

Le graphique précédent montre que l’augmentation de la production d’huile de colza en 2004 est liée à l’usage énergétique de celui-ci. La hausse des superficies en colza au sein de l’Union européenne est totalement corrélée à l’évolution de la production de biodiesel à base de cette matière première.

Les mesures d’aides aux cultures énergétiques adoptées en 2003 puis abandonnée en 2008 semblent avoir joué leur rôle de catalyseur du développement de ces productions, parallèlement aux mesures fiscales d’encouragement mises en œuvre dans différents Etats membres.

La production de biodiesel à partir d’oléagineux communautaires a généré en parallèle la production de tourteaux à forte teneur protéique, réduisant d’autant la dépendance de l’Union européenne aux importations de tourteaux de soja. Grâce à l’émergence de ces nouveaux débouchés énergétiques pour les huiles d’oléagineux européens (surtout de Colza), ce sont 9,3 MT par an de tourteaux de Colza européens qui sont produits en plus et viennent réduire d’autant les importations dont l’Union européenne est dépendante.

Quasi exclusivement à base de colza à ses débuts, la production de biodiesel dans l’Union européenne était encore à base de colza pour 72% en 2008 avant de céder des parts de marché du fait de la concurrence des importations d’huile de palme pour la production de biocarburants dans l’Union européenne, nonobstant les fortes interrogations quant à l’impact environnemental et économique de ces biodiesels à base d’huile de palme importée pour l’Union européenne (voir rapport d’analyse «producing fuel and feeds – a matter of security and sustainability for europe» http://www.farm-europe.eu/travaux/poducing-fuel-and-feeds-a-matter-of-security-and- sustainability-for-europe/ ) .

En résumé :

En ce qui concerne les protéines de tourteaux de colza, la production a doublé entre 2004 et aujourd’hui. 9,3 millions de tonnes de tourteaux de colza sont directement attribuables à la production de biodiesel de l’UE. Alors que l’huile de colza est utilisée pour produire du biodiesel, sa protéine dérivée est disponible en tant que nouvelle offre pour le secteur de l’élevage de l’UE.

Cette augmentation de la disponibilité des protéines végétales dans l’UE a un impact direct sur la réduction des importations de matières premières destinées à être utilisées comme aliments pour animaux, alors que l’Europe a une déficience structurelle en protéines et dépend à 70 % des importations de cultures protéiques et de tourteaux en provenance de pays tiers. Un rapport récent développé par le Parlement européen évalue la carence en protéines dans l’UE à 20 millions de tonnes[24].

Dans ce contexte, le Parlement européen, ainsi que les Etats membres, “appelle la Commission à présenter rapidement au Parlement et au Conseil un rapport sur les possibilités et les options pour accroître la production nationale de protéines dans l’UE au moyen de nouveaux instruments politiques (en tenant compte également de l’utilisation des graines oléagineuses et de leurs sous-produits et de l’étendue potentielle de la substitution des importations, de l’effet potentiel sur les revenus des agriculteurs, de la contribution qu’elle apporterait à l’atténuation du changement climatique, de l’effet sur la biodiversité et la fertilité des sols, et du potentiel de réduction de l’apport externe nécessaire d’engrais minéraux et de pesticides)”.

Le développement de la production de tourteaux de colza et de tournesol (le tourteau protéiné représente environ 60 % de la graine et l’huile 40 %) a assuré un minimum d’autosuffisance à l’Union européenne. Les importations de tourteaux de soja ont diminué, en particulier par rapport au sommet de 2007.

Alors que la consommation alimentaire de l’huile de colza s’est stabilisée depuis des décennies, le développement d’une offre européenne croissante en tourteaux protéinés n’a été rendu possible qu’en trouvant des alternatives commerciales pour l’huile.

Il est donc évident que la production de biocarburants à partir d’huiles végétales et de céréales européennes est essentielle (et aujourd’hui la seule option quantitative d’envergure) pour améliorer et sécuriser la disponibilité de volumes de protéines végétales produites localement et utilisées comme source d’alimentation animale, limitant les importations.

Les biocarburants à base d’huile de palme – même ceux à base d’huiles de cuisson usagées, parfois importées – ne font pas sens pour l’UE, tant dans une perspective environnementale qu’économique. A noter que ce rapport n’aborde pas le sujet de l’utilisation durable de l’huile de palme dans l’industrie alimentaire de l’UE, qui est un sujet où les raccourcis gagneraient à être évités.

Dès lors, la question qui se pose aujourd’hui est celle de la cohérence de la proposition REDII de la CE aujourd’hui sur la table, proposition qui éliminerait dans une large mesure les biocarburants conventionnels, sans aucune justification.

L’absence d’une vision stratégique commune interpelle. Acceptons-nous les mots croissance, rentabilité et compétitivité pour nos systèmes alimentaires et notre agriculture, ou favorisons-nous une vision de déclin ?

Est-ce que nous voulons cultiver des forêts dans toute l’UE plutôt que des cultures, et limiter l’agriculture au mieux à fournir notre alimentation, avec les importations pour répondre aux autres demandes des citoyens de l’UE, qu’elles soient liées à la chimie verte, à l’énergie verte… ?

Voulons-nous utiliser l’agriculture de l’UE comme levier pour une économie verte ou bien y-a-t-il en réalité d’autres priorités économiques à l’agenda politique, par exemple la sécurité de la position des combustibles fossiles et l’encouragement des biocarburants à base d’huile de palme via les huiles de cuisson usagées ?

Cette deuxième option impliquerait de se préparer à une augmentation constante du budget de la PAC, à un abandon total de l’orientation du marché de notre agriculture, pour une dépendance à l’égard des importations, et génèrerait des fluctuations supplémentaires des marchés agricoles mondiaux.

Si, au contraire, l’objectif est d’être sérieux et de promouvoir une véritable ambition de notre agriculture et de nos industries connexes basées sur la croissance verte ; il doit être reconnu que les biocarburants conventionnels, à base de matières premières agricoles issues de l’UE sont un élément clé du développement de ces systèmes alimentaires.

La proposition actuelle REDII présentée par la Commission et maintenant en débat au Parlement européen et au Conseil propose à courte échéance la réduction drastique de la production européenne de biodiesel à base d’oléagineux.

Dans les faits, elle aurait pour conséquence :

-plus de consommation d’énergie fossile et de biocarburants d’importation aux bilans environnementaux douteux (l’émergence de biocarburants européens de 2nde génération prenant plus de temps que le « pieux » postulat énoncé par la Commission)

– mais aussi plus d’importation de protéines végétales car elle implique de faire une croix sur les 9,3 millions de tonnes annuels de tourteaux de colza UE liés à la filière colza biodiesel.

***

Alors que la Commission européenne relance la réflexion sur un nouveau plan protéine, destiné à réduire la dépendance européenne à l’importation de soja et de tourteaux de soja en provenance des Amériques, cette analyse des évolutions politiques montre l’efficacité relative des différentes initiatives engagées par l’Europe en la matière.

Depuis 2000, l’Union européenne a lancé plus d’une demi-douzaine d’initiatives pour accroître sa production de plantes protéagineuses et oléo-protéagineuses. L’analyse des évolutions de marché sur la période 2000-2016 montre clairement que deux leviers se sont révélés efficaces pour encourager le développement de la filière avec un rebond considérable :

– d’une part le développement de la filière biocarburants, qui constitue aujourd’hui le plan protéine le plus vaste par son ampleur et sa capacité à réduire la dépendance européenne aux importations de soja.

– d’autre part, et plus récemment, le verdissement de la PAC de 2013, et en particulier l’autorisation de cultures fixatrices d’azote sur les Surface d’intérêt écologique, qui a permis le doublement, voir plus, des volumes produits, en Europe, de pois, fèves et féveroles ou encore de soja.

Il est surprenant de noter que ces deux piliers de la politique européenne, qui ont permis sans conteste d’engranger des résultats concrets, sont aujourd’hui remis en cause par la Commission européenne, elle-même.

D’un côté la remise en cause de l’usage des pesticides sur les Surfaces d’intérêt écologique compromet la dynamique engagée depuis 2013 ; d’un autre, dans le cadre du débat engagé dans le cadre de la révision de la Directive sur la promotion des énergies renouvelables (REDII), la Commission omet totalement cet atout de la filière biocarburants et menace de faire péricliter la filière, alors même qu’elle permet de renforcer la durabilité des transports et la résilience de son secteur agricole au sein de l’Union européenne.

Pour l’avenir, tout plan protéine d’ambition devra intégrer :

  • –  la capacité de la filière biocarburant à jouer à plein son rôle,
  • –  et de façon complémentaire, il sera essentiel de continuer à construire un verdissement intelligent de la PAC associant approche économique et environnementale, sans idéologie, avec pragmatisme et volontarisme. Il est certain que les cultures fixatrices d’azote ont toute leur place dans cette stratégie.

Déverrouiller le potentiel de la chaine d’approvisionnement alimentaire de l’UE

Octobre 2017

Déverrouiller le potentiel de la chaine d’approvisionnement alimentaire de l’UE – Pour une approche commune équilibrée,  Gérer les pratiques commerciales injustes (UTPs)

1 INTRODUCTION

2016 a été un bon cru pour le débat autour de la chaine alimentaire au niveau européen. Le processus a été déclenché par l’AMTF, ou Agricultutral Markets Task Force, à l’initiative du Commissaire Hogan. Réexaminant la place occupée par les agriculteurs au sein de la chaîne d’approvisionnement, ce groupe de travail a émis un certain nombre de préconisations sur différents sujets, comme les pratiques commerciales en vigueur sur les marchés agricoles ou la contractualisation.

Le rapport a fait l’objet de vastes débats au sein du Conseil Agricole dont les Conclusions publiées en décembre 2016 intitulées « Pour un renforcement de la place des agriculteurs dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire et le traitement des pratiques commerciales injustes (UTP) » dénonçait clairement le déséquilibre des négociations menant souvent à des pratiques commerciales injustes, et formulait le besoin de tous les acteurs de la chaîne de se trouver un terrain de jeu commun.

L’ATMF n’a pas été le seul projet visant à améliorer le fonctionnement de la chaîne alimentaire européenne. Le Parlement européen s’est également montré très actif en la matière, et ses dernières positions ont été adoptées en juin 2016 avec une nouvelle résolution sur les « Pratiques Commerciales Injustes » au sein de la Chaîne d’Approvisionnement Européenne qui plaide ouvertement en faveur de l’établissement d’un cadre juridique européen permettant de traiter les pratiques injustes. De même, plus récemment, des avancées considérables ont été faites, sous l’impulsion du Parlement européen, au-delà des pratiques commerciales, dans le cadre de l’Omnibus règlementaire en matière de structuration de la chaine alimentaire, tant au sein des Organisations de Producteurs que des Organisations Interprofessionnelles.

Dans le même ordre d’idée, le Comité Economique et Social Européen est venu renforcer la résolution du Parlement Européen avec son Avis d’octobre 2016 adopté en session plénière (« Pour une chaîne d’approvisionnement agro-alimentaire plus juste) insistant sur la nécessité de définir une législation cadre au niveau européen et d’agir sans attendre pour prévenir les pratiques commerciales injustes.

Dans ce contexte, il est attendu de la Commission qu’elle revienne avec un projet dans les mois prochains et qu’elle réponde à la fois aux acteurs et aux institutions sur la manière de rééquilibrer les relations entre les différents maillons de la chaîne alimentaire, déverrouillant ainsi le potentiel de l’ensemble à l’intérieur d’un cadre règlementaire commun et explicite.

Ce papier est la contribution de Farm Europe à ce débat, que l’on veut ouvrir largement dans le but d’améliorer sur le long terme la structure de cette chaîne de valeur ajoutée qui occupe toujours la première place dans l’économie européenne.

2 POURQUOI UN NOUVEAU CADRAGE ? A QUELS RESULTATS EST-ON DÉJÀ PARVENU ?

Les discussions sur le besoin de rééquilibrer les relations au sein de la chaîne alimentaire ne sont pas nouvelles à l’échelon européen. Toutes les institutions y ont participé, au gré des initiatives des différents acteurs. Mais cela ne s’est jamais soldé par des mesures concrètes.

Bien au contraire. En 2013, sept associations européennes, sous l’impulsion du Commissaire Verheugen, ont lancé la SCI (Supply Chain Initiative ou Projet de gestion de la chaîne logistique), initiative privée sur la base du volontariat dont le but était d’améliorer l’équité des rapports commerciaux dans l’ensemble de la chaîne alimentaire.

Depuis lors, on a pu constater certaines avancées dans la promotion des changements culturels ou dans l’amélioration de l’éthique des affaires, mais on a également relevé un certain nombre de manquements dans l’analyse de sa mise en œuvre effective : faiblesse dans la gouvernance, défaut de transparence, manque de mesures contraignantes ou de pénalités, peu de barrières efficaces contre les pratiques commerciales injustes et impossibilité pour les victimes potentielles de déposer plainte de manière anonyme, aucune procédure d’investigation réalisée par un organisme indépendant et sous-représentation des PME et des agriculteurs.

D’autre part, un regard neuf sur ce qui se passe au niveau national peut nous donner une meilleure idée du cadre dans lequel le débat européen se déroule.

Il est très clair que les premiers problèmes dans ce domaine sont apparus au niveau des Etats membres. Tous ont activement recherché des solutions, d’une manière ou d’une autre. Pour résumer ce qui se passe dans les différents Etats membres, il convient d’établir un certain nombre de distinctions :

  • Quatre types de modèles coexistent : régulation (RU, Espagne, Italie,…), autorégulation (Belgique), régulation mixte (Espagne, RU), régulation horizontale et pays dénués de toute régulation spécifique des pratiques commerciales déloyales (Danemark, Suède, Luxembourg,…)
  • Lorsque la régulation est cadrée et contrôlée par les autorités, le travail est fait soit par le ministère des finances (France), soit par les autorités de la concurrence (Allemagne), soit par les ministères de la sécurité alimentaire et de l’économie (Portugal) ou de l’agriculture (Espagne). [1]

Néanmoins, à la lumière des faits, on peut conclure qu’en dépit des efforts déployés, l’auto-régulation ou les approches basées sur le volontariat ne suffisent pas à rétablir l’équilibre dans la chaîne alimentaire, et – plus grave encore – les disparités entre les systèmes nationaux en vigueur ne permettent pas aux acteurs de se retrouver sur un pied d’égalité et nuisent au bon fonctionnement du marché intérieur, alors que, dans le même temps, la fragmentation des marchés soumet les opérateurs de la chaîne d’approvisionnement à des contraintes différentes, à un cadre règlementaire peu fiable et relativement inefficace.

3 UN ENSEMBLE DE PROPOSITIONS CONCRETES

Si l’Europe veut une chaîne alimentaire forte et équilibrée, capable de se partager équitablement la valeur ajoutée, à même de renforcer la place des producteurs, qui sont le maillon le plus fragile, et de générer de la richesse jusqu’au niveau des consommateurs, la Commission doit proposer un cadrage commun sur quelques-unes de ces questions au moins.

Les questions centrales devraient être celles-ci :

a) Définition d’un éventail de principes régissant les relations commerciales au sein de la chaîne alimentaire.

Ces relations au sein de la chaîne alimentaire sont triples : 1) producteur-industrie 2) producteur-distributeur 3) industrie-distribution

Les relations seront à chaque fois régies par des principes d’équilibre et de réciprocité entre les parties, de liberté d’entente, de bonne volonté, de promotion de l’intérêt commun, de répartition juste des risques et des responsabilités, de coopération, de transparence et de respect  de la libre concurrence sur le marché.

b) Identification des pratiques injustes devant être écartées des usages commerciaux.

On a beaucoup publié sur les pratiques commerciales injustes et on les définit de manière générale comme l’ensemble des pratiques imposées à un fournisseur ne respectant pas le principe d’équité dans la relation contractuelle, transférant les déficiences ou les risques sans la moindre compensation.

Ce descriptif très général inclut les domaines suivants :

  • Les changements unilatéraux ou rétroactifs des termes de l’accord (concernant les volumes, les critères de qualité, les prix),
  • Coûts commerciaux non anticipés,
  • Facturation de services fictifs,
  • Transfert de la charge des opérations promotionnelles sur le fournisseur sans négociation ou sans participation de l’acheteur,
  • Reprise sans condition de la marchandise invendue
  • Non respect des délais de paiement définis par la Directive 2011/7/EU,
  • Annulation de contrat injustifiée et sans préavis
  • Enchères électroniques discriminatoires ou dénuées de transparence
  • Avances sur factures en garantie des contrats

c) Contrats écrits.

Aujourd’hui, les relations commerciales imposent la prise en compte d’un ensemble de facteurs complexes – qualité, quantité, prix, rabais, logistique et transport, conditions de livraison… qui ne peuvent être laissés au hasard. De plus, la clarté dans les conditions conditionne la fiabilité et la stabilité des relations et limite le nombre de recours juridiques. Nous proposons de faire des contrats écrits une règle générale s’appliquant aux divers maillons de la chaîne, assortie d’un nombre minimal de critères et de conditions qui deviendraient obligatoires à la demande du fournisseur. Dans le cas des producteurs agricoles, leurs organisations représentatives ou les organismes inter-branches pourraient jouer un rôle essentiel et les représenter à la table des négociations.

d) Application effective de la règlementation L’expérience nous montre les défauts et les limites des modèles de mise en œuvre non contraignants, basés sur le volontariat. La méthode la plus efficace est le contrôle et la supervision exercés par une autorité indépendante, dotée de pouvoirs publics, afin d’assurer l’application effective de l’ensemble des règles définies.

e) Eviter l’effet de crainte. La mise en œuvre devrait être rendue possible à l’initiative d’autorités indépendantes, ou par les opérateurs et leurs organisations. Il est crucial en ce sens de mettre en place un système de recours efficace protégeant l ‘anonymat du plaignant.

f) Sanctions et mise à l’index. Le non-respect de l’ensemble des règles devrait exposer le contrevenant à des sanctions, à caractère dissuasif, allant jusqu’à des dispositions de « mise à l’index » (« name and shame »).

 

Toutes ces propositions devraient constituer un cadre cohérent commun au niveau européen, auquel il convient de donner une existence juridique, en parallèle aux évolutions positives du droit de la concurrences prévues au titre de l’Omnibus PAC et qui sont à même de rééquilibrer les rapports de force au sein de la chaine. Les Etats Membres garderaient évidemment un maximum de latitude dans l’application effective du cadre général, car ce qui compte, c’est le résultat final. D’autre part, les us et coutumes ne peuvent pas changer du jour au lendemain, la prise de conscience se fera dans le temps.

Enfin, le modèle dans son ensemble devrait être complété au niveau national par une participation effective des différents acteurs, par le biais de l’adoption de codes de conduite ou d’accords, sur la base du volontariat, visant à une meilleure application d’un système complet. En ce sens, le travail déjà réalisé tant à l’échelon européen que national doit servir de base de départ, et il en va de même pour l’ensemble des principes définis dans le cadre du SCI (Supply Chain Initiative).

 

[1] pour une information plus détaillée voir l’étude commandée par l’Agence Espagnole d’information et de contrôle alimentaires (AICA) ” Informe sobre la aplicacion de la regulacion de practicas comerciales en los paises UE” 2016. www.aica.gob.es

L’AGRICULTURE, SOURCE DURABLE DE PRODUITS ALIMENTAIRES ET NON-ALIMENTAIRES

Octobre 2017.

L’agriculture est fournisseur de produits non-alimentaires, ce n’est pas chose nouvelle. L’agriculture, y compris l’élevage et l’exploitation forestière, est traditionnellement fournisseur de fibres, de carburants, de matériaux de construction et d’autres matériaux tels que le cuir et les peaux.

Ce qui est nouveau, c’est le volume et la variété des produits provenant des matières premières agricoles de base, nécessitant d’importantes mises de fonds de la part des agriculteurs et du secteur agro-industriel au sens large.

Cette contribution vise à prendre la mesure de ce domaine prometteur et à souligner son importance pour l’économie.

Parallèlement aux usages traditionnels des matières premières provenant de l’agriculture, de l’élevage et de l’exploitation forestière qui demeurent importants, de nouveaux usages se sont développés rapidement au cours des dernières décennies.

Pour ne citer que les exemples les plus parlants : l’utilisation d’une grande quantité de produits agricoles et de biomasse pour la production de biocarburants, l’utilisation d’oléagineux pour la fabrication de produits oléo-chimiques, l’utilisation croissante de l’amidon dans une large gamme de produits, dont des polymères entrant dans la

composition de plastiques biodégradables, ou l’utilisation croissante de fibres dans l’industrie textile ou l’automobile.

Carburants, fibres, huiles, solvants, teintures, résines, protéines, produits chimiques spécialisés, produits pharmaceutiques, tous ces produits sont peu ou prou d’origine agricole. Ces produits présentent nombre d’avantages par rapport à des produits semblables d’origine différente, les carburants d’origine fossile en donnant un exemple :

– ils sont meilleurs pour l’environnement, générant moins de gaz à effet de serre

– ils produisent moins de déchets et de pollution

– ils sont source de bénéfices sociaux lorsqu’ils stimulent les communautés rurales par l’installation d’industries locales et par l’ouverture de nouveaux marchés pour les agriculteurs

– ils améliorent la compétitivité économique de l’agro-industrie par le biais de l’ouverture de nouveaux marchés et de l’élaboration de nouveaux produits

Cette bio-économie est également source de nombreux emplois en dehors du simple secteur agricole: dans l’UE, les produits non alimentaires d’origine biologique représentent 2,7 millions d’emplois, chiffre qui démontre à lui seul la pertinence actuelle de la bio-économie.

AMIDON, PRODUITS OLEO-CHIMIQUES ET FIBRES

Les plantes sont capables de synthétiser une gamme de composants très large. Véritables «usines cellulaires» elles contiennent des structures qui peuvent être utilisées à la fois par la physique, la chimie et la biochimie pour produire des matériaux très utiles tels que les fibres, l’amidon, les huiles, les solvants, les teintures, les résines, les protéines, la chimie spécialisée et les produits pharmaceutiques.

Certaines utilisations non alimentaires des végétaux – comme pour la production textile – sont très connues. D’autres le sont moins, comme la fabrication de plastique à partir de polymères à base d’amidon. Cela a des répercussions sur le comportement des consommateurs – par exemple dans le choix de produits écologiques ou dans la collaboration avec les stratégies de traitement des déchets du fait des avantages des matériaux biodégradables.

On utilise déjà de nombreuses applications industrielles de matériaux végétaux. On estime par exemple que 15% de la production oléo-chimique à base de plantes part sur les marchés non alimentaires. Environ la moitié des 9 millions de tonnes d’amidon produites dans l’UE à partir de maïs, de blé ou de pommes de terres part dans le non alimentaire. Ces dernières années ont vu un intérêt grandissant pour des applications particulières telle que l’usage de fibres naturelles comme matériaux de construction ou en remplacement de la fibre de verre dans les matériaux composites, par exemple dans

l’industrie automobile. Certains de ces usages se font en masse alors que d’autres intéressent particulièrement des entreprises de petite taille ou de taille moyenne à la recherche de nouveaux marchés très innovants.

Pour donner une idée de l’importance des moyens mobilisés par les agriculteurs qui produisent les matières premières, plus de 1,2 millions d’hectares à travers l’UE sont consacrés à la production d’amidon et de produits oléo-chimiques. Cette surface est l’équivalent de l’ensemble des terres agricoles de Belgique.

De même, la part des produits écologiques, renouvelables et biodégradables dans l’UE ne doit pas être sous-estimée. On trouve au premier rang la consommation de tensio- actifs dont 50% sont de source renouvelable. Il y a également un marché de plus en plus important pour les lubrifiants, les solvants et les polymères d’origine renouvelable.

La physique, la chimie et la génétique peuvent se conjuguer pour produire de nouvelles applications. La recherche dans ce domaine prometteur est une nécessité absolue et il faudrait inciter la Commission Européenne à allouer des ressources appropriées au développement des usages non alimentaires de la production agricole.

BIOCARBURANTS

Le secteur des biocarburants est l’un des exemples les plus frappants d’utilisation non alimentaire de matières premières agricoles, en particulier du colza pour la production de diésel, du blé, du maïs et de la betterave pour le bioéthanol.

En 2014, 13 millions de tonnes de biocarburants ont été produits en Europe. Le biodiésel représentait 72% du volume total, le bioéthanol atteignant 28%.

Le biodiésel

Le biodiésel est un carburant renouvelable qui peut être produit à partir d’oléagineux cultivés et transformés sur place (colza essentiellement, graines de tournesol ou soja). Aujourd’hui le biodiésel produit dans l’UE provient d’abord du colza, qui représentait 55% de la production totale en 2014, et 49% en 2015.

Le colza utilisé pour la production de biodiésel est cultivé au sein de l’UE en tête d’assolement, ce qui signifie que cette production agricole vient à la suite d’une séquence de culture céréalière, et joue un rôle vital dans la diversification des productions, la prévention des maladies des végétaux, la gestion des mauvaises herbes, la reconstitution du niveau de nutriments dans les sols et du niveau de nitrogène et dans l’amélioration de la structure des sols.

L’introduction d’espèces alternatives (têtes d’assolement) dans les séquences de cultures stimule les rendements et réduit les besoins d’apports pour les récoltes suivantes. En effet, la culture du colza diminue l’apport nécessaire d’engrais et participe ainsi à la réduction des gaz à effet de serre.

Néanmoins, la part que le colza représente dans l’ensemble des matières premières utilisée pour produire du biodiésel dans l’UE a considérablement diminué par rapport aux 100% initiaux et aux 60% de 2012. Cela est dû en majeure partie à l’utilisation croissante de l’huile de palme par de nouvelles usines utilisant de l’huile végétale hydrogénée.

En Europe, l’utilisation de l’huile de palme pour la production de biodiésel a augmenté de plus de 3 millions de tonnes par an, précipitant la déforestation à Sumatra et en Indonésie, minant ainsi les efforts initiés par le secteur agro-alimentaire qui se tourne de préférence vers une production d’huile de palme certifiée, luttant ainsi contre le développement de productions non durables.

L’huile végétale recyclée ou issue d’un usage ménager (UCO) est également utilisée pour la production de biocarburants dans l’UE, avec une part des importations qui augmente (l’huile de cuisson recyclée représentait en 2015 la troisième source de matières premières pour la fabrication de biodiésel).

Le recours à l’UCO pour la production des biocarburants nouvelle génération est controversé car les volumes d’UCO pouvant être collectés en Europe ne dépassent pas quelques litres par personne et par an ou 1% du volume de carburant diésel consommé par personne sur les routes européennes.

Ainsi tous les marchés sur lesquels ce biocarburant se développe auront essentiellement recours à l’UCO d’importation. Cette donnée est importante car, en dehors de l’Europe, l’UCO n’est pas considérée comme un déchet car elle peut être utilisée comme matière première pour l’alimentation animale. La préférence européenne pour un usage non alimentaire est tout à fait discutable et se trouve en contradiction avec la directive cadre sur les déchets qui préconise de ne jamais produire de déchets lorsque cela peut être évité.

Bioéthanol

En Europe, l’éthanol renouvelable est produit essentiellement à partir de maïs, puis à partir de blé et de sucre, d’origine européenne. En pratique, l’industrie européenne de production d’éthanol n’importe plus de matières premières non européennes.

De plus, les raffineries de l’UE produisant du bioéthanol sont les plus perfectionnées au monde en termes de co-production, générant chaque année un éventail plus important de produits de grande valeur pour la bioéconomie. Alors qu’en 2009 les bioraffineries les plus perfectionnées produisaient uniquement des aliments pour le bétail et de l’éthanol, elles fabriquent aujourd’hui éthanol, nourriture pour le bétail, huile végétale, produits nutraceutiques, alimentation humaine, bioélectricité, et engrais.

Cadre légal de l’UE

La Commission Européenne a émis des propositions dans le cadre d’une révision de la RED (directive sur les énergies renouvelables) dans le but de mettre un terme à la production de biocarburants conventionnels ou de première génération à partir de matières premières alimentaires.

Néanmoins, les faits sont très clairs : les biocarburants provenant de l’UE n’ont aucun effet négatif sur les ressources disponibles ou sur les prix. Au contraire, ils ont un impact positif sur les terres agricoles, sur la décarbonisation de l’environnement et des transports.

1) Non seulement les biocarburants d’origine européenne n’ont pas entravé la production d’alimentation humaine ou animale ….

Depuis 2008, la production de biocarburants dans l’UE a augmenté de 68% alors que les prix des denrées alimentaires ont chuté de 20% au niveau mondial.

Si l’on regarde de plus près le lien entre la production de biocarburants conventionnels dans l’UE et les approvisionnements en alimentation humaine et animale, on constate que la production européenne de matières premières utilisées pour la fabrication de biocarburants (colza, blé, maïs et sucre) a soit augmenté, ou est demeurée stable ( du fait des quotas dans le cas du sucre), grâce à des gains de productivité.

Les biocarburants d’origine européenne n’ont pas supplanté la production alimentaire humaine ou animale et n’ont eu aucun impact sur les prix. Bien au contraire, les biocarburants ont permis de lutter plus efficacement contre les revers des marchés alimentaires, apportant une certaine stabilité économique aux fermiers européens en difficulté, sans nuire pour autant à l’approvisionnement en alimentation humaine et animale. On estime que la production de biocarburants d’origine végétale génère, dans l’UE, plus de 6.6 millions d’euros de revenu direct pour les agriculteurs.

De plus, l’industrie du bioéthanol aurait crée 70 000 emplois directs ou indirects depuis que l’UE a lancé sa politique en faveur des biocarburants, et dans le même temps le secteur du biodiésel aurait créé 220 000 emplois directs ou indirects dans l’ensemble de la chaîne de production.

2) mais ils ont contribué à améliorer la sécurité alimentaire européenne et mondiale

Autre impact très positif de la fabrication de biocarburants dans l’UE – la production d’alimentation protéinée comme co-produit.

L’Europe est dépendante des importations d’alimentation animale à base de soja à hauteur de 70% pour couvrir les besoins des éleveurs. L’industrie européenne des

biocarburants transformant le colza et les céréales produit aujourd’hui environ 13 millions de tonnes par an de nourriture riche en protéines qu’il n’est plus nécessaire d’importer du continent américain.

Il est à noter que la réduction des importations en provenance du continent américain se traduit par une disponibilité alimentaire croissante de ces régions et que cela profite à tous les consommateurs à travers le monde, contribuant ainsi à améliorer la sécurité alimentaire au niveau mondial.

3) Les biocarburants européens produits à partir de matières premières européennes sont une réponse immédiate et efficace à la décarbonisation des transports

Quant à la question des avantages que les biocarburants représentent pour le climat, par rapport aux énergies fossiles, il faut noter que les transports sont responsables de 25% des émissions de gaz à effet de serre en Europe. Ce secteur est au cœur du défi climatique et les biocarburants sont une alternative aux énergies fossiles.

Les biocarburants dans l’UE doivent se soumettre à de stricts critères de durabilité permettant de s’assurer que leur production et leur usage ne nuisent pas à l’environnement. Ces critères incluent un taux minimum d’économie d’émission directe de gaz à effet e serre (35% par rapport aux énergies fossiles en 2009, atteignant 50% en 2018), ainsi que des restrictions s’appliquant aux terres pouvant être consacrées aux cultures de matières premières destinées à la fabrication de biocarburants. Les biocarburants fabriqués aujourd’hui à partir de matières premières d’origine européenne produisent des résultats encore meilleurs.

En dépit de l’intérêt économique et climatique de la production de biocarburants conventionnels, et de l’absence d’effets négatifs sur les approvisionnements en alimentation humaine et animale, la Commission propose d’en limiter l’utilisation à 3,8% de la consommation énergétique de l’UE d’ici 2030. Notons que l’UE a fixé un objectif de 7% d’utilisation de biocarburants dans le secteur des transports.

4) La Commission propose de diminuer la production de biocarburants conventionnels, sans qu’aucun fait ou aucune analyse ne viennent étayer ses propositions

Cette proposition met également en péril l’émergence de biocarburants de seconde génération qui, pour se développer, ont besoin d’un soutien fort du secteur des biocarburants conventionnels.

Ce qui rend les choses plus inacceptables encore, c’est que la Commission semble ignorer que l’UE est aujourd’hui importatrice de biocarburants. Une décision éclairée de promouvoir une production équilibrée et locale de biocarburants dans l’UE se traduira

par une baisse des importations de biocarburants en provenance de pays tiers aux pratiques durables incertaines à chaque fois que l’on produira localement davantage de biocarburants. Le volume de matières premières destinées à la production de biocarburants exportées dans l’UE par les pays tiers, diminuera, de même que les importations UE de nourriture animale. De plus, l’ensemble des pays tiers pourrait utiliser les ressources foncières ainsi libérées pour les besoins du reboisement ou de la sécurité alimentaire.

L’huile de palme figure au premier rang des biocarburants d’importation. A la suite de la proposition de la Commission portant sur les « biocarburants d’origine agricole », l’UE s’est trouvée prisonnière de la forte augmentation des importations.

Le seul élément consensuel, provenant des données scientifiques, est l’impact négatif de l’huile de palme d’origine non durable, surtout dans le contexte de la déforestation d’écosystèmes riches en carbone et en biodiversité. L’utilisation de l’huile de palme pour la production de biocarburants a augmenté, contribuant par là-même à la déforestation en Indonésie et à Sumatra.

RED II devrait être à même d’apporter une réponse adaptée à ces questions liées à l’utilisation de biocarburants à base d’huile de palme dans l’UE, au lieu d’entraver la production européenne durable de biocarburants.

Si l’objectif est véritablement de lutter contre le changement climatique tout en améliorant la sécurité alimentaire et l’emploi, il est nécessaire de promouvoir les biocarburants d’origine européenne cogénérateurs de protéines.

Il est en effet grand temps de retourner aux faits et d’affronter les positions populistes qui trouvent dans les biocarburants l’explication des famines et des pénuries. Bien au contraire, les biocarburants conventionnels sont générateurs d’emploi, d’augmentation des revenus et d’une amélioration de la sécurité alimentaire.

Le débat autour des positions actuelles de la Commission devrait fixer des cibles plus ambitieuses pour l’utilisation des énergies renouvelables dans les transports, et non les effacer. Qui plus est, les critères de durabilité appliqués aux carburants d’origine végétale devraient permettre de privilégier la production d’aliments protéinés, remplaçant les importations et libérant des terres agricoles dans les pays tiers pour la production de nourriture humaine et animale ou pour l’amélioration de l’environnement, en plus de la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Cela serait bénéfique pour l’environnement, créant des emplois et stimulant la croissance tout en diminuant la dépendance de l’UE vis-à-vis des importations d’huile et de nourriture animale protéinée et en améliorant la sécurité alimentaire globale.

CONCLUSION

L’agriculture, y compris l’exploitation forestière et l’élevage, est depuis toujours source de produits non alimentaires, de fibres, de carburant, de matériaux de construction entre autres matériaux tels que le cuir et les peaux.

Ce qui est nouveau, c’est l’ampleur et l’étendue de la gamme de produits issus de matières premières agricoles de base, entrainant les agriculteurs et plus généralement le secteur agro-industriel dans des dépenses importantes. La vitesse à laquelle tout cela s’est mis en place récemment est aussi inédite.

La bioéconomie représente 2,7 millions d’emplois à travers l’UE, en plus des emplois dans le secteur agricole fournissant les matières premières destinées à des usages non alimentaires.

Tous ces produits présentent de sérieux avantages par rapport aux produits d’origine différente, d’origine fossile par exemple, car ils sont bons pour l’environnement, réduisant les gaz à effet de serre, les déchets et la pollution, ils sont source de progrès social en stimulant les communautés rurales par l’installation d’industries locales et ouvrant de nouveaux marchés aux agriculteurs, améliorant la compétitivité économique de l’agro-industrie par la création de nouveaux marchés et de nouveaux produits.

Les terres agricoles européennes ont, dans une très large mesure été utilisées pour des productions non alimentaires, que ce soit des biocarburants, de l’amidon, des produits oléo-chimiques ou des fibres, sans réduire l’approvisionnement en nourriture humaine ou animale, sans impact sur les prix à la consommation. La production de substances oléo-chimiques et d’amidon ont à elles seules valorisé 1,2 millions d’hectares et, dans le même temps, les productions alimentaires humaines et animales ont augmenté, du fait des gains de productivité.

La production non alimentaire est source de revenus pour les agriculteurs, elle est créatrice d’emplois dans les zones rurales les moins favorisées et elle améliore la compétitivité du secteur agro-industriel. La production non alimentaire est un sous- secteur très diversifié, qui a un avenir prometteur.

Les politiques publiques devraient encourager le développement de la bio économie par le biais, entre autres, de la recherche appliquée. Les politiques publiques devraient se baser sur la réalité des faits, étendre et renforcer les mandats existants dans le domaine des biocarburants, et ainsi contribuer à la décarbonisation des carburants utilisés pour le transport.

Les biocarburants : pour une politique basée sur les faits, au- delà des dogmes populistes

Octobre 2017

Dans le contexte de la révision de la RED (directive sur les énergies renouvelables), la commission européenne a émis une proposition qui vise à diminuer significativement la production de biocarburants conventionnels ou de première génération, produite à partir de matières premières européennes.

Pourquoi envisager de supprimer les biocarburants conventionnels ? Ne permettent-ils pas de diminuer les émissions de gaz à effet de serre, et donc d’atténuer le changement climatique, comme certains le prétendent ? Sont-ils une gêne pour la production de denrées alimentaires à destination du consommateur européen et des citoyens du monde en général, comme la doctrine de certaines ONG semble l’affirmer ?

Passons d’abord les faits en revue, contrastons ensuite ces données avec les propositions actuelles de la Commission, avant de conclure par ce qui devrait être fait dans le plus grand intérêt de l’UE.

Dans le débat actuel, il est crucial que les institutions européennes parviennent à résister aux positions populistes peu fiables reposant souvent sur des faits erronés.

L’intérêt de l’UE est de promouvoir des politiques qui atténuent le changement climatique et favorisent la croissance et les emplois tout en évitant d’entraver l’approvisionnement en denrées alimentaires des consommateurs en Europe et en dehors de l’Europe. Il est nécessaire de s’opposer aux « dogmes » lorsque ces dogmes ne sont rien que des revendications dénuées de fondement et des prises de position destinées à discréditer les biocarburants.

Green Energy Platform – EU Agriculture as a provider of bioenergy. LES FAITS

1) Les biocarburants d’origine européenne n’ont pris la place d’aucune production alimentaire animale ou humaine

La perception des biocarburants par le grand public a changé de manière spectaculaire en 2007, d’une vision positive de ces produits contribuant à atténuer le changement climatique et pouvant remplacer durablement les énergies fossiles, à une vision négative de ces produits entrant en concurrence avec la production alimentaire et à ce titre responsables des hausses de prix.

Néanmoins, il apparaît clairement aujourd’hui que ce sont les sommets atteints par le prix du pétrole qui, ayant affecté le prix de toutes les denrées, ont provoqué une flambée des prix de l’alimentation en 2007/2008. L’impact des biocarburants a été très limité.

L’organisation mondiale chargée de l’alimentation l’affirme. L’étude menée en 2006 par le haut comité d’experts de la FAO (HPLE 26), a montré que la hausse brutale des prix a résulté de plusieurs facteurs : l’impact de la hausse des prix du pétrole sur le coût des intrants et du carburant pour les agriculteurs, l’augmentation de la demande alimentaire conjuguée au passage à des régimes alimentaires riches en protéines animales dans les grandes économies émergentes, l’influence de la gestion des stockes de céréales en Chine, les événements climatiques frappant les principaux pays exportateurs, un ralentissement des gains de productivité agricoles, ainsi que la spéculation. Qui plus est, l’impact des biocarburants sur le prix des denrées est, semble-t-il trop faible pour être quantifié, comme l’affirmait récemment le meilleur spécialiste de la question à la Banque Mondiale.

Pour ceux qui aiment les arguments contradictoires, les prix de la nourriture humaine et animale fournit un bon exemple et corrobore la thèse selon laquelle les biocarburants n’ont pas une influence significative sur les prix de l’alimentation.

Il apparaît que la production de biocarburants n’a pas cessé d’augmenter depuis 2007/2008, alors que les prix des productions agricoles ont chuté depuis 2010. Depuis 2008, la production de biocarburants européens a augmenté de 68% alors que les prix des denrées alimentaires ont chuté de 20% au niveau mondial.

Si l’on s’intéresse de plus près au lien entre la production de biocarburants conventionnels dans l’UE et les approvisionnements en alimentation animale et humaine, on s‘aperçoit que l’accroissement de la première a permis un accroissement de la production UE d’alimentation.

La production européenne des principales matières premières à partir desquelles le biocarburant est fabriqué (colza, blé, maïs et sucre) a soit augmenté (même doublé dans le cas

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du colza), soit est demeurée stable (du fait des quotas dans le cas du sucre), et ceci

essentiellement grâce aux gains de productivité.

Dans ce contexte, les biocarburants d’origine européenne n’ont pas porté atteinte à la production d’alimentation humaine et animale et n’ont pas eu de réel impact sur les prix. Au contraire, les biocarburants ont contribué à limiter les effets néfastes des retournements de tendance des marchés alimentaires, procurant une certaine stabilité économique aux agriculteurs européens en difficulté, évitant non seulement les effets pervers sur les approvisionnement en alimentation humaine et animale, mais produisant également des résultats très positifs dans l’union européenne, par la fabrication de nourriture de très haute qualité riche en protéines come sous-produits.

2) Les biocarburants d’origine européenne améliorent la sécurité alimentaire en Europe et dans le monde

L’Europe est encore dépendante des importations de soja à 70% pour répondre à la demande des éleveurs.

Les importations de tourteaux de soja ont baissé, surtout par rapport aux sommets atteints en 2007, du fait de l’augmentation de la production de nourriture protéinée d’origine végétale dans l’UE qui a permis de réduire les importations chaque année de presque 13 millions de tonnes de nourriture protéinée, réduisant d’un tiers le déficit européen en la matière.

En effet, l’augmentation de la production de tourteaux de colza et de tournesol co-générée avec la production de biodiesels de Colza et tournesol (les aliments protéinés représentent environ 60% et l’huile 40%) a diminué, à elle seule, la dépendance grâce à une production supplémentaire de 10 millions de tonnes.

Alors que la consommation alimentaire d’huile de colza est stable depuis des décennies, le développement en Europe des approvisionnements en nourriture protéinée a été rendue possible par la découverte de débouchés alternatifs pour l’huile, à savoir les biocarburants.

En 2015, les entreprises productrices de bioéthanol ont fabriqué 5 millions de tonnes de nourriture protéinée destinée aux animaux. Cela suffit pour nourrir 3,5 millions de vaches laitières, soit 17% du cheptel laitier de l’UE.

Les usines produisant du biocarburant dans l’UE à partir de colza et de céréales fabriquent environ 13 millions de tonnes chaque année de nourriture protéinée qui devrait être, sinon, importées du continent américain.

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C’est donc bien la preuve que la production de nourriture animale et de biocarburants à partir d’huiles végétales et de céréales européennes est la clé (et le seul choix réaliste aujourd’hui) de l’amélioration et de la sécurisation des approvisionnements en protéines végétales produites localement, pour l’alimentation animale, limitant ainsi les importations.

Il est important de noter que la diminution des importations en provenance du continent américain se traduit par de meilleurs approvisionnements en nourriture humaine et animale en provenance de ces régions, au bénéfice des consommateurs du monde entier, renforçant ainsi la sécurité alimentaire mondiale.

Il apparaît donc assez clairement que la production de biocarburants d’origine agricole dans l’UE vient en complément de la demande alimentaire : l’augmentation de la production n’a eu aucun impact sur les approvisionnements en céréales, en oléagineux ou en sucre, tant pour l’alimentation humaine que pour l’alimentation animale. Il est clair en revanche que la production de biocarburants est indispensable à la production d’alimentation protéinée destinée aux animaux. Son impact sur la sécurité alimentaire européenne et mondiale a donc été positif.

Intéressons-nous maintenant aux avantages comparés des biocarburants et des énergies fossiles

3) Les biocarburants européens produits à partir de matières premières de l’UE sont une réponse immédiate et efficace aux émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports

Le secteur des transports est responsable de 25% des émissions de gaz à effet de serre en Europe. Ce secteur est donc au cœur du changement climatique. Les biocarburants sont une alternative aux énergies fossiles. Dans ce contexte, on s’attend à ce que la part du biodiésel et du bioéthanol augmente car leur rôle d’alternative revêt une importance colossale.

La Stratégie pour une Mobilité à Faible Taux d’Emissions, définie par la Commission Européenne en 2016 a pour objectif que 35% de l’énergie consommée par les transports soit fournie par les biocarburants d’ici 2050, ce qui double la consommation d’électricité renouvelable. Les chiffres montrent que les biocarburants vont continuer à progresser jusqu’à représenter plus de 90% (soit 28,9 million de tonnes d’équivalent pétrole environ) de la demande d’énergie durable en 2020, les autres 3,1 millions de tonnes provenant de l’électricité renouvelable.

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La production de biocarburants et de matières premières dans l’UE doit se conformer strictement aux critères de durabilité afin de faire en sorte que leur production et leur utilisation ne causent aucun dommage à l’environnement, et n’induisent aucun effet pervers au niveau social. Ainsi la directive européenne sur les énergies renouvelables (RED) adoptée en 2009, fixe des critères de durabilité pour l’ensemble des biocarburants consommés dans l’UE.

Ces critères incluent un taux minimum de réduction de gaz à effet de serre (atteignant 50% en 2018, à parité avec les énergies fossiles) ainsi que des restrictions s’appliquant aux types de terres agricoles pouvant être utilisées pour la production des matières premières à partir desquelles les biocarburants sont produits. Ce dernier critère concerne uniquement les changements de destination des terres. Plus précisément, on ne peut pas produire de biocarburants dans de zones qui étaient auparavant riches en carbone, comme les zones humides ou les forêts, ou bien les secteur riches en biodiversité telles que les forêts primaires ou les prairies.

La révision de la Directive sur le Qualité des Carburants (FQD) adoptée en même temps que la directive sur les énergies renouvelables inclut des critères de durabilité similaires et vise une réduction de 6% des gaz à effet de serre émis par les moyens de transports d’ici 2020.

Il est important de noter que pour les gaz à effet de serre, les réductions observées aujourd’hui, certifiées et calculées selon la méthode préconisée par la directive sont très supérieures aux valeurs typiques et aux valeurs par défaut figurant dans cette même directive.

La production européenne d’éthanol, par exemple, a atteint en 2016 une moyenne de 68% de réduction de gaz à effet de serre.

4) Les biocarburants ont également une évidente valeur économique

Ils contribuent à réduire la dépendance de l’UE par rapport aux importations de pétrole. En 2010, le biodiésel représentait 5% du carburant utilisé par les transporteurs routiers dans l’UE. Cela contribue grandement à réduire la dépendance de l’UE par rapport aux importations de pétrole brut. En France par exemple, 98% du pétrole est importé. Cela représente près de la moitié du déficit commercial du pays. En produisant près de 2 millions de tonnes de biodiésel chaque année, la France économise chaque année, 1,5 milliards d’euros.

En ce qui concerne le bioéthanol, en 2014, l’éthanol européen renouvelable a remplacé l’essence à hauteur de 4,8%, une économie de 1,5 million d’euros sur la facture pétrolière européenne. Une utilisation croissante de l’éthanol, en passant au carburant E10, accentuerait les bénéfices et réduirait la consommation de pétrole de 50 millions de barils, économisant

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ainsi 4 milliards d’euros à l’économie européenne, si on se base sur les prix de 2014. Une production de biocarburants améliorée peut donc répondre à l’une des préoccupations essentielles des pays de l’UE, tout en répondant à la demande intérieure d’énergie.

On peut ajouter au point précédent que la production de biocarburants à partir de matières premières agricoles européennes profite aux revenus agricoles européens, assurant une stabilité de la demande à long terme, des prix situés en haut de la fourchette pour les agriculteurs vendant aux raffineries voisines. On estime que la production de biocarburants à partir de matières premières agricoles dans l’UE génère au bas mot 6,6 milliards d’euros en revenu direct pour les agriculteurs de l’UE.

Plus précisément, comme cela apparaît dans un rapport récent du parlement européen, « la politique de l’UE en faveur des biocarburants soutient l’emploi, surtout dans les zones rurales ». Il apparaît que le secteur des biocarburants a généré plus de 220 000 emplois directs et indirects dans la chaîne de production. Ce qui ne saurait être négligé à l’heure du chômage de masse.

Il ne faut pas non plus oublier qu’une limitation de l’utilisation des biocarburants causerait de véritables dommages économiques aux agriculteurs, se traduirait par des pertes d’emplois et de richesse pour les régions où les raffineries sont implantées.

LES DERNIERS PROPOSITIONS DE LA COMMISSION : revenir aux faits et affronter le populisme

Les biocarburants d’origine européenne et cogénérateurs de protéines doivent être favorisés si l’objectif est effectivement de combattre le changement climatique tout en améliorant la sécurité alimentaire et en créant des emplois.

En dépit des avantages climatiques et économiques de la production de biocarburants conventionnels européens, et de l’absence d’effets pervers sur l’approvisionnement en nourriture humaine et animale, la commission propose de diviser ces marchés de moitié en limitant leur usage à 3,8% maximum de l’énergie totale consommée dans l’UE d’ici 2030. Souvenons-nous à cet égard que l’UE a fixé à 7% la part des biocarburants dans la consommation du secteur des transports pour 2020.

La Commission entend ainsi réduire la production des biocarburants conventionnels sans se préoccuper des faits et sans analyse permettant d’étayer ses propositions.

Ce qui rend les choses plus inacceptables encore, c’est que la Commission semble ignorer que l’UE est aujourd’hui importatrice de biocarburants. Une décision éclairée de promouvoir une

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production équilibrée et locale de biocarburants dans l’UE se traduira par une baisse des importations de biocarburants en provenance de pays tiers aux pratiques durables incertaines, à chaque fois que l’on produira localement davantage de biocarburants. Le volume de matières premières destinées à la production de biocarburants exportées dans l’UE par les pays tiers, diminuera, de même que les importations de nourriture animale. De plus, l’ensemble des pays tiers pourrait utiliser les ressources foncières ainsi libérées pour les besoins du reboisement ou de la sécurité alimentaire.

L’huile de palme figure au premier rang des biocarburants d’importation. A la suite de la proposition de la Commission portant sur les « biocarburants d’origine agricole », l’UE s’est trouvée prisonnière de la forte augmentation des importations.

Le seul élément consensuel, provenant des données scientifiques, est l’impact négatif de l’huile de palme d’origine non durable, surtout dans le contexte de la déforestation d’écosystèmes riches en carbone et en biodiversité. L’utilisation de l’huile de palme pour la production de biocarburants a augmenté, contribuant par là-même à la déforestation en Indonésie et à Sumatra. L’utilisation d’huile de palme pour produire du biodiésel dépasse 3 millions de tonnes par an, cela minant les efforts engagés par la filière agro-alimentaire qui privilégie la production d’huile de palme certifiée afin de lutter contre le développement de la production non durable (la capacité de production d’huile de palme dans le monde est passée de 45 million de tonnes par an à plus de 60 million en cinq ans, la production européenne de biodiésel représentant 1/5 de cette croissance). Cette question doit être traitée, y compris par le biais d’accords commerciaux cohérents, mais, dans ce domaine, la Commission demeure muette. RED II devrait être à même d’apporter une réponse adaptée à ces questions liées à l’utilisation de biocarburants à base d’huile de palme dans l’UE.

De plus, certaines dispositions spécifiques prévues dans la directive ILUC (changement indirect de l’utilisation des terres) ont mené au choix très discutable d’importer des huiles de cuisson usagées (UCO) qui ne sont généralement pas considérées comme des déchets à l’extérieur de l’UE où on les utilise pour l’alimentation du bétail ou comme carburant, de préférence aux huiles usagées locales, ou au colza.

Les propositions de la Commission favorisent également les énergies fossiles produites à partir de déchets au détriment des biocarburants plus économes en émissions de gaz.

Le rapporteur du Parlement Européen (COMENVI) sur les propositions de la Commission, tout en reconnaissant l’intérêt de fixer des objectifs européens spécifiques en matière d’énergie renouvelable dans les transports et en proposant de relever le taux actuel de 10 à 12%, réduit dans le même temps de manière spectaculaire la part des biocarburants conventionnels à moins de 3%, et cela sans explication valable.

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Il est de fait grand temps de retourner aux faits et d’affronter les positions populistes qui trouvent dans les biocarburants l’explication des famines et des pénuries. Bien au contraire, les biocarburants conventionnels sont générateurs d’emploi, d’augmentation des revenus et d’une amélioration de la sécurité alimentaire.

Si la « sagesse commune » n’est rien de plus qu’une opinion dénuée de fondement, il faut sans hésitation la remettre en cause. La dernière chose que l’on attend des institutions européennes est qu’elles cèdent à des opinions erronées au lieu de les combattre vigoureusement.

Le débat autour des propositions actuelles de la Commission devrait définir des cibles plus ambitieuses encore pour l’utilisation de l’énergie renouvelable dans les transports. Le rapporteur au parlement européen a fait une proposition allant dans la bonne direction, mais elle devrait s’accompagner d’une augmentation programmée de la part des biocarburants à base de matières premières européennes dans le cocktail des énergies renouvelables.

En plus de cela, les critères de durabilité imposés aux biocarburants d’origine alimentaire devraient privilégier ceux qui génèrent de la nourriture protéinée, remplaçant ainsi l’importation de céréales et libérant des terres agricoles dans les pays tiers pour la production d’alimentation humain et animale ou pour la protection de l’environnement tout en limitant les émissions de gaz.

Ce serait bon pour l’environnement, cela créerait des emplois, génèrerait de la croissance et diminuerait la dépendance de l’UE vis à vis des importations d’aliments protéinés et de pétrole, et améliorerait la sécurité alimentaire globale.

Une PAC promouvant des Assurances climatiques efficientes – Un objectif crédible à coût modeste pour la PAC

Septembre 2017

Dans le cadre de l’Omnibus financier et relatifs à la possibilité pour la PAC d’offrir aux filières européennes une meilleure couverture des risques qu’ils rencontrent, le sujet des assurances climatiques demeure en débat.

1) Si les aides directes du 1er pilier de la PAC constituent le socle de base de la protection du revenu agricole au niveau européen, elles apparaissent de plus en plus insuffisantes pour couvrir l’ensemble des risques auxquels sont confrontés les agriculteurs, et notamment, dans le contexte du changement climatique, dès lors qu’il s’agit d’aléas climatiques. Plus une année ne se passe sans que des aides d’urgence doivent être débloquées, ici pour des grêles, là pour de la sècheresse ou des inondations.

Le risque climatique est le risque le plus fréquent, le plus imprévisible et le plus destructeur que l’agriculture connaît. Il n’est plus tenable de rester dans une gestion «politique» de ces risques, avec des enveloppes d’urgence dépendantes des disponibilités budgétaires, notamment. Une « professionnalisation » de la gestion des risques est nécessaire, qui passe par une bonne couverture des risques climatiques dans une filière permettant, de fait, une meilleure résilience aux risques de marchés.

Les assurances climatiques sont largement répandues chez nos concurrents mondiaux. Il convient, en Europe, de passer à la vitesse supérieure dès lors que ces outils ont prouvé leur efficacité, et leur complémentarité.

2) La faible proportion de superficies agricoles couvertes par des assurances climatiques en Europe tient à la faible attractivité du dispositif UE d’incitation publique.

La PAC prévoit un cofinancement à 65 % des primes d’assurances climatiques dès lors qu’elles ne se déclenchent que si 30 % de pertes ont été subies.

Les conditions agronomiques dans l’Union européenne rendent ce dispositif peu intéressant, de telles assurances ne couvrant un risque qu’extrêmement rare alors que les exploitations agricoles sont en situation difficile dès que les pertes dépassent les 20%.

Il doit être noté que des Pays Tiers (USA par exemple) ou Européens les plus en pointe (Espagne via un dispositif national adossé à un régime d’aides d’Etat validé par la Commission) ont réussi à avoir une couverture plus importante en adoptant des seuils de déclenchement cohérents avec les caractéristiques des cultures et risques afférents, allant pour certaines filières au-delà de 60 à 80% de couverture.

3) Qu’en est-il de l’argument du coût important que représenterait une telle mesure pour la PAC ?

Les superficies de cultures arables (toutes confondues) dans l’UE sont de 74 millions d’hectares, pour des capitaux totaux à assurer de quelques 76,5 milliards €. *

Pour les vignes, les surfaces sont de près de 3 millions d’hectares pour un capital assurable de 20,3 milliards €. *

S’agissant des prairies, elles comptent pour 70,5 millions d’hectares, avec une valeur du capital assurable d’un peu moins de 46 milliards €. *1

De fait, au regard des assurances climatiques qui pourraient être mises en place, le montant des cotisations qui pourraient être cofinancées si 100% des surfaces européennes de cultures arables, de vignes, et de pairies étaient couvertes par des assurances récoltes serait d’environ 7,2 milliards d’euros par an, d’où des aides PAC (subventions PAC aux primes d’assurance) de 4,7 milliards €/an pour une couverture de 100 % des surfaces.

Ce raisonnement est purement théorique.

En effet, un objectif crédible à terme est, au mieux, de couvrir 60 à 70 % des cultures arables en Europe. Quelque 40 % en moyenne européenne dans un premier temps serait déjà un bel objectif ! S’agissant des prairies, le taux moyen, à terme, de 50 % semble être un maximum. Quant aux vignes, au regard de la spécificité des secteurs, mais aussi de l’éclatement de la production dans certains pays, 70 à 80 % apparaît un maximum.

1 * Ces données (capital à assurer) correspondent à la somme des calculs réalisés pour chacun des 28 Etats membres (et non une estimation européenne globale qui serait par trop approximative).

Dans ces conditions et si tous les Etats Membres décidaient de mettre en œuvre ces mesures facultatives (dans le cadre du 2nd pilier de la PAC) et volontaires pour les agriculteurs, les cofinancements PAC pour un dispositif renouvelé fonctionnant à son optimum seraient alors au maximum de 2,8 milliards €/an, soit au maximum 5 % du budget PAC annuel (équivalent à 7% du budget 1er pilier PAC). Les volumes budgétaires se répartiraient dès lors de la façon suivante entre les différents secteurs :

– 1,2 milliards €/an pour les cultures arables, – 700 millions €/an pour la vigne
– 900 millions €/an pour les prairies

4) L’argument souvent avancé pour freiner le développement de ces outils est l’absence, pour l’Union européenne, de marges de manœuvre à l’OMC. Qu’en est-il ?

En réalité, les engagements OMC de l’UE ne sont aucunement un frein à des tels changements, il s’agit là uniquement d’un argument politique.

Si les subventions aux primes d’assurance récolte sont bien classées dans la boite verte OMC si les dites primes se déclenchent pour 30 % ou plus de pertes et compensent 70 % des pertes au maximum, un cofinancement de primes avec un seuil de déclenchement à 20 % est tout à fait autorisé dès lors que l’UE peut le notifier dans le cadre de ses droits « clause de minimis ». De fait, l’UE a une très grande marge au titre de la clause « de minimis » OMC (ne pas confondre avec le régime des aides d’Etat dit de minimis dans l’Union Européenne). Cette marge est sans commune mesure avec les 2,8 milliards € maximum d’aides PAC qu’il lui faudrait notifier au titre d’assurances récoltes ainsi revues.

Que l’UE notifie 2,8 milliards € de plus d’aides au titre de la clause de minimis (et potentiellement 2,8 milliards € de moins en boite verte), est-il un argument recevable pour s’opposer au changement demandé par le Parlement ?

Outre la faiblesse des montants en jeu, l’importance économique de cette mesure et le fait que nos concurrents mondiaux ne s’embarrassent pas de ce type de considération suggère que, l’argument ne semble guère sérieux dans un monde de compétition économique. La beauté de l’argutie juridique doit être fortement relativisée face à la réalité de la donne économique.

Et ce, d’autant plus que cet argument OMC n’a pas empêché la Commission européenne, elle-même, de faire des propositions en matière de développement d’Outil de Stabilisation des Revenus, pour lequel un déclenchement par secteur et dès 20 % de baisse a été proposé, ce qui montre l’utilisation à géométrie variable de cet argument OMC.